La belle cruelle du château de Lichnice

L'antique château de Lichnice a été construit au 13ème siècle sur le flanc des Montagne de Fer ( Zelezne hory).

Les seigneurs de Lichnice étaient par génération des chevaliers à l'esprit vif et rebelle. Jarmila, la fille unique d'un des nombreux seigneurs qui résidèrent dans l'imposante bâtisse au fil des siècles avait hérité les traits de caractères de son père. La femme du seigneur de Lichnice décédé à l'accouchement, le père éduqua sa fille comme un garçon. A dix-huit ans, la jeune fille maîtrisait fort bien les arts de combat pratiqué à l'époque et était une excellante cavalière. Le plus grand atout de Jarmila était tout de même sa beauté éblouissante. Elle avait des yeux d'un bleu profond, un teint éclatant, accentué par une bouche sensuelle. Des cheveux d'un blond cendré ondulaient le long de sa silhouette musclée. Les chevaliers de familles riches et nobles se présentaient au château pour demander la main de la jeune fille. La belle Jarmila était agréable avec tous les jeunes seigneurs, mais n'en choisissait aucun. Finalement, le père de Jarmila perdit patience : " Mais enfin pourquoi ne choisis-tu pas un des beaux jeunes hommes qui arrivent sans cesse au château ! Il te faut tout de même un mari ! ". " Je n'en vois absolument pas la raison et l'utilité ", s'écria Jarmila. " Je monte à cheval mieux que n'importe quel homme et je les vaux bien au combat...Mais si vraiment je dois en choisir un, je veux qu'il grimpe par l'étroit chemin jusqu'au rocher au galop, dresse le cheval sur le pic et en fasse trois fois le tour ! " Le père de Jarmila consentit, avertissant tout de même sa fille qu'elle jouait avec le feu.

Depuis, chaque chevalier qui se présentait comme mari potentiel de la belle fille, se voyait obligé d'accomplir le périlleux exercice. Evidemment, chacun des chevaliers s'écrasait au bas du rocher. Jarmila ne se souciait guère de tous ces morts et observait les efforts des pauvres gentilshommes en souriant. Bientôt, la rumeur sur la cruauté de la belle de Lichnice couru dans le pays et les jeunes seigneurs cessèrent de venir au château. Ils préféraient rester en vie que d'obtenir les faveurs d'une femme certes belle, mais si cruelle, d'une si étrange façon. Jarmila commença a se sentir un peu seule et abandonnée. Elle regrettait un peu sa décision...Quelques mois s'écoulèrent !

Un soir un chevalier en armure d'argent massif frappa au portail du château. On le fit entrer et presque aussitôt Jarmila le reçut, impatiente de voir le nouveau adepte à la mort. Lorsque le chevalier enleva son casque, Jarmila fut immédiatement attirée par la beauté et le regard intense du jeune homme. Il dînèrent ensemble et passèrent une agréable soirée. La belle de Lichnice sentait bien qu'elle tombe amoureuse du chevalier. Elle commençait à avoir peur de le voir s'écraser au bas du rocher comme les autres, mais fière comme elle était, elle ne voulait pas revenir sur sa décision. Le lendemain, le chevalier monta sur son étalon noir et se dirigea au galop par l'étroit sentier. Arrivé sur le pic il dressa son cheval et en fit trois fois le tour, puis revient auprès de Jarmila, morte de peur. Toute contente, la belle fille lui tendit la main. Le chevalier ne réagit pas ! Il enleva le casque et fixa sur la jeune fille un regard froid et distant : " Je suis le frère d'un des jeunes hommes qui se sont tués par ta faute, juste pour un caprice. Non seulement je ne t'épouserai pas, mais je vengerai la mort de mon frère, vile créature ! " Sur ce, il dégaina son épée et transperça la poitrine de Jarmila. La jeune fille était morte sur le coup. Lorsque les gardes reprirent leur esprit et voulurent poursuivre le chevalier, celui-ci était déjà loin. On ne savait pas de quelle famille il était issu. On savait seulement qu'il venait de France et que son nom commençait par un T.

Le château de Lichnice n'est plus qu'une ruine, mais la belle Jarmila, renommée pour sa cruauté, hante les lieux et pleure sa jeune vie perdue.