Elections présidentielles
Le moment tellement attendu est arrivé à 10 heures du matin, ce mercredi 15 janvier : le Parlement tchèque s'est réuni pour l'élection du président de la République tchèque. Que s'est-il donc passé à la Salle espagnole du Château de Prague ?
En Tchéquie, le président de la République n'est pas élu au suffrage universel, mais par le Parlement. Comme le veut la Constitution, les membres des deux chambres de ce parlement, les députés et les sénateurs, se sont donc réunis en session commune, pour élire le nouveau chef de l'Etat, celui qui succédera à Vaclav Havel dont le mandat expire au début du mois de février. A noter, qu'au début de cette session, tous les sénateurs (81) étaient présents, alors qu'un député manquait sur les 200 membres de la chambre basse du Parlement. Ce dernier, en congé de maladie, sera quand même présent pour le vote. Les membres du cabinet du Premier ministre, Vladimir Spidla, ont aussi honoré par leur présence, ce grand moment de l'histoire tchèque quand, pour la première fois, les jeux ne sont pas faits. Quatre candidats à la fonction présidentielle se sont présentés, chacun représentant une formation politique.
Avant encore de céder la parole aux quatre candidats à l'élection présidentielle, le chef de la Chambre des députés, Lubomir Zaoralek, a accueilli, sur le sol parlementaire, le président de la République, Vaclav Havel. Alena Gebertova a suivi son discours.
C'est pour la dernière fois que les fanfares solennelles tirées de l'opéra Libuse de Smetana, ont accompagné l'arrivée de Vaclav Havel devant les députés et les sénateurs. Son ultime discours a été bref, il n'a pas duré plus de six minutes. Vaclav Havel a remercié les deux Chambres du parlement pour la confiance qu'elles lui avaient accordée.« J'ai fait de mon mieux, durant mon mandat présidentiel », a-t-il dit. Et d'ajouter que c'est aux politiciens, au public, aux journalistes, politologues et historiens de faire une évaluation de son travail. Fidèle à ses précédentes déclarations, il a rappelé qu'il ne quitterait pas entièrement l'espace public, mais qu'il allait s'imposer un certain recul dans un premier temps.
Vaclav Havel n'a pas pu omettre, dans son discours, la question de la participation tchèque à une éventuelle opération en Irak. « Votre décision ne sera pas facile », a-t-il dit. Selon ses paroles, c'est la conscience, de concert avec la responsabilité de chaque député et sénateur, qui devrait avoir le dernier mot.
Avant que Vaclav Havel ne quitte la Salle espagnole, Lubomir Zaoralek l'a remercié pour tout ce qu'il a fait pour le pays... Pour lui, Vaclav Havel est devenu le porte-parole de la région centreuropéenne dans le monde. « J'ose dire que vous avez créé le prestige de la République tchèque dans le monde, vous avez essayé de redresser cette nation », a-t-il dit en concluant : « Je vous remercie, car vous avez énormément profité au pays et à ses habitants. M. le président, nous vous remercions tous ».
Encore avant la procédure même de l'élection présidentielle, les quatre candidats ont pu s'exprimer devant les députés, les sénateurs et les hôtes présents dans la Salle espagnole du Château de Prague. Ce fut Petr Pithart, président du Sénat qui a pris la parole le premier.Petr Pithart, 62 ans, ancien dissident, l'un des acteurs de la Révolution de velours en 1989, premier chef du gouvernement de la République tchèque, s'est penché sur les bases fondamentales de l'Etat, son rôle pour la société. Il a promis de remplir sa fonction avec honneur, dans le cas de son élection. Pour lui, la culpabilité collective n'existe pas. Il a laissé entendre qu'il userait des pouvoirs présidentiels avec réflexion, par exemple en ce qui concerne l'amnistie et le droit de grâce.
Le candidat communiste, Miroslav Krizenecky, 56 ans, semblait assez nerveux. Il est revenu aux thèmes traditionnels des communistes : la critique des conditions sociales dans la société tchèques.Jaroslav Bures, 48 ans, candidat des sociaux-démocrates, ancien juge et ministre de la Justice présenta ses expériences dans ce domaine. Il insista sur l'importance de l'Etat de droit dans la vie du citoyen, sur la foi et la justice.
Le plus long, à la tribune, fut certainement Vaclav Klaus, une grande personnalité de la Révolution de velours, le premier rôle dans les première années du retour de la démocratie en Tchéquie, le protagoniste de la transformation de l'économie, Premier ministre plusieurs fois, s'est déclaré un conservateur libéral. A 62 ans, « le professeur », comme on l'appelle souvent, a abordé plusieurs sujets, dont l'intégration européenne, sur laquelle il émet toujours des réserves. Pour lui, dans une situation où le gouvernement est de gauche et où la gauche à la majorité au Parlement, il serait bon d'élire un Président de droite. La société tchèque ne serait donc pas polarisée à la veille du référendum sur l'entrée à l'Union européenne.A 14 heures, on savait que le premier tour n'avait pas décidé du président de la République. Deux candidats restaient en lice pour le second tour : Petr Pithart et Vaclav Klaus. Intéressant de constater que Vaclav Klaus avait largement devancé son adversaire. Pour les observateurs rien de surprenant, le premier tour servant surtout à éliminer les candidats inacceptables pour la majorité des sénateurs et députés. Peu après 16 heures les résultats du second tour étaient annoncés : Vaclav Klaus battait Petr Pithart, mais ne l'emportait pas car il n'avait pas obtenu la majorité des voix des députés et sénateurs présents : 109 voix contre 89 voix pour son adversaire. Un troisième tour était donc nécessaire. Les députés et les sénateurs furent rapides : il a eu lieu ce mercredi encore. Le président n'a pas été élu. On devrait procéder à de nouvelles élections.