200 ans de l'Académie des Beaux-Arts de Prague
Si L'Académie des Beaux-Arts de Prague avait 100 ans de moins, on pourrait encore l'appeler une vieille dame. Mais... elle en a 200 déjà et vient tout juste de les fêter. Son recteur actuel, Jiri T. Kotalik, a décidé de lui donner un très joli cadeau : une exposition retraçant son histoire. Elle est à voir, depuis quinze jours, dans l'une des plus belles galeries pragoises, récemment rénovée, au palais Wallenstein. Par Magdalena Segertova.
Chaque étape de l'existence de l'Académie est caractérisée par des oeuvres des peintres, graveurs, sculpteurs, restaurateurs et architectes marquants qui y enseignaient. Toute une évolution d'art plastique tchèque de ces deux centenaires s'ouvre donc devant nous : en commençant par des dessins d'après des modèles, en passant par la peinture romantique, historique, par des paysages, en finissant par l'art moderne et contemporain. On voit comment la peinture, remplaçant tout au début la photographie et donc la plus réaliste possible, comment elle s'est peu à peu libérée et a laissé un espace de plus en plus large à l'imagination, à la fantaisie de l'auteur. Côté finances, les premiers cent ans d'existence n'étaient pas pour l'Académie un paradis. Sa situation s'est nettement améliorée en 1896, année de son étatisation. A partir de là, l'Académie des Beaux-Arts ne réside plus au Clementinum, en Vieille-Ville, mais dans le nouveau grand bâtiment dans le quartier de Letna. Même aujourd'hui, on peut la trouver à cet endroit, juste à côté du parc Stromovka. A la fin du 19e et au début du 20e siècle, l'Académie connaît un véritable essor : des ateliers de sculpture, d'architecture et de graphique sont fondés, les paysagistes, rassemblés autour du célèbre peintre et premier recteur de l'Académie, Julius Marak, créent de merveilleux tableaux. « A l'époque, l'Académie proposait aux adeptes d'art plastique de se perfectionner du point de vue de la technique. Pas plus. Être artiste, c'était une loterie, le diplôme ne garantissait pas la gloire ou la vie aisée, à moins que l'on soit, par exemple, un portraitiste connu et recherché », dit le recteur de l'Académie, Jiri T. Kotalik. Et continue... Nombreux ont été ceux parmi les maîtres du pinceau tchèques, pour qui la France était une source d'inspiration, pays d'une liberté de création inouïe... L'exposition présente, par exemple, des toiles d'Antonin Chitussi, paysagiste tchèque d'origine italienne, proche des peintres de Barbizon, qui a su peindre avec la même tendresse les étangs de la Bohême du sud et la forêt de Fontainebleau. A côté, on peut trouver des oeuvres de deux peintres tchèques du début du 20e siècle, Vaclav Hynais, auteur du rideau du Théâtre National de Prague et Vaclav Brozik qui y a décoré la loge royale. Tous les deux ont connu un succès fou aux Salons parisiens, Vaclav Brozik étant même nommé officier de l'Académie française et décoré du ruban de la Légion d'honneur. Vers la fin du 19e siècle, les deux ont été demandés de revenir à Prague. Pourquoi ? Pour enseigner à l'Académie, bien sûr. Nous en arrivons petit à petit à Frantisek Kupka, peintre renommé, considéré plutôt comme un Français d'origine tchèque que comme un Tchèque fixé en France... Frantisek Kupka, ne voulant pas quitter sa maison à Puteaux, est devenu, en 1922, professeur de l'Académie pragoise, chargé de s'occuper des boursiers tchèques à Paris. Otakar Nejedly, l'un de nos plus grands paysagistes du 20e siècle, lui, voyageait avec son atelier de peinture en plein aire ambulant à l'étranger, surtout en Corse. Adoré par ses élèves, il s'occupait d'eux comme de ses enfants, leur faisant même la cuisine.
La tradition de partir en stage en France existe toujours, même si d'autres destinations sont privilégiées aujourd'hui, en particulier celle de l'Allemagne. Jakub Stretti, diplômé de l'Académie des Beaux-Arts de Prague, avait effectué, il y a huit ans, un séjour d'études à l'Ecole nationale d'art de Cergy-Pontoise. De quoi se souvient-il ?