La vie en "panelák" (tour) a toujours un certain attrait pour les Tchèques
La vie en "panelák" ne semble pas déplaire à une grande partie de la population tchèque. C’est ce que nous avons pu constater en lisant la presse de ces derniers jours. Celle-ci a également largement commenté la récente érection du drapeau européen au Château de Prague. Nous avons également retenu quelques données positives concernant la dernière évolution démographique dans le pays.
« Si les quartiers périphériques sont souvent critiqués et dénoncés, les "panelák" demeurent tout de même une partie de l’identité nationale. On peut y trouver des gens dans une bonne situation sociale, un premier ministre ou un président étant parmi ceux qui n’hésitent pas à y demeurer. Ces quartiers sont une bonne adresse en Tchéquie et tout indique qu’il en sera de même à l’avenir. »
Le journal explique comment il est possible que le milieu d’une jungle de béton convienne toujours à une quantité de personnes, en précisant ses avantages :
« Une fois rénovées, ces habitations, même si elle sont vieilles de quelques dizaines d’années, sont à même de répondre à des critères exigeants. La plupart des quartiers périphériques sont désormais débarassés de la grisaille qui les a caractérisés auparavant, tandis que le niveau et l’accessibilité des services y sont généralement nettement meilleurs que dans le passé. Les loyers moins chers qu’ailleurs et le très bon desservissement par les transports en commun se présentent comme des atouts importants de la vie en "panelák". Tout porte donc à croire que, dans un proche avenir, celles-ci ne vont pas perdre leur intérêt. »
L’anonymat en raison d’une grande concentration d’habitants et le bruit dû à de mauvaises isolations acoustiques représentent en revanche le côté négatif de la vie dans ces habitations. Le journal remarque en même temps que, par rapport à la situation qui existe dans beaucoup de pays d’Europe occidentale, le risque de « ghettoïsation » des quartiers périphériques est relativement faible en Tchéquie. Il note :« Chez nous, il ne s’agira probablement que de cas isolés. Avant 1989, les quartiers périphériques n’étaient pas perçus comme étant destinés à une population socialement faible et même aujourd’hui, ils n’ont pas une telle réputation. Bref, leur cote auprès de la population est assez bonne. L’amour des Tchèques pour les "panelák" ne vas pas s’estomper d’ici peu... Mais avec le départ des générations âgées, on peut s’attendre à ce que ces habitations servent au fur et à mesure à d’autres buts, offrant par exemple aux jeunes une première occasion de se procurer un appartement bon marché. »
Ce mercredi, le président de la République Miloš Zeman, en présence du président de la Commission européenne José Manuel Barroso, a fait ériger au Château de Prague le drapeau de l’Union européenne. Un acte que son prédécesseur, Václav Klaus, avait refusé d’accomplir. Parmi les nombreux commentaires qui ont été consacrés à cet événement, nous avons choisi celui du serveur aktualne.cz et dans lequel nous avons pu lire :
« Ce drapeau bleu-jaune qui flotte désormais à côté de celui de la République tchèque va irriter l’ensemble des eurosceptiques, des europhobes et des eurodénonciateurs. Ceux-ci prétendent que le drapeau au Château signifiera la fin de notre chère souveraineté nationale. C’est Václav Klaus qui était et qui est toujours l’adversaire le plus ostensible de ce drapeau, et d’ailleurs de toute l’Union européenne. »
L’auteur du commentaire insiste sur un paradoxe : le Parti civique démocrate (ODS), dont Klaus est le fondateur, dénonce systématiquement l’Union européenne, comme s’il s’agissait d’un nouvel ennemi de classe, tandis que les électeurs de ce premier parti de droite sont pour la plupart proeuropéens ou du moins europositifs. Plus loin, il remarque que la méfiance des représentants politiques à l’égard de l’Union européenne a contaminé, de larges couches de la population. Il écrit :
