Pardubice, ce n’est pas que le Grand Steeple-chase...
La ville de Pardubice en Bohême orientale où s’est couru, en octobre, le Grand Steeple-chase, est la destination de cette balade touristique de Radio Prague. Située à 120 kilomètres à l’est de Prague, sur la rivière l’Elbe, Pardubice offre un panorama singulier : les tours d’églises, la silhouette du château Renaissance et les frontons des maisons de la cité historique alternent avec les cheminées d’usines pétrochimiques, parmi lesquelles la société Synthesia et sa filiale Explosia, où a été inventé et fabriqué l’explosif sans doute le plus connu dans le monde, le Semtex.
L’autre tournant dans la vie de Pardubice se produit au milieu du XIXe siècle. La construction d’une voie ferrée favorise l’implantation de l’industrie. En peu de temps, Pardubice devient l’une des deux villes les plus industrielles de Bohême orientale :
« Après 1900 commence la rivalité avec nos chers amis de Hradec Králové (rires) qui dure pratiquement jusqu’à présent ! Pendant ces années-là, Pardubice a connu un essor industriel spontané grâce auquel elle a pu éviter des interventions d’assainissement qui ont marqué l’image de beaucoup d’autres villes industrielles comme Plzeň ou České Budějovice. Grâce à cela, le centre historique de Pardubice est resté intact, à une exception près : l’édifice de la mairie. Erigée dans les années 1892-1893 dans le style de néo-Renaissance, cet édifice n’est certainement pas mauvais mais il ne correspond pas à l’aspect de cette place. »Pardubice devient la ville résidentielle de la famille Pernštejn après que Vilém, puissant aristocrate morave, occupe une position importante au sein du royaume de Bohême, suite à l’élection du roi Ladislav Jagellon. Pour pouvoir s’installer en Bohême, Vilém achète plusieurs domaines dont celui de Pardubice. Le terrain lui a permis d’y développer la pisciculture :
« En vingt ans, la famille Pernštejn a réussi à édifier dans la région de Pardubice un réseau d’étangs, l’un des plus importants en Bohême, comptant, à titre d’illustration 234 étangs. En le faisant, les Pernštejn ont devancé d’une génération le même effort déployé par les Rožmberk dans le sud de la Bohême. Les systèmes d’étangs et de canaux étaient assez rares, à l’époque. Vilém de Pernštejn en a tiré des bénéfices énormes. »En 1538, un incendie ravage la cité historique de Pardubice. C’est alors que le fils de Vilém, Jan de Pernštejn, procède à une reconstruction complète dans le style Renaissance. Les maisons sont élevées d’un étage et on utilise une nouvelle technologie de construction venue du nord de l’Italie : la terre cuite. De cette époque date la Porte verte haute de 60 mètres qui clôt la place. Un atout du noyau historique de Pardubice est qu’il a su sauvegarder ses deux styles d’origine : gothique et Renaissance. Un autre atout est son caractère représentatif :
« Pour Pardubice conçue comme ville résidentielle des Pernštejn au tournant des XVe-XVIe siècles, il est symptomatique que vous n’y trouverez pas un élément assez fréquent dans d’autres villes, à savoir les arcades qui convenaient avant tout aux artisans et aux commerçants. Cela est dû au fait qu’à Pardubice, l’accent a été mis sur l’effet des façades. Vilém de Pernštejn a procédé à l’édification d’une résidence à la hauteur de ses objectifs de représentation de l’une des familles aristocratiques les plus puissantes de Bohême. Ceci explique que Pardubice soit vue comme une ville résidentielle. » Depuis 1964, la cité historique de Pardubice est classée zone protégée. La place historique est reliée au château Renaissance par une large voie bordée de maisons anciennes restaurées. Sur le chemin, nous passons à côté de Příhrádek comme on appelle la barbacane, autrefois un ouvrage de fortification avancé devant protéger le passage vers le château. Aujourd’hui, c’est un coin pittoresque de Pardubice, avec un café et une librairie et qui sert à l’organisation de toutes sortes de manifestations en plein air. A l’origine, le château disposait d’un pont-levis au-dessus des douves. Au fil du temps, les douves ont été comblées et l’ancien château-fort du XIIIe siècle remanié en château Renaissance, ainsi que le raconte František Šebek :« Au moment où Vilém de Pernštejn a racheté à Pardubice un petit château-fort entouré de douves, l’ère de ce genre de châteaux fortifiés touchait à sa fin au profit des sièges résidentiels plus confortables. Lors des travaux de rénovation de l’ancien château-fort, Pernštejn a uni les deux principes en un seul ensemble, en créant un nouveau type de construction, à mi-chemin entre le château-fort et le palais. Du point de vue architectural, il s’agit d’un ouvrage unique. Nulle part ailleurs en Europe, on ne trouverait ce type de construction dans un état d’entretien aussi bien préservé, et nulle part ailleurs en Europe, on ne trouverait un complexe occupant un terrain aussi vaste. » Le château de Pardubice est unique du fait aussi qu’il documente le passage entre les styles gothique et Renaissance. En 1560, il devient propriété de rois de Bohême et ne subit presque plus de restaurations si bien qu’il conserve son authenticité. Sous Rodolphe II, on lui ajoute des arcades Renaissance et des décorations en sgraffites. Quand au mobilier, meubles, tapisseries et tableaux, tout a été vendu par la famille Pernštejn avant son départ. Plus tard, le château a servi de dépôt. Une restauration complète entreprise dès 1929 par le nouveau propriétaire, l’Association du musée de Pardubice, a dévoilé les fragments de fresques Renaissance dans les salles de chevalerie :« Bien que cela ne soit que des fragments, il s’agit de l’un des plus précieux ensembles de fresques Renaissance en Bohême. Inspirés de l’Antiquité, les artistes ont réalisé des peintures en trompe-l’œil sur le plafond qui font penser à un temple, avec ses colonnes typiques et ses décorations. Les peintures autour des fenêtres évoquent la nature ce qui est souligné par des ornementations végétales, des guirlandes de fleurs et des percées vers le ciel. »
Sur les fresques sont représentées des scènes bibliques dont celle basée sur l’épisode de la séduction de Samson par Dalila. On doit à Lucas Cranach l’Ancien une peinture sur panneau traitant d’un sujet théologique, située dans la grande salle de chevalerie.Le château de Pardubice est ouvert pendant toute l’année. Des concerts y sont donnés dans les salles de chevalerie et il propose aussi toute une série d’expositions. A l’heure actuelle, c’est une exposition de verre tchèque contemporain du XXe et du XXIe siècle – il s’agit d’environ 4 000 œuvres originales. Ensuite, ce sont des expositions d’armes, de pièces de monnaie, une exposition de sciences naturelles destinée aux enfants, une exposition de jouets au rez-de-chaussée et une exposition de 30 000 cartes postales au sous-sol du château.