La privatisation d'une partie de la compagnie nationale d'électricité crée des étincelles

Pour la Roumanie et la Bulgarie, l'actualité est à l'intégration de l'UE, prévue pour le 1er janvier 2007. Pour la République tchèque, elle se focalise sur l'adoption de l'euro, repoussée dernièrement à 2012. En cause : le déficit budgétaire de l'Etat, dont les estimations pour 2007 n'atteignent pas les critères de Maastricht. Pour redresser les finances publiques, le gouvernement de Mirek Topolanek comptait sur le marché boursier et la compagnie nationale d'électricité, CEZ. Un bon calcul ?

Pour le gouvernement actuel, la privatisation d'une partie de CEZ a permis d'éviter un déficit budgétaire record en 2007. En vendant une partie des actions de CEZ, les autorités ont pu abaisser le montant du déficit. Celui-ci était estimé à l'origine à 119 milliards de couronnes.

Parallèlement, le gouvernement a déclaré qu'il augmenterait les salaires des employés de l'Etat de 5 % et qu'il allouerait plus de subventions aux écoles, aux universités de recherche et de développement et aux agriculteurs.

Les 91,3 milliards de couronnes de déficit estimés (un peu plus de 3 milliards d'euros) empêcheront quand même la République tchèque d'adopter l'euro en 2010. Ils signifient toutefois une réduction à hauteur de 3,5 % du PIB, l'adoption de l'euro étant subordonnée à un déficit maximum de 3,3 %. Pour atteindre un tel résultat en 2007, il faudra geler toute construction de routes et de nouvelles aides sociales. En outre, pour certaines banques, le déficit prévu est sous-estimé.

De nombreux économistes tablent désormais sur 2012, au bas mot, pour l'entrée de la République tchèque dans la zone euro. Notons que la République tchèque, la Pologne et la Hongrie devraient êtres les premiers des nouveaux membres de l'UE à intégrer, courant 2007, le mécanisme ERM II, étape indispensable pour le passage à la monnaie unique.

Sur le plan écologique en tout cas, la compagnie nationale d'électricté CEZ rentre parfaitement en concordance avec les directives européennes. L'UE compte hisser l'"électricité verte" à 20 % de la production totale. Cela tombe bien, CEZ compte investir, pour les 15 années à venir, 30 milliards de couronnes dans le développement des éoliennes, source d'énergie renouvelable.

Le gouvernement assure d'ailleurs que les 31 milliards de couronnes dégagés par la privatisation d'une partie de CEZ serviront justement à alimenter les investissements écologiques.

Côté budget 2007, la question reste entière : passera-t-il au Parlement, lors de son examen dans une quinzaine de jours ? Pour les observateurs politiques, il y a peu de chances que ce soit le cas, le gouvernement de l'ODS n'ayant pas abtenu la confiance des députés. On le voit, la crise politique liée aux élections législatives de juin n'arrange rien.

Jiri Paroubek, le leader du Parti social-démocrate, a fait savoir son désaccord pour la vente des actions de CEZ. Celle-ci conduirait, selon lui, à une augmentation des prix de l'électricité de la part des autres actionnaires. A la place, l'ex-premier ministre propose de privatiser 49 % de l'aéroport de Prague, ce qui, d'après lui, permettrait de réduire le déficit budgétaire à 88 milliards de couronnes. Pour le ministre des Finances, Vlastimil Tlusty, c'est impossible, en tout cas pas avant la seconde moitié de l'année prochaine. En effet, l'aéroport de Prague a d'abord besoin de générer des actions commercialisables sur le marché boursier. La solution que préconise Vlastimil Tlusty lui-même ne semble pas meilleure. Il propose d'émettre plus d'actions de la part de CEZ. Renouveler l'opération en somme. Et sans doute pousser la Commission européenne à sortir le carton rouge en déclarant l'action hors de la procédure.

La privatisation de CEZ soulève d'ailleurs la controverse sur un autre point : celui des petits actionnaires. D'après les analystes financiers, une fois les actions émises, c'est l'Etat, lui-même actionnaire majoritaire, qui devrait racheter les principales actions à la vente. Une situation étrange qui repousse à la case départ. Et qui semble surtout injuste aux actionaires minoritaires, qui se verraient ainsi dépossédés de leurs dividendes.

Une affaire qui risque de faire autant de bruit que le scandale qui a émaillé la carrière de l'ex-vice-membre du comité directeur de CEZ, Alan Svoboda, qui a dû démissioner de ses fonctions en août dernier, après avoir été inculpé de délit d'initié. C'est la première fois que cette charge est retenue dans un procès en République tchèque.

Svoboda est accusé d'avoir acheté, en avril 2005, 7 500 actions CEZ, à hauteur de 394 Kc chacune. Devant la montée de la valeur de l'action, il devait en acquérir 10 000 autres en mai. Bilan des investissements pour Alan Svoboda : plus d'1 million et demi de couronnes de gains, soit 54 000 euros. Tout allait donc bien, jusqu'à ce que la Commission de Sécurité, intégrée aujourd'hui à la Banque Nationale, s'intéresse aux transactions.

Alan Svoboda, qui a été transféré au poste de directeur exécutif pour les ventes, affirme pour sa part avoir ignoré qu'il enfreignait la loi en achetant des actions CEZ.