« Au fur et à mesure, l’attitude d’une grande partie des citoyens tchèques à l’égard de l’Union européenne a changé. Lorsque nous n’étions pas encore membre, nous avons sincèrement souhaité la rejoindre. Et depuis que nous y sommes, depuis qu’elle est devenue la ‘nôtre’, nous en avons marre et nous avons tendance à nous en débarrasser... Chez nous, il existe une grande méfiance envers l’Etat et les institutions. Point n’est besoin d’énumérer tout ce qui fonctionne mal, la justice et la police n’en seraient que des exemples les plus flagrants. Il va de soi que cette méfiance à l’égard de l’Etat s’étend, aussi, sur l’Union. »
Les finances accordées et les dispositions dictées par Bruxelles sont deux éléments qui semblent aujourd’hui symboliser l’Union européenne pour les Tchèques. En ce qui concerne les normes européennes, elles sont souvent mal vues et identifiées uniquement avec des normes appliquées par exemple dans la restauration ou au vu des produits alimentaires. D’où la conviction : « personne ne va nous raconter ce qu’il faut faire. » Un regard plus négatif encore est porté sur les finances européennes, car des cas de corruption, de fraudes et de détournement y sont liés assez régulièrement. En conclusion, l’auteur de l’article écrit :« La République tchèque a adhéré en 2004 à l’Union européenne. En faisant ériger le drapeau européen au Château de Prague, Miloš Zeman démontre qu’il est eurofédéraliste. Mais plus encore peut-être, il veut insinuer l’idée qu’il est très différent de Václav Klaus... Ce qui est certain c’est qu’au bout de neuf ans, notre existence au sein de l’Union est pleine de paradoxes et qu’il n’y a que nous-mêmes, et personne d’autre, qui mettons notre souveraineté nationale en doute. »
Depuis la première moitié des années 1990 la courbe démographique dans les pays tchèques était en baisse. Les dernières données de l’Office tchèque des statistiques révèlent que cette tendance s’est arrétée. La dernière édition de l’hebdomadaire Respekt s’interroge sur les raisons de ce phénomène en soumettant plusieurs hypothèses :
« Certains considèrent que cette situation est due à la natalité des immigrés qui est plus importante que celle des Tchèques. L’année dernière, les nouveaux-nés au sein de cette communauté représentaient 3% de l’ensemble des naissances enregistrées dans le pays. Selon une autre explication, ce serait un fruit du baby-boom dans les années 1970 ou une réponse à la crise financière, les femmes préférant la maternité au chômage... Mais toutes ces hypothèses semblent fallacieuses, car cette problématique est plus complexe. »Le journal rappelle que dans les années 1970, à l’époque où l’ancienne Tchécoslovaquie a connu un grand baby-boom, le gouvernement communiste a mis en œuvre toute une série de mesures pro-famille : des prêts avantageux pour les mariés, un départ en retraite anticipé pour les mères de familles, des privilèges dans le domaine du logement. En une seule décennie, le nombre de nouveaux-nés s’est alors accru de 140 000 à 190 000. L’auteur de l’article observe que même aujourd’hui, une politique gouvernementale familiale pourrait donner un nouveau coup d’envoi à un pareil baby-boom :
« La politique familiale est loin d’être idéale. Mais les expériences montrent que les choses commencent à bouger et à s’améliorer. Grâce aux contributions de l’Etat, on a vu naître, par exemple, des dizaines de nouvelles écoles maternelles privées qui fonctionnent aussi au sein des firmes et des entreprises. Mais le plus important, c’est l’approche de la société à l’égard des familles avec enfants qui est en train de changer dans le bon sens. »
Malgré cette perspective optimiste, le journal cite les démographes qui estiment que la récente évolution démographique positive ne représente qu’un phénomène passager et que, à la longue, le nombre de nouvelles naissances en Tchéquie continuera à diminuer. La situation répondrait à celle qui existe dans les pays d’Europe occidentale qui comptent près d’un cinquième de femmes sans enfant. Il conclut :« Les études confirment qu’il y a des personnes qui, tout simplement, ne désirent pas avoir d’enfant. Il y a pas mal de Tchèques qui se réalisent dans leur travail, avec leurs amis ou avec un partenaire. La tolérance de la société face à ce mode de vie ne cesse d’ailleurs de s’améliorer. »