« La beauté de la phaléristique européenne – Ordres et décorations »
« La beauté de la phaléristique européenne » est le titre d’une exposition inaugurée ce mardi au palais Hrzán à Prague. L’exposition est l’une des manifestations culturelles organisées par la présidence tchèque du Conseil de l’UE qui a fait venir cette fois à Prague les ordres et distinctions de tous les Vingt-sept. C’est la première fois qu’il est possible de voir ensemble ces bijoux issus des différents pays. Plusieurs décorations étrangères prouvent un lien étroit avec l’histoire tchèque, certaines d’entre elles ont été décernées aux rois de Bohême et aux chefs d’Etat tchèque, et toutes offrent une leçon d’histoire européenne commune...
« Toute une série de distinctions que nous montrons ici, on ne les trouverait dans aucun musée d’Europe. »
Parmi les plus grandes raretés de cette exposition figure l’Ordre de l’Eléphant qui est un ordre danois institué en souvenir de la bravoure d’un croisé danois qui avait tué un éléphant dans une bataille contre les Sarrasins, en 1189. Cet insigne en émail blanc suspendu à un ruban bleu moiré est une décoration discrète qui fait plus penser à un jouet d’enfant. Sa valeur est toutefois immense et il a fallu le consentement personnel de la reine Marguerite II du Danemark pour que la décoration soit prêtée à Prague, car pour les Danois, elle représente la même valeur que les joyaux de la couronne pour les Tchèques. Cet ordre est décerné exclusivement aux princes de sang royal et aux chefs d’Etats étrangers. L’histoire tchèque connaît de très rares détenteurs de cet ordre : à part l’astronome à la cour impériale de Prague, Tycho Brahé d’origine danoise, on compte le maréchal impérial Karel Schwarzenberg, ancêtre de l’actuel ministre tchèque des Affaires étrangères, qui a vaincu Napoléon au cours de la bataille de Leipzig, puis encore le premier président tchécoslovaque, Tomáš Garrigue Masaryk. L’Ordre de l’Eléphant est l’un de ceux qui ne figurent dans aucune collection du monde, car il n’est prêté à son lauréat que durant sa vie. L’exposition La beauté de la phaléristique européenne n’est pas que de cet ordre. Dans les vitrines brille la plus haute distinction honorifique française, l’Ordre de la Légion d’honneur, instituée en 1802 par Napoléon Bonaparte, la double Croix blanche qui est la plus haute distinction slovaque, on peut aussi y admirer l’Ordre britannique du Bain crée en 1725 par George 1er, l’Ordre suédois de l’Etoile polaire ou l’Ordre de la reine Isabelle de Castille. Les panneaux évoquent d’autres distinctions glorieuses comme l’Ordre de la Toison d’or qui est une décoration européenne liée à la dynastie de Bourgogne, des Habsbourgs et des Bourbons. L’Ordre de la Jarretière est probablement le plus populaire, un ordre de la chevalerie anglaise fondé en 1348 par Edouard III d’Angleterre et qui se réfère, selon la légende, à la comtesse de Salisbury qui aurait perdu une jarretière au cours d’un bal, rendant cet accessoire dûment célèbre.Certaines décorations européennes exposées actuellement à Prague mettent en évidence un lien inespéré avec l’histoire tchèque : ainsi, la plus haute décoration de Lituanie, l’Ordre de Vytautas le Grand, grand-duc de Lituanie du XVe siècle, porte une trace tchèque, en raison de la parenté de celui-ci avec le roi de Bohême Ladislas Jagellon. Les apôtres slaves Cyrille et Méthode venus vers 863 en Grande-Moravie pour y propager le christianisme sont représentés sur une haute distinction de Bulgarie - la Croix du mérite de l’Ordre de saints Cyrille et Méthode. L’Ordre britannique du Bain déjà mentionné porte la devise du roi de Bohême Jean de Luxembourg : ‘Ich Dien’ – ce qui veut dire ‘je sers’. Toute la vie de Jean de Luxembourg était guidée par cette devise, jusqu’à sa mort, pour les couleurs de la France, pendant la bataille de Crécy, souligne l’auteur de l’exposition Jiří Fidler :
« Au moment de sa mort, le 26 août 1345, dans l’une des batailles de la Guerre de Cent Ans près de Crécy, cette devise a été empruntée par le roi d’Angleterre Edouard III qui allait la remettre à son fils et c’est ainsi que la fameuse devise du roi de Bohême se retrouve non seulement sur les armoiries des princes de Galles mais aussi sur l’étoile de l’Ordre britannique du Bain. »
Comme le complète le directeur du Musée national de Prague, Michal Lukeš, l’Ordre du Bain a été prêté pour cette exposition des collections de ce musée et un homme politique tchèque connu a l’honneur de le porter :
« Le Musée national a prêté plusieurs ordres, mais le plus précieux est sans doute l’Ordre britannique du Bain, car c’est l’unique exemplaire tchèque et il provient de la décoration qu’a reçue l’ancien président Václav Havel. »
L’exposition propose également le meilleur des décorations et ordres de la République tchèque : l’un des quatre exemplaires conservés jusqu’à ce jour de la Noble Croix de Bohême que l’empereur autrichien François 1er a décernée à 40 aristocrates tchèques qui l’avaient accompagné lors d’une expédition militaire contre Napoléon à Austerlitz. La plus haute distinction tchèque - l’Ordre du Lion blanc a été prêté pour l’exposition par l’Institut d’histoire militaire de Prague. On écoute son directeur Aleš Knížek :« L’Institut d’histoire militaire possède l’une des plus importantes collections d’ordres et de décorations en RT et ce n’est donc pas un hasard qu’il ait prêté les plus hautes distinctions de l’Etat – l’Ordre du Lion blanc de 1922 et sa version plus récente de 1961 pour cette exposition unique et vraiment très spéciale. »
L’exposition présente également le deuxième dans la hiérarchie des ordres tchèques – l’Ordre Tomáš Garrigue Masaryk. Les visiteurs pourront admirer ces ordres sur des figurines, une façon d’illustrer la manière de porter. L’exposition des décorations et ordres européens est à voir au palais Hrzán à Prague jusqu’au 1er mars prochain.