Tour de France : Kreuziger, mieux que Contador ?

Photo: CTK

Seul coureur tchèque présent sur le Tour cette année, Roman Kreuziger occupait la 5e place au classement général à l’issue de la première semaine de course et des deux premières étapes de montagne. Apparu en bonne forme dans les cols pyrénéens, et même en meilleure forme qu’Alberto Contador, Roman Kreuziger assure pourtant que son rôle au sein de l’équipe Saxo reste le même : aider son leader espagnol à remporter son troisième Tour de France.

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Une retransmission quotidienne en direct des étapes pendant trois semaines par la Télévision tchèque, de longs résumés le soir, des journaux et la Radio tchèque présents sur place avec leurs envoyés spéciaux, un peloton et la montagne corse qui ont fait la une des pages sportives en début de semaine dernière, des articles de fond ou encore un pavé de 600 pages, premier livre jamais écrit en tchèque sur le sujet, récemment publié et racontant toutes les petites histoires, les exploits et les drames qui, depuis plus de cent ans, font la grande Histoire de la course. C’est une évidence : partiellement ignoré des médias il y a encore quelques années de cela, le Tour de France rassemble désormais un public de plus en plus nombreux en République tchèque. Ce succès grandissant, la Grande Boucle le doit en partie aux performances depuis quelques années de Roman Kreuziger. Absent la saison dernière après avoir donné la priorité au Giro, le vainqueur de la dernière Amstel Gold Race fait son retour en ce début d’été sur les routes de France.

Seul coureur tchèque à avoir pris le départ à Porto-Vecchio, Roman Kreuziger dispute cette année le cinquième Tour de sa carrière. Et à l’issue des trois premières étapes corses figurant au programme, bien plus que sa 19e place provisoire au classement général, à 1’’ du maillot jaune endossé dimanche par le Belge Jan Bakelants, c’était d’abord le fait d’avoir relié sans bobos et sans retard les arrivés à Bastia, Ajaccio, puis à Calvi qui le satisfaisaient :

Roman Kreuziger,  photo: CT
« Pour l’instant, tout se passe comme prévu. C’est une course très nerveuse, même si la première étape a été plutôt calme avant de s’animer à l’approche de l’arrivée avec les incidents et la chute collective que l’on sait. La deuxième étape ce dimanche s’est courue sur des routes plus étroites, c’était plus animé, il fallait donc rester très vigilant. Il y a eu plusieurs échappées, des attaques, et il a fallu rouler derrière. Mais il y a parfois des choses qu’on ne comprend pas très bien dans le déroulement de la course, par exemple pourquoi certaines équipes roulent ou mènent la poursuite à certains moments. Quelque fois, c’est donc un peu bizarre. »

Bizarre peut-être, mais chaotique et très mouvementé surtout a donc été, comme souvent, le départ du Tour. Un chaos auquel contribuent partiellement les routes de Corse, dont Roman Kreuziger, comme pas mal d’autres coureurs du peloton, n’est pas particulièrement fan :

« Je ne dirais pas que c’est une course très différente des autres éditions ou des autres grands Tours. La première semaine est toujours très animée et nerveuse avec beaucoup d’attaques et des chutes. Les coureurs sont encore frais et tout le monde veut se montrer. Le profil des étapes ici en Corse ajoute sans doute encore un peu de nervosité. Ca donne des belles images depuis l’hélicoptère pour la télévision, mais sur la route, c’est autre chose. Je dirais que ça allait pour ces premières étapes, je pense que le pire nous attend encore. »

Christopher Froome et Alberto Contador,  photo: CTK
En attendant la troisième étape, le pire pour l’instant, Roman Kreuziger l’a évité samedi à l’approche de l’arrivée de la 1ère étape. Le Tchèque a échappé de peu à la chute collective dans les rues de Bastia, dans laquelle s’est en revanche retrouvé impliqué Alberto Contador, son leader de l’équipe Saxo-Tinkoff :

