Loi sur la fonction publique : quel compromis ?

La réunion avec les partis de l'opposition, photo: ČTK

La République tchèque est le dernier pays de l’Union européenne n’ayant pas mis en place une loi sur la fonction publique. Censée dépolitiser les nominations des fonctionnaires et garantir le bon fonctionnement de l’administration publique, cette loi a pourtant été une des conditions pour l’adhésion à l’UE. Dix ans après, cette situation pourrait enfin changer car le gouvernement est arrivé à un compromis avec l’opposition au sujet de cette nouvelle législation. Néanmoins, nombreux sont ceux à remarquer que sa nouvelle version va contre l’objectif initial de la loi.

La réunion avec les partis de l'opposition,  photo: ČTK
« Les paramètres fondamentaux de la loi sur la fonction publique ont été déterminés, » affirme le Premier ministre Bohuslav Sobotka à la suite de la réunion avec les partis de l’opposition ce mercredi.

Le chef du parti de droite TOP 09, Miroslav Kalousek se réjouit, lui aussi, du compromis trouvé, qu’il considère moderne et de qualité.

Ainsi, à partir du premier janvier 2015, la République tchèque pourrait avoir une autre loi sur la fonction publique, alternative à celle adoptée en 2002 par les deux chambres du Parlement mais dont l’entrée en vigueur a été constamment repoussée. Néanmoins, le compromis dont certains se réjouissent en agace d’autres.

Jiří Dienstbier et Bohuslav Sobotka,  photo: ČTK
Pour Jiří Dienstbier, ministre chargé des droits de l’homme, le nouveau compromis détériore le projet de loi élaboré par la coalition gouvernementale et politise davantage la sélection des fonctionnaires. Le ministre est ouvertement entré en conflit avec le chef du gouvernement, pourtant du même parti social-démocrate, lors d’une conférence de presse sur le sujet ce vendredi.

La modification la plus importante issue de ce compromis ne prévoit plus la création d’une direction de la fonction publique qui superviserait tous les fonctionnaires d’Etat ainsi que les procédures de leur nomination. Cet organe devait garantir la professionnalisation et la dépolitisation de la fonction publique. Le compromis prévoit la nomination pour six ans non renouvelables d’un adjoint pour la fonction publique au ministre de l’Intérieur. Il n’aura pas de compétences pour intervenir dans le processus de sélection des autres adjoints, nommés par le gouvernement.

Josef Středula,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
« L’administration publique ne sera pas indépendante, au contraire, elle sera sous la tutelle des hommes politiques, » estime Josef Středula, président de la Confédération tchéco-morave des syndicats.

Si les critiques de la nouvelle version de la loi dénoncent le fait qu’elle entraîne plus de politisation, pour les représentants des organisations non gouvernementales, réunis au sein de l’association Rekonstrukce státu, la version antérieure n’était pas parfaite non plus.

« Le projet de loi ne gère pas assez bien les conditions d’entrée et de sortie de la fonction publique », remarque Linda Petráková, spécialiste de cette problématique au sein de l’association Rekonstrukce státu. Elle dénonce surtout le fait que la loi ferme l’administration publique aux nouveaux talents en obligeant les ministères à sélectionner les chefs de leurs départements parmi les fonctionnaires déjà présents.

La nouvelle version de la loi sur la fonction publique, qui touchera entre 65 et 80 000 personnes, devrait être présentée à la Chambre des députés le 27 août. Si elle entre en vigueur le premier janvier 2015, la République tchèque pourra bénéficier des fonds structurels et d’investissement pour la période 2015-2020, car l’adoption de la loi a été posée comme condition préalable par la Commission européenne.