Frantiskovy Lazne ou la nostalgie de l'âge d'or du thermalisme en Bohême

Frantiskovy Lazne, photo: CzechTourism
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La ville d'eau de Frantiskovy Lazne est moins connue que ses consoeurs du « triangle thermal » de la Bohême du nord-ouest Karlovy Vary et Marianske Lazne. C'est pourtant une station pleine de charme qui mérite une petite visite que l'on soit curiste ou simple touriste... Il y règne une ambiance surannée venue tout droit du XIXe siècle, lorsque toute la bonne société européenne s'y donnait rendez-vous, mais aussi un calme bien appréciable dans ses parcs ombragés. Partons donc ensemble prendre les eaux à Frantiskovy Lazne !

Frantiskovy Lazne,  photo: CzechTourism
Frantiskovy Lazne est située à quelques kilomètres seulement de la frontière allemande, à proximité de la jolie petite ville tchèque de Cheb. Ses faubourgs quelconques ne laissent pas deviner la splendeur du centre, où se trouvent les parcs et les établissements thermaux de la station. Aujourd'hui moins visitée que Karlovy Vary, où déferlent tous les jours des cohortes de touristes venus des quatre coins du globe, cela lui a permis de préserver une certaine authenticité, et on croirait tomber nez à nez au coin d'une rue avec une élégante en ombrelle des siècles passés. Cependant, même si elle n'a plus l'animation d'autrefois, la ville est restée très appréciée par les retraités allemands qui viennent en nombre pour une simple excursion ou une vraie cure.

Frantiskovy Lazne,  photo: CzechTourism
L'histoire des thermes débute dès le Moyen Age avec la découverte de la première source : la source acidulée de Fenland. L'eau était acheminée jusqu'à Cheb par les femmes qui travaillaient dans les carrières voisines et servie aux hôtes de passage. A partir du XVIIe siècle, des médecins commencèrent à se rendre compte de ses propriétés médicinales dans le traitement des troubles de la digestion, de la locomotion, ainsi que de la stérilité, et les curistes commencèrent à affluer. L'eau était alors distribuée dans toute l'Europe dans des bouteilles en céramique. A la fin de la Guerre de Trente Ans, le problème de la construction d'un véritable spa à proximité des sources commença à se poser, car jusqu'alors, les curistes se logeaient à Cheb, à six kilomètres du site des sources. Un premier spa et une petite auberge furent construits sur le site des sources, mais ses promoteurs se heurtèrent à l'hostilité des hôteliers de Cheb qui voyaient leurs revenus décliner. Finalement, il fallu attendre 1785 pour que le docteur Adler, originaire de Cheb, ne décide d'envoyer une requête à l'empereur Léopold Ier pour obtenir sa protection et l'établissement de thermes dignes de ce nom. Les travaux commencèrent quelques années plus tard. Le station prit le nom de Frantiskovy Lazne, ce qui signifie « les thermes de François », du nom de l'empereur autrichien François Ier, successeur de Léopold Ier et lui aussi favorable au développement des thermes.

Frantiskovy Lazne,  photo: CzechTourism
La station a gardé le plan originel que lui ont donné ses premiers promoteurs à la fin du XVIIIe siècle, avec la rue principale où s'alignent les splendides façades jaune pastel des établissements de bains. Les plus anciennes sont de style Néo-classique ou Empire, mais à partir du milieu du XIXe siècle, la vague historiciste attint la station thermale et les architectes - Karl Wiedermann et son fils Gustav - se mirent à combiner des éléments gothiques, Renaissance, baroques ou rococo pour créer des thermes et des hôtels à l'architecture unique. Frantiskovy Lazne, à l'instar de Karlovy Vary ou Marianske Lazne, compte également des colonnades, comme la « Nová kolonáda » ou Colonnade nouvelle, où la foule des visiteurs et curistes pouvait tranquillement déambuler. Il faut savoir, en effet, que près de 20 000 curistes et 80 000 curieux s'y pressaient durant l'âge d'or, au début du XXe siècle. Avec les deux guerres mondiales, la mode des cures thermales déclina, puis Frantiskovy Lazne devint un établissement d'Etat. Aujourd'hui, les touristes sont de retour et peuvent profiter de l'atmosphère impériale de la ville, dont les bâtiments parfaitement conservés font penser à un décor de cinéma.

Frantiskovy Lazne,  photo: CzechTourism
La visite de Frantiskovy Lazne est le moyen idéal pour le touriste étranger de se familiariser avec les us et coutumes du « triangle thermal ». Comme dans toutes les stations thermales de Bohême, on ne peut déambuler dans la ville sans l'accessoire indispensable du parfait curiste qu'est la tasse à bec. Cet instrument vous permettra de goûter à toutes les sources qui font la réputation de la station, et il y en a une vingtaine disséminées un peu partout ! Vous pourrez l'acquérir dans n'importe quelle boutique pour touristes du centre, on en trouve de toutes les tailles et à tous les prix. C'est l'occasion de faire coup double puisque la plupart de ces fioles sont fabriquées sur place dans une porcelaine renommée, et cela fera donc un petit souvenir à rapporter à la maison... Il vous faudra aussi certainement vous armer de patience et de courage, car il faut une matinée entière pour faire le tour de chaque fontaine et ne pas se laisser rebuter par l'aspect ou l'odeur parfois peu engageants des eaux. Contrairement aux sources de Karlovy Vary qui sont chaudes, celles de Frantiskovy Lazne arrivent en surface à une température d'environ 10 à 12 degrés. Elles sont pétillantes et à forte teneur en fer et en soufre, d'où leur couleur qui peut aller jusqu'au marron.

L'autre avantage enfin de la vie de curiste à Frantiskovy Lazne, c'est de pouvoir profiter aussi des délices de la gastronomie locale et tout particulièrement des « gaufrettes des thermes » ou Lazenske oplatky en tchèque. On trouve des cukrarna (pâtisseries) qui en font commerce à chaque coin de rue, voire même des boutiques entières qui leur sont consacrées. Cette spécialité existe depuis fort longtemps, et de nombreuses personnalités telles que Mozart, Schiller ou l'empereur Pierre le Grand en étaient, paraît-il, friands. Fabriquées et vendues au départ directement par les habitants, des dizaines de manufactures ont dû être développées tout au long du XIXe siècle pour faire face à la demande, si bien qu'en 1902, on en produisait quatre millions par an ! Ces gaufrettes sont rondes et très fines, et fourrées traditionnellement avec du sucre au goût de vanille et de noisette, mais on en trouve aujourd'hui de tous les parfums : tiramisu, nougat ou encore l'excellent pomme-cannelle. Je vous laisse imaginer et je l'espère tester un jour vous-même le délice d'en manger une toute chaude à l'ombre des colonnades...

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Auteur: Emanuelle Jammet-Decaix
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