« Des coureurs se sont retrouvés à terre juste devant moi. J’étais à l’avant du peloton, aux environs de la vingtième place et j’ai évité la chute de justesse. Malheureusement, Alberto était à gauche à ce moment-là et il est tombé. Ceux qui étaient à droite, comme moi, sont passés à côté. Mais c’est juste une question de chance. Vous pouvez être à l’avant, prendre toutes les précautions, mais même comme ça, il y a des chutes. »

A l’avant du peloton dans le final de la deuxième étape, Roman Kreuziger y est de nouveau apparu le lendemain dans la dernière ascension lorsque les échappés ont été rejoints. Pour autant, le Tchèque n’avait aucunement l’intention de viser la victoire d’étape à Ajaccio :

« Non, non, pas du tout. D’abord ce n’est pas ce qui m’intéresse, et ensuite nous avons d’autres objectifs en tant qu’équipe que de gagner des étapes. Mais pour remplir ces objectifs, il faut y travailler un petit peu tous les jours. »

Ces autres objectifs, ou plutôt le grand objectif de Roman Kreuziger et plus généralement de l’équipe Saxo-Tinkoff, est bien entendu d’aider Alberto Contador à remporter un troisième Tour de France. Et dans son duel annoncé avec le Britannique Chris Froome, l’Espagnol aura bien besoin de l’aide de son équipier tchèque, comme l’ont démontré les deux étapes pyrénéennes de ces samedi et dimanche. Deux étapes lors desquelles le public a eu la confirmation que Roman Kreuziger, qui a laissé une très bonne impression dans le passage des cols, était prêt à sacrifier ses ambitions personnelles, lui qui a pourtant déjà terminé deux fois le Tour parmi les dix premiers du classement général. Toujours aux côtés d’un Contador en difficulté samedi, le Tchèque affirmait pourtant ne pas être surpris par le déroulement de ces deux premières grandes étapes de montagne :

Roman Kreuziger,  photo: CT
« Elles se sont passées comme on pouvait s’y attendre. Il n’y a pas eu de surprise. La première étape de montagne a été entièrement contrôlée par les Sky, la deuxième déjà un peu moins, mais rien de tout cela ne nous étonne vraiment. »

Après avoir concédé 1’45’’ à Chris Froome, vainqueur de l’étape de samedi, Roman Kreuziger possédait 1’51’’ de retard sur le leader britannique au classement général dimanche soir, avant le premier jour de repos, ce lundi. Un retard identique, à la seconde près, à celui de Contador, mais qui ne change à la façon dont Kreuziger envisage la suite du Tour :

« Je suis là pour aider Alberto. Je n’ai fait que mon travail, je ne vois donc pas pourquoi il faudrait me féliciter, revoir maintenant ma position dans l’équipe ou quoi que ce soit d’autre. C’est mon rôle d’équipier d’être aux côtés de mon leader. Toute l’équipe travaille avec le même objectif, qui est d’arriver à Paris avec le meilleur classement possible pour Alberto. Pour cela, il nous reste encore deux semaines de course. Il n’y a donc pas de problème. »

Et à en croire le Tchèque, beaucoup de choses peuvent encore se passer, chassant ainsi l’idée émise par certains observateurs dès samedi selon laquelle le Tour était déjà une affaire entendue après la démonstration de Chris Froome et des Sky. Roman Kreuziger assure que ce n’est ni son avis, ni l’état d’esprit qui règne dans les rangs des Saxo :

Chris Froome,  photo: CTK
« Je pense qu’Alberto était déjà beaucoup mieux ce dimanche et je suis persuadé que ce sera tout autre chose dans une semaine dans les Alpes. »

Et si Roman Kreuziger garde le même état de forme que celui affiché tout au long de la première semaine du Tour, il est permis de croire que l’Espagnol sera peut-être plus en mesure d’inquiéter Chris Froome dans des étapes alpestres déjà très attendues. Pour le spectacle, personne ne s’en plaindrait.