Gustav Mahler, prophète de la nouvelle musique
« Je suis trois fois apatride, a dit Gustav Mahler. En tant que Tchèque parmi les Autrichiens, en tant qu’Autrichien parmi les Allemands, en tant que Juif dans le monde entier. Partout je suis un intrus, nulle part je ne suis chez moi. » Ce mercredi 18 mai, cent ans ce sont écoulés depuis la mort de cet homme compliqué, énergique et difficile qui était un compositeur génial. Son oeuvre qui ne s’est imposée qu’avec de grandes difficultés, clôture la musique romantique et ouvre des horizons immenses à la musique moderne.
« Il savait, comme on dit, se faire des ennemis. Il n’est pas possible de le décrire simplement. J’utiliserais même la métaphore suivante : de même que nous avons assisté dans les dernières décennies à la naissance de la philosophie post-moderne et de la poésie post-moderne qui entremêle les genres, les niveaux et les aspects de la connaissance, tout cela existe déjà dans sa musique. Et évidemment, dans le passé déjà, cela ne plaisait pas. »
Gustav Mahler est né le 7 juillet 1860 dans la commune de Kaliště non loin de la ville de Jihlava sur le Plateau tchéco-morave. Etait-il Tchèque, était-il Autrichien, était-il Juif ? Il a été tout cela, toutes ses influences se sont reflétées dans sa création mais la portée de son oeuvre est universelle. Le centenaire de sa mort est donc évoqué dans de nombreux pays. Des concerts de ses oeuvres sont donnés à Vienne, à Berlin, un festival intitulé « La musique des mille – Mahler Jihlava 2011 » se poursuit depuis ce dimanche dans la région de Jihlava, pays de sa naissance et de son enfance. Le nom de Gustav Mahler domine également le programme du festival Printemps de Prague. Le directeur du festival Roman Bělor évoque les principales manifestations mahlériennes de la 66e édition de cette fête de la musique :« Nous avons préparé pour ce festival l’exécution de sa Huitième symphonie ‘Symphonie des mille’ qui est l’une des oeuvres majeures du répertoire symphonique mondial. Český rozhlas (Radio Publique tchèque) a proposé ce concert dans le cadre de l’Union européenne de radio-télévision (UER) à l’Association européenne des radios et le concert sera retransmis dans neuf pays. C’est donc un grand événement aussi au niveau européen. »
Le concert donné ce mercredi est une coproduction du festival avec la Norddeutsche Rundfunk (Radio de l’Allemagne du Nord) et l’Orchestre symphonique de cette radio. Y participent également l’Orchestre philharmonique tchèque, six choeurs, huit solistes et un chef d’orchestre. La direction musicale de cette production gigantesque qui réunit presque 500 exécutants a été confiée au chef d’orchestre Christoph Eschenbach. Roman Bělor constate qu’avec ce concert le festival s’ouvre à de nouvelles possibilités :
« Comme une telle production nécessite des moyens immenses, nous avons décidé de donner ce concert dans le palais des sports ‘O2 Arena’. C’est donc une grande nouveauté dans l’histoire du Printemps de Prague. Nous entrons maintenant sur les stades. Cela ne veut pas dire qu’il s’agit-là d’une tendance générale. Mais cette oeuvre unique exige une telle solution. » Après le concert tous les exécutants partiront en Allemagne où l’oeuvre sera présentée encore deux fois. L’œuvre de Gustav Mahler sera d’ailleurs à l’honneur tout au long du festival. Au programme il y a aussi deux autres de ses symphonies, la Deuxième, qui sera interprétée par l’Orchestre symphonique de San Francisco, et la Sixième qui sera exécutée par l’Orchestre philharmonique de Berlin sous la direction de Sir Simon Rattle et mettra un point final au festival. Le public pragois entendra aussi l’avant-dernière oeuvre achevée du compositeur « Le Chant de la terre », symphonie avec voix qui peut être considérée comme son testament artistique et humain.