Les fastes de la Chapelle de Rodolphe II

Grande messe à la chapelle de l'empereur Rodolphe II - c'est sous ce titre que l'ensemble français Doulce Mémoire et plusieurs chanteurs tchèques ont présenté, mardi, à l'église Saint-Simon et Saint-Jude à Prague, un concert de la musique des maîtres du XVIe siècle, Philippe de Monte, Lambert de Sayve, Jacob Regnart et Alessandro Orologio. On doit la résurrection de ce répertoire au chef de l'ensemble Doulce Mémoire, Denis Raisin Dadre. Ce dernier a répondu, à l'issue du concert, à quelques questions de Radio Prague.

Que peut-on dire des auteurs que vous avez choisis pour cette soirée?

"Ce sont tous des auteurs qui étaient au service de Rodolphe II à Prague durant son règne, sauf Lambert de Sayve, qui, lui, était au service du frère de l'empereur, l'archiduc Mathias."

Où avez-vous trouvé les interprètes de cette musique?

"Les instrumentistes sont membres de mon ensemble en France "Doulce mémoire" et les chanteurs sont des Tchèques que nous avons recrutés ici à Prague."

Fut-il facile d'harmoniser les exécutants de différentes catégories, les Français et les Tchèques?

"Oui, parce qu'on a pris le temps de le faire. On a d'abord fait travailler les chanteurs en novembre, pendant plusieurs jours. Et ensuite, nous avons réuni tout le monde et avons travaillé pendant un certain temps. Pour monter ce concert nous avons pris plus de temps qu'en France parce que c'était des gens nouveaux pour nous. Mais c'était très intéressant et cela s'est très bien passé."

La musique de la période rodolphienne était-elle une musique internationale ou il y avait des résonances, par exemple, du folklore de Bohême éventuellement du foklore d'autres pays où cette musique était exécutée?

"Non, je pense qu'elle était totalement internationale et je pense que la seule musique marquée par l'influence tchèque pouvait être la musique qu'on faisait dans les églises hussites. A partir du moment où c'était la musique plutôt pour le culte catholique, c'était vraiment de la musique internationale et européenne."

Pourquoi avez-vous divisé les exécutants en deux et parfois même en plusieurs parties?

"Parce que l'acoustique ici est assez spéciale. Le choeur de cette église ne sonne pas très bien pour les voix, le son est beaucoup plus beau dans les chapelles latérales de l'église, et d'autre part, comme une messe a double choeur, c'est intéressant d'entendre cette opposition entre les deux choeurs. "

Quelle a été la part de la musique sacrée et celle de la musique profane dans le répertoire que vous avez choisi pour aujourd'hui?

"Pour aujourd'hui ce n'était vraiment que de la musique sacrée. C'était de la musique qu'on pouvait faire dans un cadre sacré, dans la chapelle de l'empereur Rodolphe. Cependant, l'empereur Rodolphe avait bien sûr toutes sortes d'autres musiciens qui faisaient aussi une musique pour un espace profane, pour ce qu'on appelait "la Chambre", la musique qu'on faisait dans les palais et la musique pour la danse. D'ailleurs, les "intrada" que nous avons jouées aux instruments à vent pourraient aussi être utilisées dans un cadre plus profane."

Cette collaboration franco-tchèque aura-t-elle une suite?

"Moi, je le souhaite, en tous cas il y des chanteurs ici avec qui j'aimerais bien travailler en France et que, sans doute, j'engagerai en France. Il y a des gens excellents ici."

N'envisagez-vous pas de faire un enregistrement du répertoire de cette soirée?

"Peut-être, c'est une question qu'on m'a déjà posée. S'il y a une maison de disques qui est intéressée, peut-être pourrions-nous le faire, en effet."