Alruna, coeur de pierre

Et maintenant faisons un petit saut en Moravie ! Sur la route menant de la ville de Trebic à Brno, près du village de Pocoucov, il y a une croix dressée à côté d'un bloc de pierre. Souvent les passants s'arrêtent et, sans trop savoir pourquoi, ressentent une sensation étrange.

Il y a bien longtemps de cela, que vivait dans une cabane en pleine forêt, entourant Pocoucov une vieille herboriste que tout le monde appelait Alruna. Elle était très appréciée pour sa gentillesse, car elle portait secours à tous ceux qui en ressentaient le besoin, sans jamais demander de récompense ou de services en retour. Un jour, Alruna entendit des cris angoissants, couvert du martèlement de sabots. Elle sortit de sa cabane et vit un cheval emballé, traversant la forêt au grand galop. Soudain, le cheval se cabra, le cavalier tomba de sa monture et resta au sol sans bouger. Alruna le ramassa et le traîna à l'intérieur de sa cabane. Le cavalier, un riche seigneur, ne reprit conscience qu'après trois jours. Mais encore pendant de longues semaines, l'herboriste le soigna de ses graves blessures avec des cataplasmes au raifort et au séré. Une fois guérit, le seigneur tenait à la récompenser. Il lui tendit une bourse remplie de pièces d'or. Alruna refusait obstinément, mais le cavalier guérit insista tellement, que finalement la vieille herboriste accepta la bourse offerte.

Depuis ce jour, elle commença à craindre pour son or. Elle cacha la bourse dans la cave et se procura un molosse des plus féroces. Mais, le pire c'était qu'Alruna était devenue avare et méchante. Elle ne voulait guérir les gens que contre de l'argent. Une fois, une pauvre jeune femme la supplia de guérir son enfant très malade, mais la mlheureuse n'ayant de quoi payer, Alruna refusa. Le bébé succomba à la maladie. L'herboriste refusa encore l'aide à plusieurs personnes, sachant bien que son refus entraînerait leurs décès. Une nuit, elle entendit dans son sommeil des gémissements venant de l'extérieur. La vieille sursauta et, intriguée, sortit. Au clair de la lune, elle aperçut la silhouette d'une femme tenant un bébé mort dans ses bras. Elle reconnut celle, qui récemment était venue demander de l'aide pour son enfant et qu'elle avait repoussé méchamment. Alruna tressaillit ! La femme s'approchait lentement. Le regard fixé sur la vieille herboriste, elle s'exclama d'une voix emplie de haine : Transformes - toi en bloc de pierre, froide et insensible, comme toi, Alruna, femme sans foi, méchante et avare, dont l'or a fait perdre le coeur et tous sentiments humains avec. A l'instant, l'herboriste sentit ses jambes s'engourdir, et lentement se transforma en un bloc de pierre. Les villageois de Pocoucov dressèrent une croix à côté du bloc de pierre pour mettre en garde tous ceux que la richesse rendrait avares et leurs ferait oublier les malheurs des pauvres.