Jožka Černý, le roi de la chanson morave

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Le chanteur Jožka Černý est surnommé « le roi des chansons traditionnelles moraves ». Interprète légendaire de centaines de chants transmis de génération en génération, Jožka Černý s’est forgé sa place sur la scène du pays aux côtés de différents ensembles folkloriques de Moravie, berceau de nombreuses musiques traditionnelles. Preuve de son succès, il a vendu plus d’un million d’albums. Et, comme ses collègues musiciens chanteurs, Ivan Mládek ou Karel Vágner, Jožka Černý a lui aussi fêté ses 75 ans en ce début d’année, le 14 mars dernier. Radio Prague vous propose un programme exceptionnellement consacré aux chants traditionnels moraves, qui se font rares sur les ondes des radios tchèques.

L’indétrônable Jožka Černý et sa « cimbálovka »

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Né dans la commune de Čejč, en Moravie du Sud, Jožka Černý baigne dès son plus jeune âge dans le monde de la musique. En 1946, il se produit pour la première fois à l’âge de quatre ans seulement lors d’une fête du village à Stará Břeclav, ainsi que devant le président tchécoslovaque Edvard Beneš à son retour d’exil d’Angleterre à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Et c’est bien pour cette raison que Jožka Černý peut se targuer d’être le musicien à la plus longue carrière dans le pays.

Celui que l’on a appelé un temps « l’enfant prodige » s’est par la suite initié au piano, mais il se produisait avant tout en tant que chanteur aux côtés de sa sœur Květa, musicienne très douée elle aussi. C’est à cette époque que les chants traditionnels interprétés par un autre Jožka, Jožka Severin, captivent l’attention du jeune chanteur. Ces morceaux moraves folkloriques interprétés par Jožka Severin dominaient les ondes des radios du moment, notamment grâce aux duos chantés avec Božena Šebetovská, l’une des icônes du folklore de l’époque. Quelques années plus tard Jožka Černý chantera lui aussi avec Jožka Severin, pour devenir par la suite son « héritier ». Jožka Černý sort son premier disque à l’âge dix-huit ans ; il sera suivi de dizaines d’autres albums.

Toujours accompagné de sa « cimbálovka », nom tchèque que l’on donne à l’ensemble traditionnel des cymbalums, Jožka Černý s’est tout d’abord fait connaître aux côtés de différents ensembles tels que Břeclavan, Podlužan ou BROLN – l’orchestre radiophonique des instruments folkloriques de Brno - puis avec l’ensemble d’instruments à vent Moravanka, lequel a rendu populaires bon nombre de chansons moraves auprès du grand public.

A côté de son activité dans la chanson, Jožka Černý s’est aussi consacré à plusieurs autres métiers, passant de chauffeur à « forgeron artistique ». Mais c’est dans la musique qu’il rencontre le succès. Dans le cadre d’une tournée aux Etats-Unis et au Canada en 1971, le chanteur s’était notamment produit aux côtés de Jarmila Šuláková, celle qu’il surnommait avec tendresse « notre Ella Fitzgerald ». La « reine morave » de la chanson folklorique s’est malheureusement éteinte le 11 février dernier.

Les chants folkloriques avec un chanteur sympathique vecteur d’une énergie positive

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Si les chants traditionnels moraves jouissaient d’une grande popularité à travers le pays avant 1989, l’année de la Révolution de velours marque un tournant intéressant au niveau des textes. Par le passé, le régime communiste surveillait les paroles et exigeait que certains passages soient modifiés, en particulier lorsqu’il était question d’allusions faites à la religion. Dans un entretien accordé en 2012, Jožka Černý commentait ces pratiques de censure. Pour lui, changer les paroles de ces chansons était d’autant plus inacceptable qu’elles avaient parfois une tradition centenaire.

Toutefois, Jožka Černý, qui est devenu le symbole du folklore morave, n’a pas toujours eu envie d’être cantonné à ce seul genre. En 2005, il crée la surprise avec l’album « S árií mládnout smíš » - « Tu as le droit de rajeunir avec un air » contenant des airs de musique classique nés de la plume de compositeurs comme Giuseppe Verdi, Frédéric Chopin ou Antonín Dvořák. A l’heure actuelle, Jožka Černý continue inlassablement de se produire avec son groupe de cymbalums Gracia, une collaboration qui dure depuis vingt-deux ans maintenant.

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Il y a quelque temps de cela, Jožka Černý avait confié que son plus grand souhait était d’enregistrer un album qui s’orienterait davantage vers des penchants plus swing. Même si le chanteur regrettait parfois que les chansons folkloriques ne recevaient pas l’attention méritée de la part des médias, il se disait heureux de voir que la musique traditionnelle vivait une renaissance grâce à des musiciens plus jeunes et passionnés.

Du haut de ses 75 ans, le chanteur ne pense en aucun cas mettre fin à sa carrière. « Tant que le public le voudra et tant que j’aurai pour qui chanter, je vais continuer de me produire sur scène. Et tant qu’à faire jusqu’à mes 100 ans ! », déclare-t-il ainsi. Et le public, qui se rend à ses concerts à guichets fermés, le lui rend bien. Jožka Černý y rassemble chaque fois près de trois générations de fans ; preuve que la musique folklorique continue de plaire.

Vínečko bílé - Petit vin blanc : « Petit vin blanc,
cadeau de ma bien-aimée,
je vais te boire,
tant que je serai en vie.
petit vin blanc. Petit vin rouge,
tu es le cadeau de la deuxième,
je vais te boire,
tant que je serai en vie,
petit vin rouge. Mes deux petits vins,
mes deux filles,
je vais vous boire,
tant que je serai en vie,
mes deux petits vins. »