Fashion Weekend : le luxe s’affiche à Prague
Que représente la mode tchèque aujourd’hui ? Quels sont ses principaux noms et marques ? Ou encore quelles seront les tendances de l’automne-hiver 2015-2016 ? Telles étaient les principales questions auxquelles a répondu le Prague Fashion Weekend 2015, le plus grand événement de la mode en République tchèque, qui s’est tenu récemment dans la capitale tchèque.
Pour passer le cap, il faut savoir s’affirmer comme l’a fait Vladimír Staněk. Créateur depuis près de huit ans, Vladimír Staněk est un des co-designers de Pietro Filipi et possède aussi en parallèle sa propre marque, Stinak. Il explique ce qui fait le succès de Pietro Filipi et la philosophie de la marque :
« Le propriétaire de Pietro s’appelle Petr et son fils s’appelle Filip, c’est donc de là que vient le nom italien de la marque. La marque a une certaine élégance et une inspiration italienne, c’est pourquoi nous avons un nom italien. Nous ne serons jamais britanniques, nous tiendrons plutôt toujours cette ligne italienne. »
Vladimír Staněk précise comment distinguer Pietro Filipi des autres marques et quelle est sa particularité :
« Nous avons des personnes diplômées dans l’équipe qui sont la crème en Tchéquie, des gens comme Ivana Mentlová, Margarida Machao ou Lay Sedláková. Bien entendu, nous utilisons des matériaux de qualité, ce qui est indispensable pour réussir. Nous avons également une particularité : Pietro Filipi a toujours plusieurs sous-collections féminines et masculines, c’est pourquoi nous avons autant de designers dans l’équipe. Les collections de Pietro Filipi ne sous-entendent donc pas un seul designer, il y plusieurs lignes qui sont proposées par des designers différents. »
Nous avons demandé au designer s’il s’agissait de sa première présentation au Prague Fashion Weekend :
« Non, non. Cette année c’est notre deuxième présentation sous son nouveau concept. Mais l’année dernière, c’était dans une tente et pas dans ces beaux locaux. »
Outre Vladimír Staněk, cette édition du printemps a présenté d’autres designers talentueux et bien connus sur le marché tchèque comme Denisa Nová, Jakub Polanka, Martina Špetlová, déjà un grand nom à Londres, ou encore Petra Ptačková. L’introduction du Fashion Weekend était dédiée à des jeunes marques comme La Formela, Odivi, Chatty ou Pavel Brejcha.Cette année, la fête du glamour avait pour cadre les plus beaux locaux de sa courte histoire. Vladimír Staněk nous a parlé de l’évolution du concept du Fashion Weekend:
« Il y a deux ans, c’était encore dans une grande tente, l’année dernière c’était à la fac de droit, alors que cette année le Prague Fashion Weekend a déménagé dans les beaux locaux de ZIBA, l’ancienne banque Živnostenská. Le concept change d’une année à l’autre. On fait plus attention au public consommateur et spécialisé, c’est déjà moins un événement du genre ‘venez voir des fashion days’. Désormais, c’est plus focalisé sur la mode, et ça commence à marcher comme une espèce de fashion business et plus seulement comme un spectacle. »
Ancienne étudiante de l’école de la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne, Petra Ptáčková a présenté sa nouvelle collection intitulée « Oh, I see … TWICE! » et inspirée d’un accident de la circulation arrivé à Petra lors de ses préparations aux show-rooms pour la fashion week parisienne, un accident dans lequel elle a bien failli laisser un œil. Petra roulait en vélo dans la rue de Belleville à Paris lorsqu’elle a été renversée par une voiture. Le choc et son angoisse après l’opération, la créatrice l’a exprimés dans sa collection à travers une couleur plus grise que noire. Ce style n’illustre pas la personnalité, mais la cache plutôt. C’est là, dans ce monde de solitude brisée, qu’une âme en peine se sent le plus à l’aise. C’est un chemin solitaire qui doit mener à la découverte d’un nouveau soi. Voici comment Petra commente cette inspiration :
