José Cura à l’affiche d’une production lyrique du festival de Český Krumlov
Trois grands ténors dominent le programme du festival international de musique qui bat son plein ces jours-ci à Český Krumlov, un des plus beaux sites historique de République tchèque. Le festival a été inauguré par le chanteur mexicain Ramon Vargas, il sera clôturé par un récital de Placido Domingo et à son programme il y a entre autres l’opéra I Pagliacci (Paillasse) de Ruggiero Leoncavallo avec en vedette le chanteur argentin José Cura. Cette production est attentivement suivie par le public et la critique.
« Tout d’abord je dois dire un grand merci à mon collègue Wei Long. Je n’en pouvais plus, merci de m’avoir remplacé, » a dit José Cura lors d’une conférence de presse à Český Krumlov. Il était reconnaissant envers le chanteur Wei Long Tao, qui alterne avec le lui dans le rôle de Canio, de l’avoir remplacé lors de la répétition générale parce qu’il était fatigué et le temps pluvieux et humide a beaucoup éprouvé ses cordes vocales. « Vous savez, je ne suis pas Tchèque et ne suis pas habitué à un aussi mauvais temps », a constaté le célèbre ténor et a rendu hommage aux artistes tchèques ayant participé à cette production. « C’est du jamais vu, s’étonnait-il. Au cours des trente ans de ma carrière je n’ai pas encore rencontré un choeur capable de poursuivre les répétitions sous la pluie et dans l’humilité sans se plaindre. » De l’avis du chanteur, cela témoigne de la véritable professionnalité de ces artistes mais aussi de leur respect pour le metteur en scène.
C’est à l’ancien chanteur et chef de l’opéra de Théâtre national de Prague Josef Průdek que les organisateurs du festival ont confié la mise en scène de ce spectacle. Il a abondamment exploité les possibilités du plateau tournant de ce théâtre qui permet au metteur en scène d’orienter les spectateurs vers les différentes parties du parc. Josef Průdek a utilisé ces fréquents changements de décors pour donner au spectacle un style presque cinématographique.Malgré les caprices du temps, la première de l’opéra, le 5 août dernier, a été un succès et le public a chaleureusement applaudi non seulement le ténor argentin mais aussi la jeune soprano tchèque Jana Šrejma Kačírková, qui a interprété le rôle de Neda. Même les critiques, qui restent normalement assez réservés lorsqu’il s’agit des productions estivales, se sont montrés plutôt satisfaits. Dans le journal Lidové noviny, la critique Helena Havlíková apprécie l’art avec lequel José Cura s’est identifié avec son rôle. La critique du journal Právo, Radmila Hrdinová, estime que la performance du chanteur témoigne de sa connaissance intime du rôle de Canio et apprécie également que l’artiste ait respecté la conception du metteur en scène et n’ait pas exploité ce spectacle pour une exhibition personnelle. Seule Věra Drápelová, dans le journal Mladá fronta Dnes, reproche au chanteur son style vocal "naturaliste et trop robuste". Presque tous les critiques déplorent aussi l’utilisation des micros serre-tête qui amplifient mais aussi déforment dans une certaine mesure les voix des chanteurs. Ils se rendent compte en même temps que pour une production à ciel ouvert, un tel procédé est indispensable. Il est donc évident que les opéras donnés dans le parc de Český Krumlov ne sont pas conçus pour des mélomanes raffinés mais pour un public qui aime à marier plaisirs de l’ouie et de la vue et passe sur les imperfections. Les fanatiques de la perfection n’auront plus qu’à écouter l’enregistrement de l’opéra réalisé dans un studio.