La pénurie de médecins persiste en République tchèque

Photo: ČT24

La République tchèque fait face à une pénurie chronique de personnel médical. Selon les données de la Chambre médicale tchèque, chaque année près de 200 médecins et autant de personnes fraîchement diplômées quittent le pays pour l’étranger. Selon les syndicats, la hausse des salaires de 5% dans le domaine médical en vigueur depuis le début du mois de janvier ne risque pas de freiner la fuite des cerveaux.

Photo: ČT24
Face à la carence du nombre de médecins et infirmiers, de nombreux hôpitaux sont confrontés à des situations difficiles, certains allant même jusqu’à supprimer certains services. L’hôpital de Karlovy Vary, qui se trouve dans une situation des plus dramatiques, a dû fusionner certaines salles de malades. Récemment, l’hôpital a décidé d’offrir une prime à l’embauche de 70 000 couronnes (2 500 euros) pour les médecins et de 50 000 couronnes (environ 1 800 euros) pour les infirmiers. Parmi les différents centres hospitaliers universitaires, l’insuffisance du personnel diffère : si celui d’Olomouc ne manque d’aucun infirmier, celui de Prague en aurait besoin de 70. L’hôpital Thomayerova nemocnice enregistre une insuffisance de 40 infirmiers et fonctionne avec une fermeture partielle des lits. Selon l’organisation des syndicats de médecins, le secteur manquerait de près de 2 000 infirmiers et depuis le début de l’année 160 médecins au total ont fait une demande des attestations nécessaires pour pouvoir partir à l’étranger. Toutefois dimanche, le ministre de la Santé, Svatopluk Němeček, a tenu à nuancer le poids de ces données :

Svatopluk Němeček,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
« Nous ne disposons pour l’heure que des données de la Chambre médicale tchèque, qui délivre ces attestations. Mais après 25 ans de fonctionnement, notre Etat ne dispose toujours pas de ses propres chiffres vérifiés, à savoir combien y-a-t-il de médecins, combien s’en vont et combien reviennent. En fait, actuellement, il n’existe pas de registre des professionnels de la santé. Nous avons déposé un projet de loi, qui devrait permettre la création d’un tel registre. Le projet est en train d’être débattu au Bureau pour la protection des données personnelles. Donc j’espère que d’ici la fin de l’année, afin d’y voir plus clair, nous allons nous prononcer pour que l’Institut des informations et des statistiques sur la santé (ÚZIS) puisse travailler avec ce registre. A l’heure actuelle, nous ne pouvons que spéculer sur le fait de savoir si les médecins, qui ont fait la demande de leur attestation, quittent effectivement le pays, ou combien d’entre eux reviennent. Il est difficile de gérer une telle situation. »

En ce qui concerne les diplômés des facultés de médecine, dont le cursus universitaire complet coûte à l’Etat près d’un million de couronnes par étudiant, un cinquième d’entre eux décident d’aller directement à l’étranger. Si pour le ministre de la Santé, il est tout à fait irréel que l’on puisse stopper le flux des médecins tchèques quittant le pays, Svatopluk Němeček, a tenu à mettre en garde contre cette situation :

Photo: ČTK
« Je crois que la situation actuelle est une grande menace pour l’avenir. Il existe trois facteurs qui vont déterminer si les praticiens restent dans le pays ou vont y retourner par la suite. En premier lieu, il s’agit de la réforme du système d’enseignement, dont le projet de loi se trouve actuellement en procédure interministérielle. La deuxième question est celle des salaires. A ce sujet, je dois dire que nous disposons d’un personnel médical de très bonne qualité pouvant concurrencer les autres pays. Et puis, il est également nécessaire de prendre en compte l’ambiance sur les lieux de travail. »

Dans ce sens, Michal Křemen, spécialiste en médecine interne, qui a passé dix ans aux États-Unis et s’est installé en 2013 à Genève, a précisé quelles ont été les raisons qui l’ont poussé à quitter le pays pour exercer sa profession:

« Je crois qu’en tant que médecin qui débutait dans le métier, je ne voulais pas plonger dans le climat des hôpitaux tchèques que j’avais bien saisis pendant mes études. Très tôt j’ai réalisé que je ne voulais pas débuter et apprendre dans ce mauvais système d’enseignement spécialisé et dans une atmosphère quelque peu hostile. »

Photo: ČTK
Un autre problème est donc également lié à un système d’enseignement et de formation qui peine parfois à fonctionner. Un nouveau projet de loi devrait prochainement permettre aux étudiants en soins infirmiers de pouvoir plus rapidement intégrer en pratique les milieux hospitaliers. Le projet prévoit également de donner plus de compétences aux infirmiers et aux aides-soignants, qui n’avaient jusqu’à présent qu’une compétence limitée dans certains soins. Toutefois, l’Association des infirmiers souhaite que le nombre de places au sein des Facultés de médecine soit lui aussi augmenté. Dimanche, le ministre de la Santé, Svatopluk Němeček, a indiqué que son département comptait demander au gouvernement la somme additionnelle de près de 4,5 milliards de couronnes (soit 163 millions d’euros), une somme destinée à l’augmentation des salaires.