Récession : l'économie tchèque "dans la panade"
Les chiffres publiés par l’Office tchèque des statistiques ne sont pas bons : pour le sixième trimestre consécutif, l’économie tchèque est en récession. Le produit intérieur brut a connu une contraction de 0,8% par rapport au trimestre précédent, de 1,9% par rapport à l’année dernière, des résultats parmi les pires en Europe ; conséquence de la stricte politique d’austérité menée par le gouvernement de Petr Nečas.
« Rappelons qu’une baisse d’environ 2% du PIB en un an signifie approximativement une perte de 80 milliards de couronnes (soit près de 3 milliards d’euros) et cela représente une sacrée somme, qui est autant de capacité en moins. En ces temps de ‘maturita’, le baccalauréat tchèque, je qualifierais cette situation de dernier avertissement, de dernier signal d’alarme, auxquels devraient réagir ceux qui imaginent les politiques économiques, parce que dans cette panade, ce n’est pas en attendant simplement une éventuelle reprise cyclique que notre état s’améliorera. »
Ce pessimisme est également lié à l’état des autres économies de la région. Si la Pologne, la Slovaquie ou l’Autriche connaissent des croissances nulles ou très faibles, celle-ci est négative en Allemagne, le principal partenaire économique de la République tchèque et à court terme, rien ne laisse présager des lendemains qui chantent. Et les économistes sont désormais de plus en plus nombreux à pointer du doigt la responsabilité des politiques d’austérité menées en Europe. En période de crise, réduire les dépenses publiques n’est pas la meilleure façon de relancer l’activité et conduit paradoxalement à la détérioration des déficits des comptes publics comme l’explique Jiří Škop, économiste à la Komerční banka :
« Si tous les pays réalisent des coupes budgétaires, et si en plus les ménages et les entreprises font également des économies, alors évidemment, tout cela conjugué fait que la crise va s’aggraver. Il est désormais bien connu que les multiplicateurs fiscaux ont pu être supérieurs à ceux attendus et les économies réalisées ont au final amplifié les problèmes de déficit budgétaire. Donc, on peut dire que la politique de ‘consolidation financière’ a joué un rôle évident. »
La « consolidation financière », c’est l’expression consacrée en République tchèque pour évoquer la politique d’austérité portée par le ministre des Finances Miroslav Kalousek. D’autres parlent de « rigueur budgétaire », mais c’est toujours le même principe : diminuer drastiquement les dépenses publiques au risque de contracter l’activité et de réduire les recettes fiscales comme on le voit aujourd’hui. Pourtant, le ministre considère que cette étape était nécessaire. Il se félicite d’un déficit public qui devrait être inférieur à 3% du PIB cette année, l’un des critères de convergence imposés par Bruxelles, et envisage la suite :« Parce que nous avons rempli la plupart des principaux objectifs de la stratégie financière du gouvernement tchèque pour stabiliser les budgets publics, nous pouvons réfléchir à des mesures en faveur de la croissance. »
Alors que les chiffres du chômage semblaient légèrement meilleurs en avril, essentiellement du fait d’un effet saisonnier, mais restent à un niveau inquiétant (7,7% selon le ministère du Travail et des Affaires sociales), le gouvernement a enfin pris quelques mesures pour l’emploi avec notamment une aide financière apportée aux entreprises embauchant des jeunes. C’est trop peu pour Bohuslav Sobotka, le chef de l’opposition sociale-démocrate. Selon lui, c’est au niveau européen qu’une politique de relance devrait être menée avec un effort fait pour favoriser les exportations en dehors de l’Union européenne. L’économiste Petr Zahradník partage ce point de vue et encourage l’Etat tchèque à moderniser ses infrastructures et à mobiliser enfin efficacement les fonds européens qui lui sont alloués.