L’Opéra d’Etat de Prague perd son indépendance

Opéra d’Etat de Prague, photo: CTK

Le ministre de la Culture, Jiří Besser, a présenté à la presse sa décision sur la transformation de l’Opéra d’Etat de Prague. L’Opéra d’Etat sera donc associé au Théâtre national de Prague sur le plan économique ainsi que, partiellement, au niveau artistique. Cette décision est vivement contestée par l’ensemble des artistes de l’Opéra d’Etat.

Opéra d’Etat de Prague,  photo: CTK
L’Opéra d’Etat de Prague est l’établissement lyrique installé dans le bâtiment construit en 1888 pour le Nouveau théâtre allemand (Neues deutsches Theater). Son ambition était de prolonger la glorieuse tradition de l’opéra allemand ayant résidé dans cet édifice et ayant compté parmi ses artistes Gustav Mahler, George Szell, Alexander von Zemlinsky, Richard Strauss et d’autres célébrités. En 1948, la troupe de ce théâtre a fusionné avec celle du Théâtre national de Prague, et cette union a duré pendant 44 ans. L’établissement n’a recouvré son indépendance qu’en 1992, entrant alors dans la vie culturelle pragoise sous le nom d’Opéra d’Etat. Cette situation ne satisfaisait pas cependant le ministre actuel de la Culture, qui a par conséquent décidé de réunifier dans une certaine mesure les deux institutions. Jiří Besser s’en est expliqué, lundi, lors d’une conférence de presse :

Jiří Besser et Ondřej Černý,  photo: CTK
« Nous procéderons à la fusion économique des deux établissements sous le numéro du registre du commerce du Théâtre national. Les comptabilités des deux institutions seront cependant séparées. Les corps des ballets des deux théâtres vont fusionner, ce qui permettra la création du meilleur ensemble de ballet du pays. Les orchestres et les chœurs des deux établissements resteront indépendants sur le plan logistique. Nous opérerons cependant la fusion des ensembles de solistes des deux institutions. La troupe dramatique du Théâtre national ne connaîtra aucun changement. »

Les intentions du ministre provoquent depuis quelques mois une vive réprobation des artistes de l’Opéra d’Etat qui ont protesté publiquement à plusieurs reprises contre la fusion de leur établissement avec le Théâtre national. Le projet est critiqué aussi par certains théâtrologues et hommes politiques. Ancien directeur de l’Opéra d’Etat, Radim Dolanský peut être considéré comme le porte-parole des opposants au projet. Il se déclare convaincu de l’utilité de l’existence de deux ensembles lyriques indépendants à Prague :

Radim Dolanský,  photo: CTK
« Chaque ensemble doit avoir sa propre direction, qui défendra les intérêts de son ensemble et qui cherchera à améliorer son niveau artistique. Je ne crois pas que la direction que propose le ministre après la fusion des deux troupes pourra apporter quelque chose de positif. »

En revanche, le ministre a trouvé un partisan de sa conception en la personne du directeur actuel du Théâtre national, Ondřej Černý, auquel il a confié aussi la direction de l’Opéra d’Etat. A l’instar du ministre, Ondřej Černý justifie la nouvelle conception par le souci d’améliorer le niveau artistique des deux institutions qui devraient, à son avis, unir leurs forces :

« En Tchéquie, nous avons parfois tendance à lutter contre nous-mêmes et à rivaliser entre nous. La chose essentielle qui naîtra de cette union est la synergie, la jonction, la concentration des forces et la création d’une maison représentative d’opéra et de ballet qui pourra se mesurer à l’Europe, aux établissements du même genre de Vienne, Dresde, Barcelone, Francfort, etc. Je ne pense pas qu’il faille rivaliser entre nous. »

Les mesures préparées par le ministre de la Culture devraient entrer en vigueur dès le début de l’année prochaine. Les programmes des deux théâtres pour la saison 2011-2012 seront conservés. Ce ne sera cependant que la première étape de la transformation des théâtres lyriques de Prague, transformation qui, selon Jiří Besser, ne s’achèvera qu’en 2015.