Archives nationales du film : 80 ans de conservation de la mémoire cinématographique tchèque
Les Archives nationales du film (« Národní filmový archiv » - NFA) fêtent cette année leur 80e anniversaire. Depuis 1943, l’institution archive et travaille à la promotion d’œuvres audiovisuelles tchèques tant dans le pays qu’à l’étranger.
Michal Bregant est le directeur des NFA depuis 2012. Pour Radio Prague International, il explique son fonctionnement :
« Nous couvrons la collection complète des films produits en Tchéquie depuis 1898 et continuons à la développer puisque nous recueillons également les productions actuelles. Nous avons le monopole dans le pays et la responsabilité de veiller à la bonne conservation de ces œuvres. Nous souhaitons que les films soient accessibles et visionnés, non seulement dans notre cinéma, mais aussi en ligne et par toutes sortes de canaux de distribution. »
Une histoire qui a débuté sous l’occupation allemande
Les NFA comptent parmi les dix plus anciennes et plus importantes archives cinématographiques au monde. L’institution a vu le jour en pleine Seconde Guerre mondiale, quand la Bohême et la Moravie se trouvaient encore sous occupation allemande.
« L’administration nazie voulait exercer un contrôle sur l’industrie cinématographique en Bohême et en Moravie. Par ailleurs, il y avait une forte motivation parmi les propriétaires de cinémas du pays, qui possédaient leurs propres collections de films, de placer celles-ci à un endroit plus sécurisé. Il faut imaginer qu’à l’époque, les bobines de films étaient très fragiles car elles étaient produites avec du nitrate, un matériau inflammable et donc très dangereux. »
Michal Bregant explique également les difficultés auxquelles les archives nationales ont été confrontées durant l’époque communiste en Tchécoslovaquie :
« La censure voulait enlever les films provenant des pays impérialistes et exercer un contrôle idéologique sur la collection, ce qui est complètement fou. Il a fallu du courage aux archivistes pour conserver la collection dans sa forme complète. Plus tard, dans les années 1960, cela est devenu plus facile, car les archives cinématographiques en Europe ou dans le monde ont commencé à communiquer davantage entre elles. Et puis, dans les années 70 et 80, les archives nationales ont de nouveau été isolées des évolutions internationales à cause de la politique dite de ‘normalisation’ ».
Une vaste coopération internationale
Contrairement à d’autres pays, la République tchèque ne compte qu’un seul centre d’archives de films. La NFA est donc particulièrement sollicitée pour collaborer avec de nombreux services d’archives à l’international. Elle est notamment membre de la FIAF (la Fédération internationale des archives du film) et de l’ACE (l’Association des cinémathèques européennes).
« Avec l’association européenne, nous essayons de communiquer activement avec la Commission européenne concernant les différents projets, les budgets mais aussi la coopération avec des institutions ou des organisations telles qu’Arte Télévision, qui intègre désormais les films classiques comme segment important de sa programmation. »
Interrogé sur l’organisation d’un éventuel évènement pour célébrer les 80 ans du centre d’archives, Michal Bregant explique simplement :
« Nous célébrons l’existence de notre institution et de notre collection chaque jour à chaque projection dans notre cinéma. En fait, le plus important pour nous est que le public comprenne que les archives sont là pour lui et que nous ne faisons pas que conserver des documents. »
Le Kino Ponrepo, un ciméma ouvert à tous, y compris aux étrangers
Les films de la collection sont régulièrement projetés dans la cinémathèque de la NFA, le « Kino Ponrepo ». Situé rue Bartolomějská à Prague, il est l’un des derniers cinémas à présenter des films tirés de bobines, la plupart en format 35 mm d’origine. Le programme, très diversifié, comprend aussi bien des films contemporains que des films expérimentaux ou encore des films muets, accompagnés par une musique jouée en direct lors de la projection. Les adeptes du Kino Ponrepo peuvent se retrouver dans le café du même nom ou dans la librairie du cinéma.
« Ce cinéma a toujours été un des centres de la vie culturelle et intellectuelle. Avant 1990, il était l’un des rares endroits qui proposait de bons films, des classiques. C’est pourquoi il était si populaire. Aujourd’hui, je suis très fier que Ponrepo soit prisé par la jeune génération. La majorité de notre auditoire est jeune, ce sont principalement des étudiants, même si nous souhaitons nous adresser à toutes les générations de spectateurs. »
Cet endroit animé où les Pragois se rendent régulièrement s’adresse également aux étrangers résidant ou de passage dans la capitale tchèque, puisque de nombreuses projections sont proposées en anglais ou en version originale. Il est donc possible d’y retrouver, aussi, des classiques français...