L’œuvre d’Alfred Kubín, source d’inspiration inépuisable pour les artistes contemporains

L’abbaye cistercienne d’Auberive, en Haute-Marne, en France accueille depuis le 13 juin, et jusqu’au 12 septembre une exposition consacrée à Alfred Kubín. Ce peintre autrichien, né à Litomeřice en Bohême en 1877 et décédé en 1959, connaît un regain d’intérêt en France notamment. Après la grande exposition au Musée d’art moderne de la ville de Paris en 2007, celle d’Auberive pose un nouveau jalon dans la redécouverte de cet artiste symboliste. En outre, ce centre d’art a choisi un postulat muséographique pour le moins original. Alexia Volot dirige la programmation culturelle de l’abbaye et du centre.

L’abbaye d’Auberive
« L’abbaye d’Auberive est un centre d’art contemporain pour ce qui est de son aile Ouest, soit environ 1 000 m2. C’est là que tout les ans est créée une exposition thématique à partir du fond de l’abbaye, un fonds plutôt tourné vers l’art contemporain figuratif, dit singulier ou expressioniste, selon les appellations. »

Cet été vous exposez un artiste autrichien, mais d’origine tchèque, Alfred Kubín, jusqu’au 12 septembre. Pourquoi avoir choisi Kubín justement ? C’est un artiste assez ignoré même s’il commence à être découvert en France...

Alexia Volot
« D’abord parce que c’est un coup de cœur depuis de longues années d’histoire de l’art certainement. Ensuite, parce qu’on s’est aperçu qu’en matière d’art contemporain figuratif, c’est une référence absolue pour les artistes, notamment pour les dessinateurs. C’était donc l’occasion pour nous d’accomplir ce tour de force d’abord de présenter Alfred Kubín, puisque nous avons dû faire appel auprès des musées autrichiens, donc répondre à des conditions muséales ce qui était en soi un défi ; et puis ensuite parce qu’on a pu réunir autour de Kubín une vingtaine de créateurs donc certains faisant partie du fond de l’abbaye et d’autres qu’on aime. C’était une façon de montrer la filiation entre Alfred Kubín, son travail, son imaginaire, les sujets qu’il a exploités tout au long de son parcours d’artistes, et d’en faire l’écho chez les contemporains. »

Quelle est justement cette filiation entre Kubín et les artistes contemporains et comment expliquer cet intérêt pour son œuvre ?

« Pour nous le plus étonnant a sans doute été de découvrir cette filiation absolument déclarée et réclamée par ces artistes qui sont pour la plupart des Français. Il y a un Belge et même un Anglais qui expose pour la première fois en France et qui se réclame de l’œuvre de Kubín. C’est certainement une filiation d’abord au niveau des thématiques et de l’imaginaire de Kubín. Egalement au niveau de son humour féroce et de cet espèce d’humour noir et implacable sur les réalité de la vie de l’Homme en tant qu’animal destiné à mourir. Mais un animal pensant, donc connaissant sa fin et essayant d’y échapper ou de vivre avec. Mais aussi au niveau de la forme et du trait, on retrouve ces univers, ce travail soit au crayon, soit à la plume et cette technique qui a influencée ces artistes présentés au centre d’art autour de lui. »

Si ces artistes contemporains se sentent une filiation avec Alfred Kubín – peut-être est-ce un peu une lapalissade de le présenter ainsi – est-ce à dire que Kubín était contemporain ou moderne avant l’heure ?

« Je crois qu’Alfred Kubín est peut-être contemporain avant l’heure parce qu’il n’a jamais cédé à des modes. En fait, Kubín est une personnalité à part entière, une personnalité entière, à la fois dans ses sujets et dans sa manière de les traiter. Pour ça, c’est un point de référence. Plutôt de dire qu’il est contemporain, je préfère dire que c’est un intemporel et qu’on peut lire à la fois en lui tout ce que les précédents ont laissé, tout en étant une source d’inspiration pour les suivants. C’est donc un jalon de l’histoire de l’art. Un modèle, même si c’est peut-être un peu fort, mais en tout cas une référence. »

Je crois savoir que vous avez préparé un petit questionnaire pour les visiteurs. Quelles sont leurs réactions par rapport à l’exposition Kubín ?

« En général elles sont très bonnes. On a deux types de visiteurs puisque l’abbaye est cistercienne, elle a été fondée au Moyen Age et reconstruite aux XVIIIe siècle. Donc on a des visiteurs pour le monument historique et des visiteurs pour le centre d’art. Comme le ticket ouvre le droit à l’ensemble, on avait besoin de cibler les réactions des visiteurs. On a des visiteurs qui ont déclaré venir très clairement pour Kubín. C’est quelque chose de très enthousiaste. Ceux qui viennent pour l’art contemporain sont souvent très contents de la passerelle établie entre Kubín et les autres artistes. »

Retrouvez bientôt plus de renseignements sur Alfred Kubín dans une prochaine rubrique culturelle.