Découverte d’un relief unique du Christ dans une église pragoise
C’est une découverte exceptionnelle, faite par un prêtre jésuite dans les locaux de l’église Saint-Sauveur de Prague : créé il y a 600 ans par un auteur inconnu, ce fragment d’un relief représentant Jésus-Christ dans le Jardin de Gethsémani se classe, selon les spécialistes, parmi les plus grandes trouvailles en art médiéval de ces dix dernières années en République tchèque. Le relief est inauguré à l’occasion de ce mercredi des Cendres avec une messe des artistes qui constitue désormais une tradition à l’église Saint-Sauveur, laquelle est située à quelques pas du pont Charles de Prague.
Comme l’explique le prêtre jésuite Petr Vacík, un des vicaires de la paroisse Saint-Sauveur, la découverte du relief n’a pas été le fruit d’une fouille archéologique, mais d’un pur hasard. Les origines de ce fragment, qui faisait probablement partie de la décoration du portail ou du retable, remontent à la seconde moitié du XIVe siècle. Peu après, en 1420, le couvent dominicain qui se trouvait à l’emplacement de l’actuelle église baroque Saint-Sauveur, a été dévasté et brûlé par les hussites. Le relief du Christ est un des rares témoins du passé médiéval trouble de ces lieux, habités plus tard par les jésuites qui y ont construit leur collège Klementinum, ainsi que l’église Saint Sauveur. Pour le prêtre Tomáš Halík, qui est depuis 1990 à la tête de la paroisse Saint-Sauveur, la récente découverte du relief gothique est une sorte de signe :
« En contemplant ce Christ priant dans le Jardin de Gethsémani, j’ai réalisé que c’était l’unique objet de ce couvent dominicain dévasté brutalement par les hussites qui s’est conservé jusqu’à nos jours. Pourquoi justement ce motif précis, alors que des représentations de centaines de scènes bibliques devaient sans doute décorer le couvent ? C’est peut-être un message adressé par ceux qui ont été assassinés à cet endroit à l’époque. Ce message nous a été transmis au moment où d’autres guerres sont menées au nom de la foi dans le monde. Dans cette scène biblique qui se déroule à Gethsémani, le Christ nous appelle à la non-violence, il dit : ‘Remets ton épée à sa place; car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée’. Il nous appelle à être vigilants, à ne pas se laisser séduire par la haine et la violence. »
Le relief médiéval du Christ sera exposé à l’église Saint-Sauveur, située rue Křížovnická, au cœur de la Vieille ville de Prague, tout au long de la période du Carême. Le début de celle-ci est marqué par une « messe des artistes », une tradition née en 1914 en France, en tant qu’hommage aux artistes victimes de la Grande Guerre et qui s’est répandue dans toute l’Europe. Tomáš Halík :
« J’ai été particulièrement interpelé par les messes des artistes auxquelles j’ai pu assister en Allemagne et où elles étaient souvent accompagnées de représentations théâtrales. Nous aussi, nous organisons ces messes depuis 22 ans déjà, à l’occasion de chaque mercredi des Cendres. Notre paroisse est universitaire, elle est fréquentée tant par des étudiants et des professeurs que par des intellectuels et des artistes qui ne sont pas forcément des croyants pratiquants. Je souhaite néanmoins qu’ils se sentent bien chez nous. Je tiens beaucoup à ce que la paroisse soit un lieu de rencontre entre religion et culture, des domaines qui sont indissociables. »Ce mercredi donc, à l’occasion de la 22e messe des artistes, appelée ici « Popelec umělců », le lycée pragois Přírodní škola présente à l’église Saint-Sauveur une pièce de théâtre écrite en 1943 par Hanuš Hachenburg, un garçon de quatorze ans, emprisonné dans le ghetto de Terezín.