Prague érigera un monument aux parachutistes
Un monument sera élevé dans le quartier pragois de Kobylisy à la mémoire de l’attentat du 27 mai 1942 baptisé ‘Opération Anthropoïde’ contre le troisième officier de la hiérarchie nazie, Reinhardt Heydrich. Il marquera le lieu où deux parachutistes Jan Kubiš et Josef Gabčík ont tiré sur le véhicule de Heydrich désigné ‘protecteur’ de Bohême et Moravie en 1941. Cette année, le jour du 66e anniversaire de l’attentat, la mairie de Prague 8 a posé la première pierre du futur monument qu’elle pense dévoiler l’année prochaine.
« L’attentat contre Heydrich s’inscrit parmi les plus grands actes de la résistance européenne »
souligne l’historien Jiří Rajlich de l’Institut d’histoire militaire : l’opération Anthropoïde a contribué à l’annulation des accords de Munich, d’abord par la Grande-Bretagne, le 5 août 1942, suivie le 29 septembre par le Comité national de la France.
Le nom de Reinhardt Heydrich était synonyme de la terreur nazie et de la solution finale de la question juive. Le 20 janvier 1942, Heydrich a présidé la conférence de Wannsee qui était à l’origine de l’assassinat de 6 millions de Juifs en Europe. Au lendemain de son arrivée au Château de Prague, le 27 septembre 1941, le troisième officier du Reich, après Hitler et Himmler, s’est mis à réaliser son plan de liquidation de la résistance locale. Il a décrété l’état d’urgence et créé la cour martiale dont les verdicts étaient sans appel. Sous la dite ‘heydrichiade’ des milliers de Tchèques ont été déportés dans camps de concentration et des centaines fusillés. En octobre 1941, le premier ministre Alois Eliáš a été condamné à mort et dans les casernes de Ruzyne, douze hauts officiers de l’armée tchécoslovaque ont été fusillés. Dès ce moment, le sort de Heydrich était scellé : Les collègues et collaborateurs des officiers tués se trouvaient en exil à Londres et c’est dans leur milieu qu’est née, en réaction aux représailles sans précédent, l’idée d’éliminer un représentant du pouvoir d’occupation. La mission a été confiée à Jan Kubiš et Josef Gabčík. Après l’occupation de la Tchécoslovaquie, ils sont tous deux partis via la Pologne en France où ils ont servi dans l’armée étrangère du 1er bataillon tchécoslovaque à Agde. Après la chute de Paris, ils sont allés en Grande-Bretagne où ils étaient entraînés pour des tâches de combat spéciales. L’attentat de Reinhardt Heydrich a déclenché une vague de terreur. Cinq jours après la mort du protecteur, dans la nuit du 9 au 10 juin, les nazis ont rasé le village de Lidice, fusillé tous les hommes, déporté les femmes dans des camps de concentration et placé des enfants pour leur aryanisation. Le 24 juin, ils ont rasé le village de Ležáky et tué tous ses habitants. Les parachutistes qui se cachaient après l’attentat dans l’église Saint-Cyrille-et-Méthode à la rue Resslova ont été trahis suite à un interrogatoire brutal à la gestapo par l’un de leurs anciens collègues. Réfugiés dans la crypte, ils ne se sont pas livrés vivants aux nazis. L’idée d’élever un monument à leur mémoire est apparue dès la fin de la guerre. Le maire de Prague 8 Josef Nosek explique pourquoi il a fallu attendre 66 ans:« Tout d’abord, c’était le rapport tiède de la dictature communiste avec cet attentat, car à l’époque on ne reconnaissait que les mérites des soldats qui combattaient sur les fronts en Union soviétique. Vu que l’opération Anthropoïde, ainsi que les parachutistes qui ont tué Heydrich, était dirigée de Londres, elle était inadmissible pour le régime communiste. »
Le monument qui sera érigé à l’endroit de l’attentat ne commémorera pas que la mémoire de Jan Kubis et Josef Gabcik, mais tout les résistants qui les ont aidés, ajoute Emil Klufánek, de l’Union tchèque des combattants pour la liberté :
« Ce ne sera pas un monument dédié aux différentes personnes, mais un monument baptisé ‘Opération Anthropoïde.’ »
La mairie du 8e arrondissement de Prague a débloqué pour sa construction 5 millions de couronnes. D’autres moyens seront versés par la municipalité de la capitale.