« Quand je me suis réveillée, j’ai réalisé que je voyais tout le monde en double et je ne savais pas quoi faire. Cette collection raconte beaucoup de mes émotions. J’ai pris beaucoup de temps, j’ai réfléchi et je me suis dit ‘bon, peut-être que je peux mettre en œuvre ce qui m’est arrivé’. »
Le traumatisme de Petra était grave dans une période importante. Malgré tout, la jeune créatrice n’a pas baissé les bras et a quitté l’hôpital :
« Je leur ai dit que je ne pouvais pas rester là, parce que j’avais mon show-room. Ils m’ont donc donné beaucoup d’antidouleurs, et voilà! »
Designer déjà expérimentée malgré son jeune âge, Petra Ptáčková, en dehors de Prague, a déjà présenté ses collections à Berlin, Amsterdam, Kiev, Madrid et San José. Elle a eu ses propres show-rooms lors des Fashion Weeks 2014 à Londres et Berlin, et cette année à Paris. Elle nous fait partager ses plans pour l’avenir :
« La prochaine ville, ce sera Kiev parce qu’ils m’ont réinvitée. Je me suis dit ‘ok, j’y vais encore une fois, puis je partirai à New York pour un projet d’un concours pour la télévision’. On verra... Je ne peux pas vraiment en dire plus pour l’instant. »Un Fashion Weekend n’est pas complet sans un bon make-up. Ce maquillage sert à accompagner la tenue, mais aussi à incarner les collections. Partir du vêtement et penser à une personnalité, voilà ce que s’attache à faire Michele Magnani, make-up Global Senior Artist du M.A.C. Cosmetics et chef d’une équipe de onze maquilleurs professionnels étrangers. Pétillant Italien sollicité par les rédactions des plus grands magazines de mode, de Vogue à Harper's Bazaar, Michele Magnani est le chef-maquilleur des plus grandes Fashion Weeks. Ses services sont très demandés par les prestigieuses maisons de mode en Italie et certaines célébrités comme Kylie Minogue, Kelly Osbourne ou Eva Cavalli. Son secret ? La passion pour son métier. Le visage de Michele Magnani s'éclaire lorsqu'il évoque son domaine de prédilection :
« Je travaille pour M.A.C. Cosmetics depuis 2001 et je suis très heureux d’être ici, parce que c’est une nouvelle expérience pour moi. Je suis depuis quinze ans dans l’industrie de la mode, et normalement je travaille à Milan et à Paris pour les Fashion Weeks. C’est ma première fois à Prague. Je suis très content, parce que c’est très intéressant de découvrir de nouveaux talents et de nouveaux designers, différentes approches du maquillage et de la mode. »
Michele Magnani explique en quoi les demandes de make-up des designers tchèques diffèrent de celles des designers français ou italiens :
« Ils me demandent d’utiliser les couleurs. A Paris ou à Milan, on n’utilise pas autant de couleurs. C’est pour cette raison que je suis content d’exprimer ma créativité avec les designers tchèques. »
Dans les collections des designers tchèques, on peut observer certaines nuances italiennes comme les jeux de couleur par exemple. Nous avons donc demandé à Michele Magnani s’il trouve, lui aussi, que la mode tchèque suit plus une voie italienne que britannique:
« Je trouve que c’est le même style… en mieux même ! J’ai vu des vêtements incroyables, si féminins, si élégants, pas trop exagérés. On voit une parfaite combinaison, tous les looks étaient magnifiques. J’ai beaucoup aimé le pantone, la couleur des collections représentative du style italien. Je n’ai pas vraiment senti de grandes différences entre la Fashion Week italienne et le Fashion Weekend tchèque. J’ai vu quand même quelques nuances monotones dans certaines collections, mais il y avait parallèlement des petits détails avec beaucoup de couleurs. Par exemple, j’ai vu une collection globalement beige, mais avec des petits détails bleus, verts ou oranges. C’est intéressant, je crois qu’on devrait suivre les designers tchèques avec plus d’attention. »
La mode est un art pragmatique de séduction. Maîtres mots de l’hiver 2015-2016 : noir et blanc graphique, esprit punk, rumeurs tribales, continuité Seventies et come-back Eighties, influences galactiques ou codes officiers... Des tendances inspirées aussi variées que maîtrisées qui reflètent les multiples facettes de la personnalité d'aujourd'hui et célèbrent le style personnel avant tout.