Frédéric Fortes, un militant occitan malgré lui
Il a apporté aux Pragois, qui s'habituent aux premières gelées automnales, un souvenir d'été, du soleil et des odeurs méditerranéennes... Merci à Frédéric Fortes, le plus connu des chanteurs occitans contemporains, ainsi qu'au violoniste François Michaelef et au percussionniste Sergio Perera, qui l'accompagnent, pour leur premier concert dans le pays, le jeudi 20 octobre, au théâtre Divadlo Na Pradle, à Mala Strana. Une rencontre avec le public en toute simplicité, mais forte en émotions... comme la musique de Frédéric Fortes, auteur, compositeur chanteur et pianiste.
Frédéric Fortes, pourquoi chantez-vous en occitan ?
« Simplement, parce que c'est ma langue. La France, contrairement à son image à l'étranger, n'est pas faite que de la France telle que le gouvernement central et centralisateur veut le faire croire... Je ne suis pas militant, mon métier c'est artiste... Donc je chante en occitan, parce que c'est ma langue et parce que c'est une langue terriblement musicale. Je dis toujours que j'écris mes poèmes et mes chansons en occitan, si j'écrivais un livre, ce qui est d'ailleurs en cours, ce serait en français et si, un jour, je tourne un film, ce sera en anglais. L'occitan et la poésie sont indissociables. »
C'est une langue plus musicale que le français ?
« Naturellement ! Les sonorités sont sensationnelles. J'ai aussi un large choix de mots, vu que l'Occitanie représente à peu près tout le sud de la France. »
C'est une langue qui évolue encore ?
« Oui, elle évolue, parce que ce que j'écris et la manière dont je parle, ça n'a rien à voir avec l'occitan des troubadours au XIIe siècle. En plus, ce qui est très important, c'est qu'aujourd'hui, on peut faire toutes ses études en occitan, de la maternelle jusqu'à l'université. Cela était, bien sûr, un travail de longue haleine... Moi, je ne fais que de la création, je ne fais rien de folklorique ni de traditionnel et je me suis fait même critiquer pour cela en Occitanie. Le folklore, c'est un autre public. Et nous, on s'aperçoit que notre public rajeunit de plus en plus ! Le fait même de chanter en occitan, de contribuer à ce que cette langue avance, c'est du militantisme... »
En fait, il y a combien de chanteurs occitans en France ?
« Il y en a pas mal... Il y a eu une époque, après mai 68', où la chanson militante a été très en vogue. C'est la génération au-dessus de moi. Mais une fois que cet état d'esprit militant est tombé, eux, ils sont tombés avec, parce qu'ils n'ont pas fait le travail artistique. »
De quoi chantez-vous ?
« Comme tout le monde... Comme j'ai beaucoup voyagé, je parle souvent d'exil, d'éloignement... D'amour aussi, c'est très original ! (rires) Le mot 'amour' qui est d'origine occitane... Et puis, parfois des petits coups de gueule sociétaux... »
Vous avez vécu en Afrique du Nord et au Canada, où votre musique a trouvé un écho très favorable... La France, vous a-t-elle manqué ?
« Oui. Mais par contre, pour écrire, c'est très bien d'être éloigné parce qu'on va rechercher ses odeurs, ses sentiments, ses sensations très loin au fond de soi. Au Canada, je me suis aperçu que la neige est très exotique pour moi ! A travers la neige, il fallait que je ressente l'odeur des tomates, du thym, de l'huile d'olive, de mon pays ! Il s'avère que c'est une attitude très positive pour la création. »
Prague ne vous semble pas exotique ?
« Ne me posez pas cette question...Cela fait même pas une semaine que j'ai découvert la ville et je suis en train de réfléchir comment je pourrais venir m'installer ici pendant un an, juste pour composer le prochain album... »
Pour ses prochains concerts, Frédéric Fortes s'est déplacé en Moravie. Il se produira le 31octobre à Olomouc, le 2 novembre à Ostrava et, enfin, le 3 novembre à Opava, en Moravie.