Comment les Tchèques trient-t-ils les déchets métalliques ?

Photo: Police de la ville de Kladno

L’histoire de la courageuse institutrice en maternelle qui a risqué sa vie pour sauver deux garçons tombés dans un puits en début de cette semaine a fait le tour des médias tchèques. Bien que cela puisse surprendre à première vue, l’épisode est lié à un autre sujet d’actualité en République tchèque, à savoir l’amendement de la loi sur le tri des déchets, en particulier le système de recyclage des métaux. Car le couvercle en fer qui protégeait l’ouverture du puits a vraisemblablement été volé pour être revendu dans un centre de collecte qui rachète les déchets métalliques. Le tri des métaux en République tchèque : comment ça marche ?

Photo illustrative: Police de la ville de Kladno
Si vous décidez de rejoindre les 21 % des Tchèques soucieux de l’environnement et qui donc trient leurs déchets, vous serez peut-être surpris de ne pas trouver, à côté des containers pour le plastique, le papier, le verre ou pour les emballages en carton pour les boissons, des récipients pour les métaux. C’est qu’il n’y en a presque pas et les Tchèques qui souhaitent tirer les métaux doivent les amener dans des centres de récupération qui les rachètent. Néanmoins, ces centres de récupération ne sont pas toujours à proximité, et c’est pourquoi la plupart des boîtes de conserves et autres déchets métalliques se retrouvent avec les ordures ménagères. D’autre part, de nombreux vols surviennent et poteaux, rails, et autres biens publics sont rachetés par des centres illégaux. Comme l’a montré l’histoire du puits, (et ce n’est pas un cas isolé), cela peut avoir des conséquences néfastes.

Les choses vont peut-être changer en raison de l’implémentation de la directive européenne sur les déchets métalliques et électroniques. Le député du mouvement ANO Ladislav Okleštěk explique:

Ladislav Okleštěk,  photo: Site officiel de la Chambre des députés
« A partir de 2023 entrera en application l’interdiction de déposer dans les décharges tout matériau recyclable ou énergétiquement exploitable. C’est la date indiquée dans la directive européenne. Cela laisse presque dix années pour l’implémentation de la directive, nous pensons que cela est une période suffisante aussi bien pour les communes que pour les gestionnaires des sites de décharges. En 2024, le système de tri devrait être achevé et il n’y devrait plus y avoir de déchets, dans les décharges, qu’il est possible de valoriser. »

Cependant, l’amendement à la loi sur les déchets proposé par le député Ladislav Okleštěk va beaucoup plus loin que ce qu’impose la législation européenne, et prévoit notamment le tri des déchets obligatoires ainsi qu’une hausse de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Associations écologistes, l’union des villes et des communes ou encore que les membres de l’opposition gouvernementale, tous s’opposent vivement à cette hausse, mais aussi et surtout à la façon accélérée de modifier la loi sur les déchets sans consultation préalable avec tous les acteurs intéressés. Président du groupe ODS au Sénat et maire de la commune de Teplice dans le nord de la Bohême, région avec le plus grand nombre de centres illégaux de collecte des métaux, Jaroslav Kubera considère, qu’avec une augmentation de la redevance des ordures ménagères les citoyens vont être incités à trier moins qu’auparavant, :

Photo: Google Maps
« Que va penser un citoyen tchèque s’il doit payer plus ? Il va se dire : si ces bouffons de politiques nous obligent à payer plus, qu’ils fassent le tri eux-mêmes ! C’est ce qu’on appelle un comportement rationnel. Dans ma commune, le nombre de déchetteries sauvages a baissé considérablement depuis que les gens ne payent plus de taxe supplémentaire. Nous trions tous les déchets, même les métaux. En cela la République tchèque est loin devant les directives européennes sur le recyclage des métaux. Et Bruxelles devrait s’en réjouir ! »

Une troisième lecture de cet amendement est prévue ce vendredi. Que cela apporte des changements dans le système de recyclage des déchets ou pas, il s’agit d’un très bel exemple de la "création d'euromythes", discipline très populaire en République tchèque : un euromythe est une rumeur médiatisée au sujet des politiques européennes, fausse dans la plupart des cas. Dans le cas des euromythes tchèques, il s’agit très souvent d’une surinterprétation de la réglementation européenne de la part des députés nationaux, tout comme dans le cas de l’amendement discuté actuellement.