Le président de la République tchèque nomme les juges, mais a-t-il le droit de les révoquer ? A cette question, la Cour constitutionnelle a répondu non, dans l'affaire de la présidente de la Cour suprême que le chef de l'Etat avait révoqué en janvier dernier. Quelques lumières sur une sorte de précédent en matière de justice.
Iva Brozova, photo: CTK
Iva Brozova avait été nommé présidente de la Cour suprême par le président de la République, Vaclav Klaus. En janvier dernier, sur la proposition du ministre de la Justice de l'époque, Pavel Nemec, le chef de l'Etat avait signé l'acte de sa révocation. Tous deux argumentaient en affirmant que Brozova présentait des lacunes dans l'accomplissement de ses devoirs. Mais la présidente de la Cour suprême ne l'entendait pas de la sorte. Iva Brozova avait refusé de se plier à la décision présidentielle et avait conservé sa fonction. Plus, elle avait oeuvré pour que la Cour constitutionnelle abolisse, en juillet dernier, une partie de la loi sur les tribunaux et les juges qui permettait à celui qui nommait les juges de les révoquer aussi, en l'occurrence le président de la République. Le 12 septembre, la Cour constitutionnelle a rendu son verdict dans l'affaire de la plainte de la présidente de la Cour suprême selon laquelle sa révocation était basée sur une loi anticonstitutionnelle et, en plus, sans un véritable fondement. Dagmar Lastovecka, juge rapporteur de la Cour constitutionnelle, lors d'une émission en direct diffusée par la chaîne d'information de la Télévision tchèque, CT 24, à indiqué entre autres :
Le président Vaclav Klaus, photo: CTK
« La Cour constitutionnelle a constaté que, dans la situation où le pouvoir de révoquer le président de la Cour suprême n'est pas textuellement mentionné dans la Constitution, l'adoption de l'interprétation selon laquelle, le pouvoir du président de la République de le nommer impliquerait aussi la possibilité de le révoquer, serait contraire à la valeur constitutionnelle représentée par l'indépendance du pouvoir juridique, et son indépendance à l'égard du pouvoir exécutif. »
Iva Brozova conserve donc sa fonction de présidente de la Cour suprême, mais le chef de l'Etat, considère la décision de la Cour constitutionnelle comme dangereuse et éronnée. Vaclav Klaus :
« Dans cette décision d'un des sénats de la Cour constitutionnelle, je décelle une orientation dangereuse dans la situation existant après novembre 1989 qui conduirait de la démocratie parlementaire au corporatisme des juges, visant l'autonomie illimitée des juges qui, sous cette forme, n'existe nulle part dans le monde. »
De son côté, Iva Brozova, ne s'est pas prononcée sur le verdict des juges constitutionnels. Elle se remet des suites d'un accident de la route et c'est son mari, l'avocat Jaroslav Broz, qui a déclaré : « Il n'y a ni vainqueur ni vaincu dans cette affaire, car il s'agissait seulement de la protection de l'indépendance de la justice. »