Deux regards sur la construction européenne
Deux Prix Nobel français ont récemment séjourné à Prague. Alena Gebertova a profité de l'occasion pour leur demander quelle est leur attitude vis-à-vis des perspectives de la construction européenne et quelle importance ils attribuent à l'édification de l'espace européen commun, en matière de science notamment. M. Claude Cohen Tannoudji, Prix Nobel de physique :
« Je pense qu´elle est essentielle, elle est décisive, parce que pour se comparer à un pays comme les Etats-Unis qui a un nombre d´universités de tout premier plan, il faut édifier ensemble l´espace scientifique européen. Je pense que si l´on prend l´ensemble des pays européens, dans la matière grise, l´Europe est comparable aux Etats-Unis, et si elle est bien gérée, alors elle peut l'égaler, voire lui être supérieure. »
Le professeur Jean-Marie Lehn, Prix Nobel de chimie, est plus catégorique encore:
« La construction européenne est pour moi plutôt une idée historique, une évolution historique importante, c'est un développement qui s'inscrit dans l'histoire, tout comme se sont construits les empires romains, égyptiens... L'Europe se fait avec une énorme différenc :, au lieu de faire parler les armes, elle est faite par les gens qui essaient de s'entendre. Pour cette raison, je regrette beaucoup ce que les Français ont voté, je crois qu'ils ont eu totalement tort et ils le regretteront... C'est un essai de réaliser ce que personne n'a encore jamais réalisé au monde... essayer de rassembler les gens de 25 pays qui, jadis, se sont combattus, se sont entretués pendant de longues années. C'est difficile, des gens avec des cultures, des langues, des habitudes différentes, c'est difficile, mais c'est d'autant plus intéressant... La recherche et la science n'ont pas de frontières. La science est universelle. C'est d'ailleurs la seule culture universelle. »