18 ans d’un procès en diffamation sans fin
C’est un record dans les annales de la justice tchèque, par ailleurs peu connue pour sa rapidité... Un cas d’école qui oppose depuis 18 ans trois anciens étudiants en architecture à l’ancien doyen de leur faculté qui les traîne en justice pour diffamation. L’affaire remonte aux premières heures de la Révolution de Velours.
A cette époque trois étudiants en architecture, à Brno, font partie des meneurs du comité de grève. Ils publient alors une déclaration qualifiant Jan Snášel, leur doyen, un fonctionnaire communiste, d’« arriviste, démagogique et arrogant ». Milan Laštovička, aujourd’hui architecte, se souvient :
« C’était une personnalité dirigeante qui s’est clairement opposée aux étudiants. Pour nous, il était une menace... »
Avec le renouveau démocratique, le vent tourne, et l’ancien apparatchik apprend vite les rouages de la démocratie retrouvée. En 1991, il porte plainte contre les trois étudiants pour diffamation et demande des excuses par voie de justice. Depuis, en dépit du fait que toutes les décisions de justice aient donné raison aux trois anciens étudiants, le conflit perdure et Jan Snášel relance les procédures.
Dernier rebondissement en date : la Cour constitutionnelle a refusé à Snášel le droit d’impliquer son fils dans la procédure judiciaire. L’ancien doyen estimait que ce conflit sans fin portait atteinte aux activités d’entrepreneur qu’il mène avec son fils. Mais la plus haute instance judiciaire en a décidé autrement. Pour la troisième fois consécutive, elle s’est rangée du côté des trois architectes. Milan Laštovička ne cache toutefois pas sa fatigue, après toute ces années de procédures :« C’est une honte qu’on doive encore s’occuper de ce cas, vingt ans après la Révolution de Velours... »
Dix-huit ans de procédures donc, et ce n’est pas fini, malgré les multiples décisions judiciaires en faveur des trois architectes. Il y a quelques années d’ailleurs, la Cour européenne des droits de l’Homme à Strasbourg, leur avait reconnu le droit à des compensations financières s’élevant à 5 000 euros, en raison de la durée du conflit.