Max Švabinský, peintre amoureux de la vie
Il y a 50 ans, le 10 février 1962, s’achevait la vie du peintre et graveur Max Švabinský. Il quittait le monde à l’âge vénérable de 91 ans et pouvait se retourner avec fierté sur l’oeuvre de sa longue existence car il laissait une empreinte profonde dans les arts plastiques tchèques. A l’occasion du 50e anniversaire de sa mort, une exposition de ses œuvres graphiques est présentée à Kroměříž, une des plus belles villes de Moravie où le peintre est né en 1873.
« J’avais la certitude d’être reçu. Lors de l’examen, j’étais le premier à achever le dessin d’un nu masculin et quand j’ai vu la manière dont les autres étudiants regardaient mon travail. Je n’avais aucun doute sur le résultat de l’examen. J’ai été effectivement reçu avec une mention honorable et je suis entré dans la classe du professeur Maxmilián Pirner. »
Le professeur Maxmilián Pirner, peintre influencé par le symbolisme romantique, sait apprécier et cultiver le talent du jeune Morave et le marquera aussi par son influence artistique. Le rapport entre le professeur et son disciple se transforme peu à peu en amitié :« J’aimais beaucoup Maxmilián Pirner. Au cours de mes études j’ai fait des portraits du poète Jaroslav Vrchlicky et de toute une série de personnalités importantes. Pirner se réjouissait de mes succès mais un jour il m’a dit : ‘Ecoutez, vous devriez quitter cette Académie. Vous n’y appartenez plus. Vous appartenez au public.’ C’était ma dernière année à l’Académie des beaux arts mais cela m’a pourtant fait de la peine. »Max Švabinský devient rapidement l’un des artistes tchèques les plus respectés et les plus admirés de son époque. Dans les premières étapes de sa création il subit la forte influence des peintres préraphaélites, notamment de Dante Gabriel Rossetti. Ses oeuvres reflètent aussi les tendances symbolistes de l’époque.
Par la suite, il évoluera de la spiritualité à la sensualité, de la peinture symboliste au réalisme mais son pinceau cherchera toujours à transformer la réalité en poésie. Il entre dans l’histoire des arts plastiques tchèques en tant que peintre des moments privilégiés, des moments d’extase. C’est un artiste perpétuellement ivre de vie, un poète du corps de la femme. Son idéal féminin évolue, lui aussi, passant de la beauté raffinée et spirituelle à l’image de la femme épanouie aux formes plantureuses, déesse de la volupté et de la fertilité. Il situe ses modèles dans des paysages idéaux et paradisiaques, les entoure de la flore et de la faune exotiques et sa création devient une recherche permanente du paradis perdu. Auteur de monumentales peintures à l’huile aux couleurs éclatantes, Max Švabinský n’en est pas moins un véritable virtuose du dessin et de l’art graphique. C’est dans ces genres beaucoup plus modestes qu’il sait déployer son génie de la façon la plus convaincante. Par ses innombrables xylographies, eaux-fortes et aquatintes, il jette les fondements de l’art graphique tchèque moderne dont il restera le maître inégalé.Dès l’âge mûr, le peintre se tient à l’écart des courants artistiques qui révolutionnent les arts plastiques au XXe siècle. Fidèle à lui-même, il n’abandonne jamais l’art figuratif et ne cède pas à la tentation abstractionniste. Sa place dans l’histoire des arts plastiques tchèques n’est pas celle d’un novateur mais d’un artiste à l’ancienne qui a eu besoin pour sa création non seulement de l’inspiration mais aussi d’une parfaite maîtrise technique de son métier.