Le cardinal Dominik Duka critiqué pour ses félicitations adressées à l’extrême droite
Depuis quelque temps déjà, les positions controversées adoptées par le cardinal et archevêque de Prague Dominik Duka au sujet de l’accueil des migrants et des réfugiés interpellent non seulement parmi les fidèles, mais aussi dans les cercles laïques. La semaine dernière, le plus haut dignitaire de l’Eglise catholique en République tchèque a de nouveau semé la polémique en adressant une lettre à Tomio Okamura, leader du parti d’extrême droite Liberté et Démocratie directe (SPD), pour le féliciter du bon résultat réalisé lors des récentes élections législatives.
« Je peux spécifier très précisément, car dans le programme électoral de ce parti figure l’aspiration à un soutien des familles composées d’un homme et d’une femme, et ainsi de suite… »
Il convient ici de préciser que Dominik Duka a envoyé ses félicitations non seulement à Tomio Okamura, mais aussi aux dirigeants de chacun des huit autres partis qui seront représentés à la Chambre des députés suite aux élections. Toutefois, le journaliste Jan Jandourek s’étonne du contenu de la lettre adressée par le cardinal au premier parti d’extrême droite en République tchèque à avoir recueilli plus de 10% des suffrages lors d’un scrutin législatif, un parti qui a basé sa campagne électorale sur le rejet des Roms, des migrants et de l’islam :
« Le SPD est un parti qui, depuis sa fondation, prône la plus grande intolérance possible. Les dignitaires religieux devraient être interpellés par le rejet de certaines religions, et peu importe qu’il s’agisse dans le cas présent de l’islam. Il suffit de tenir compte des déclarations du pape François, du dalaïlama ou des évêques de l’église catholique dans différents pays occidentaux. »L’historien Martin C. Putna dresse une analyse différente mais fondamentalement pas très éloignée des propos du cardinal :
« Le contenu est bien entendu très neutre. Le problème est que certains mots sont empoisonnés (sic). Quand on parle de sécurité aujourd’hui, il ne s’agit pas de sécurité réelle. Cela signifie ‘Nous allons rétablir l’ordre’. Et c’est ce qui est dangereux. »
Suite à la vague de réactions qu’a entraînées la publication par Tomio Okamura de sa lettre, le cardinal Duka, qui est apparu mal à l’aise devant la caméra de la Télévision tchèque, n’a que très modérément accepté les critiques formulées à son égard :
« Si quelqu’un pense que ma démarche est étrange, qu’il réfléchisse au sens de la démocratie. Tomáš Garrigue Masaryk disait que la démocratie se nourrit de la discussion, du débat. Nous ne pouvons dédaigner aucun parti ou groupe qui, dans le respect de notre constitution, a accédé à la Chambre des députés. »
Ancien dissident ami de Václav Havel sous le régime communiste, Dominik Duka, désormais plus proche d’un président Miloš Zeman souvent critiqué pour ses déclarations anti-islam et anti-migrants, défend des positions très conservatrices depuis quelque temps déjà. Opposé à l’accueil des réfugiés en Europe pour des raisons, affirme-t-il, de sécurité et culturelles, le cardinal divise aujourd’hui davantage qu’il ne devrait rassembler autour des valeurs censées être prêchées par l’Eglise. L’historien et théologien Martin Vanáč estime que le discours de Dominik Duka est difficilement compréhensible :« Il ne fait pas la distinction entre le fait de s’exprimer en tant que citoyen Duka tout en étant le primat de l’église catholique en République tchèque. Donc, quand il écrit que quelque chose le relie lui ou nous à monsieur Tomio Okamura, on ne sait pas très bien ce qu’il pense et si ses mots n’engagent que lui en qualité de citoyen ou l’église dans son ensemble. »