Notre dette vis-à-vis de Josef Myslivecek
Deux fois seulement les Pragois ont eu l'occasion de voir est d'entendre, les 1er et 3 septembre, l'opéra « Antigona » de Josef Myslivecek. Une faible contribution à une meilleure connaissance de ce grand compositeur tchèque du XVIIIe siècle devenu célèbre grâce au public italien.
Dans les années 1770 les succès de Josef Myslivecek en Italie, patrie de l'opéra, ont été fantastiques. Les grands théâtres s'arrachaient ses opéras « Il grand Tamerlo », « L'Olympiade », « Armida », le compositeur adoré a été surnommé par le public enthousiaste « Il divino Boemo (Le divin Tchèque) ». La musicologie moderne reconnaît en lui le précurseur direct de Mozart, avec qui il s'est lié d'ailleurs d'une forte amitié.
Pourtant, aujourd'hui ses oeuvres scéniques qui respectent strictement la forme de « l'opera seria », ne reviennent que rarement dans le répertoire de nos théâtres. L'année dernière le Théâtre d'Ostrava avait présenté « L'Olympiade », ce week-end on a pu voir au Théâtre des Etats à Prague l'opéra « Antigona » créé en coproduction avec l'ensemble allemand Kammeroper Schloss Rheinsberg. Le livret de Gaetano Roccaforto traite très librement le thème antique. Le metteur en scène Jiri Nekvasil et le scénographe Daniel Dvorak l'ont actualisé en le situant dans le bureau d'un chef d'Etat moderne évoquant le régime dictatorial d'un pays d'Europe de l'Est. Certaines allusions de la mise en scène font penser à la Biélorussie et le personnage de Créon ressemble beaucoup au président Loukachenko.
De telles actualisations, quelque originales ou choquantes soient-elles, ne sont pas cependant décisives pour le succès d'un opéra. Ce qui est plus important, c'est la capacité du metteur en scène à saisir une logique intérieure de l'oeuvre et évidemment la qualité de l'interprétation. La presse pragoise s'est montrée assez critique vis-à-vis de l'orchestre de Théâtre national placé sous la direction de Roger Boggasch lui reprochant son manque de souplesse et une intonation incertaine. Les critiques ont été beaucoup plus contents des solistes, notamment de la soprano coréenne Huyn-Ju Park dans le rôle d'Antigone et du contre-ténor Steve Wächter, appréciant non seulement leur technique vocale mais aussi leur façon d'exprimer les conflits intérieurs de leurs personnages.
La dette que nous avons vis-à-vis de Josef Myslivecek reste donc grande, et cela non seulement au théâtre mais aussi dans le domaine de l'enregistrement. Les archives sonores de la Radio publique tchèque ne disposent, par exemple, que d'un seul air de l'opéra Antigona, heureusement dans une brillante interprétation de Magdalena Kozena.