Découvrir et déconstruire le Canada à Prague à travers sa littérature et son histoire
Le catalogue de cours de l’Université Charles à Prague regroupe plus de 300 programmes de masters, à travers 17 facultés. Parmi ces programmes, les étudiants tchèques et étrangers peuvent suivre des cours en lien avec la littérature et l’histoire du Canada, un pays qui pourrait, en apparence seulement, n’avoir à offrir à la Tchéquie que son amour partagé du hockey sur glace.
Magdalena Fiřtová est à la tête du département des études nord-américaines à l’Institut des Études internationales de l’Université Charles. Pour elle, il est primordial d’offrir aux étudiants la possibilité d’étudier les particularités de ces pays.
« Le Canada est un pays très intéressant surtout sur le plan de trouver les points de repère de différenciations des États-Unis. »
Le cours de littérature réussit à obtenir une certaine popularité auprès des étudiants.
« Les étudiants n’ont pas nécessairement le Canada, ni le Mexique, dans leur curriculum obligatoire, c’est électif, mais beaucoup d’étudiants choisissent ce cours-là. »
Et qu’est-ce que les étudiants viennent chercher dans les cours offerts par le département? La réponse ne se restreint pas à l’étude de la littérature.
« On parle beaucoup de l’identité, du système politique, on parle beaucoup des programmes d’immigration et de diversité. On parle beaucoup des politiques des autochtones. Mais bien sûr, il est question aussi de la politique, des relations entre les communautés anglophones et les Francophones, et du nationalisme québécois bien sûr. »
Une particularité du programme du cours est qu’il permet de déconstruire des mythes qu’auraient les étudiants concernant le pays du sirop d’érable.
« Souvent on a une perspective du Canada qui est un peu naïve, on essaye de voir, en République tchèque pour nous [le Canada] c’est vraiment la beauté naturelle, le consensus, les gens qui sont très polis, très gentils, vraiment on voit le Canada ici comme un pays de paix et de tranquillité. »
Obtenir une perspective plus réaliste est primordial, puisqu’il prépare à aborder les sujets sombres de l’histoire du Canada, qui sont souvent encore méconnus.
« Cette semaine avec les étudiants on a le sujet des Autochtones, donc c’est un gros sujet qui initie et qui suscite beaucoup de passion et de tension aussi. »
Les étudiants peuvent ainsi obtenir une perspective plus approfondie du Canada, un pays qui n’est que rarement à la une des médias tchèques.
« Avec le Canada, c’est intéressant, parce qu’il y a très peu d’évènements qui suscitent l’attention des médias tchèques par rapport au Canada. C’est vraiment intéressant parce que chaque fois qu’il y a un évènement brutal, ou choquant, les journalistes appellent pour savoir ce qui se passe au Canada, ce n’est pas normal, ‘qu’est-ce qui se passe? Qu’est-ce qui se passe?’ »
La découverte massive des tombes des enfants autochtones sur les anciens sites des pensionnats au Canada entre les années 2021 et 2022, qui continue à ce jour, fut l’un de ces évènements ‘brutaux’ qui suscita l’attrait des médias à travers le monde, et notamment en Tchéquie.
« Et les étudiants tchèques, c’est assez intéressant, sont très captivés par ce type de message des médias, donc ils sont très intéressés de comparer leur vision du Canada et surtout la vision des relations avec les peuples autochtones, qui est très idéalisée. »
Les cours permettent donc aux étudiants de mettre à jour une vision embellie et fausse de la réalité des peuples autochtones au Canada, qui fut jusqu’à encore récemment enseignée en Europe.
« Et depuis des générations et des générations, les Tchèques, et même les Allemands ou les Slovaques, ont été bercés de cette image très naïve de vie des peuples autochtones en Amérique du Nord. »
Au final, ce qui importe à la professeure Magdalena Fiřtová, c’est que ses étudiants puissent quitter sa salle de classe avec une notion qui est propre au Canada : le dialogue.
« Disons que j’aime beaucoup parler du Canada, et surtout de ce dialogue qui est ouvert et qui le reste. Je crois c’est la raison pour laquelle il faut enseigner le Canada ici. Pour montrer aux étudiants la façon dont le Canada approche les sujets d’immigration, les peuples autochtones, des minorités, même québécoises. »
Des cours similaires se donnent à plusieurs niveaux à l’Université Charles, soit master ou Licence, et se décline en anglais et en tchèque. Le programme de master est plutôt restreint, offrant des places à une vingtaine d’étudiants.