Festival du film indien à Prague
Cette année le mois d'octobre à Prague n'est pas seulement celui d'un magnifique été indien, mais aussi, d'une semaine à l'heure indienne, ou plutôt bollywoodienne, pour deux des meilleurs cinémas de la capitale. Du 10 au 16 octobre, c'est, pour la troisième année consécutive, le festival du film bollywoodien.
Avec plus de 500 films tournés par an, l'Inde est une immense machine à produire du rêve et de l'aventure sur grand écran, et les studios de Bollywood en sont le coeur palpitant. Radim Spacek est réalisateur, il a déjà parcouru un bon nombre de fois les routes de l'Inde qui l'ont notamment mené à Bombay, la capitale du cinéma indien. Il est l'un des trois organisateurs de ce festival qui cette année, porte le titre : Anciennes traditions, nouvelles directions. Pourquoi ? C'est ce qu'il a expliqué au micro de Radio Prague :
« Bollywood se trouve actuellement à un moment de rupture : les réalisateurs se retrouvent dans une situation un peu difficile et ils doivent justement décider de la direction que va prendre Bollywood. Ce n'est pas que les gens aient cessé d'aller au cinéma, mais comme il y a une véritable invasion de DVD et que le marché des médias se libéralise, de nombreuses chaînes de télévision sont apparues où ces films sont passés. Les réalisateurs bollywoodiens, en dehors du fait qu'ils essayent de se faire connaître hors de l'Inde, en Amérique par exemple, doivent trouver de nouveaux moyens, plus raffinés, pour attirer le public indien. »
Le film « made in Bollywood » typique répond à des critères de scénario fixes, que les réalisateurs déclinent en de nombreuses variations : une histoire d'amour contrariée par un entourage qui désapprouve la relation, une situation par ailleurs relativement commune en Inde, comme le souligne Radim Spacek. Les films sont ponctués de pauses musicales, qui peuvent transporter le temps d'un chant ou d'une danse, les acteurs dans les montagnes « exotiques » d'Autriche, avant de les rapatrier en Inde ! Parmi la sélection du festival, les cinéphiles pourront, cette année, assister aussi à des projections de films moins dans cette tradition du mélo, plus au coeur de problèmes de société tels que la corruption, les tabous sexuels, les personnes handicapées.
Pour Radim Spacek, différents éléments jouent en faveur du festival. Il s'en est rendu compte notamment sur le forum du site www.bollywood.cz où des fans tchèques et slovaques s'échangent les bons tuyaux pour trouver les films, se les échanger, trouver des sites internet sur tel acteur ou telle actrice. Mais si tout le monde peut avoir une vague notion de ce qu'est le cinéma « made in Bombay », c'est une autre affaire que d'attirer un public a priori peu averti. Qu'est-ce qui fait venir le public tchèque et quelles sont les réactions ? Réponse avec R. Spacek :
« Je pense que c'est déjà le simple fait d'aller au cinéma où il y a un public très mélangé, exactement comme dans le mot « masala » qui signifie un mélange d'épices : tout comme les films bollywoodiens sont appelés « masala movies », nous avons ici un « public masala ». A côté de cette expérience du mélange, je pense qu'il y a sans aucun doute de la curiosité. J'ai été surpris, lors de la toute première journée. Nous avons présenté le film Veer-Zaara, un film dont la thématique porte sur le réchauffement des relations entre l'Inde et le Pakistan. Au début le public tchèque avait tendance à pas mal rire, et même à des endroits où cela ne convenait pas forcément, mais à la fin du film, où il y a un discours enflammé, une vraie propagande pacifiste pour le règlement du conflit, le public était complètement silencieux et tout le monde s'est mis à applaudir à la fin. »