Dita Horochovská, une fille tétraplégique qui ne renonce pas à ses rêves

Dita Horochovská

C’est un des milliers de destins sur lesquels on tourne des reportages, on écrit des livres et qui ne cessent de nous surprendre, nous qui avons la chance de ne pas connaître ce qu’est, en réalité, un handicap physique, congénital ou acquis. Il existe des personnes handicapées qui conduisent une voiture, font toutes sortes de sports, peignent et écrivent de la bouche ou du pied. Dita Horochovská, 23 ans, qui souffre, depuis sa naissance, de paralysie des quatre membres, est la première Tchèque handicapée à avoir appris à travailler à l’ordinateur à l’aide de sa voix.

Dita Horochovská

Nous en avons parlé sur Radio Prague : en 2010, l’association tchèque Polovina nebe (La moitié du ciel) a lancé à Prague des cours de travail à l’ordinateur destinés aux personnes handicapées, dont les fonctions motrices sont très limitées. Grâce aux logiciels de reconnaissance vocale MyVoice, MyDictate et NewtonDictate, développés par l’équipe du professeur Jan Nouza à l’Université technique de Liberec, ils peuvent écrire, utiliser des e-mails, Internet et Skype, et ceci uniquement par la voix. Dès le début de ce projet, Dita, accompagnée de son assistante, fait deux fois par semaine le déplacement dans la capitale pour animer ces cours.

Dita habite, avec ses parents et son frère, à Náchod, à quelque 150 km à l’est de Prague. Grâce aux logiciels de reconnaissance vocale, elle a pu passer le baccalauréat économique.

Dita Horochovská,  photo: www.polovinanebe.cz

« La semaine où j’ai passé mon bac a changé ma vie. Je me souviens exactement que le mercredi 1er juin, j’ai passé les examens. J’ai alors écrit à M. Nouza de l’Université de Liberec pour le remercier. Le même jour, le professeur Nouza a été contacté par Mme Rázková, l’initiatrice de ce projet. Elle lui a demandé s’il ne connaissait pas une personne handicapée qui utiliserait les logiciels développés par l’Université. Il a tout de suite pensé à moi. Comme par hasard, deux jours plus tard, Mme Rázková et son collègue sont venus dans ma ville pour installer le logiciel NewtonDictate sur les ordinateurs du tribunal. A cette occasion, nous nous sommes rencontrés et ils m’ont proposé le poste d’animatrice de ces cours pour handicapés. »

Pour Dita, la décision était évidente…

MyDictate

« Je n’ai pas hésité à accepter ce travail. C’était une chance énorme pour moi. A l’époque, j’avais pensé me reposer pendant un an avant de tenter une école supérieure, la préparation du baccalauréat m’a pris beaucoup de forces. Mais quand on m’a fait cette proposition, à laquelle je ne m’attendais absolument pas, je me suis dit que finalement, j’étais libre, j’ai accepté et c’est comme ça que tout a commencé. »

Dita Horochovská avoue avoir appris, toute seule, à maîtriser l’ordinateur en moins d’une semaine, alors que les cours gratuits qu’elle anime à Prague durent trois mois. Pendant deux mois, les participants se rencontrent régulièrement et travaillent, avec Dita et les autres membres de l’équipe, en groupe. Les trois dernières semaines de la formation sont réservées à l’apprentissage à domicile. Pour Dita, comme pour ses élèves, c’est du nouveau…

« Depuis toujours, je suis plutôt entourée de personnes sans handicap. Cela me convient mieux, avec eux, je ne me sens pas malade. Aussi, j’ai fréquenté des écoles ordinaires. Evidemment, les enfants m’enviaient certaines choses, le fait que j’avais une assistante qui écrivait à ma place par exemple. Mais je ne me sentais pas exclue. Ma famille, mes amis ne sont pas handicapés non plus. En effet, je me suis toujours senti plus à l’aise en compagnie de gens sans handicap. Maintenant, lorsque je travaille avec les handicapés, c’est une nouvelle expérience pour moi et c’est bien. J’ai désormais des copains aussi parmi les personnes handicapées. Ce qui facilite notre communication, c’est que nous avons beaucoup de choses en commun, nous partageons les mêmes expériences et nous le savons sans en parler, sans devoir expliquer. »

Ce travail a apporté encore une autre dimension à la vie de Dita :

Photo: www.polovinanebe.cz

« Je ressens une grande satisfaction. Et un sentiment d’autonomie que je ne connaissais pas auparavant. Désormais, je voyage toute seule, sans mes parents, je rencontre des gens et il n’y a que moi qui le sais. Je rentre chez moi et je sais qu’ils ne sauront que ce que je leur raconterai. Pour la première fois de ma vie, je peux avoir mes secrets. C’est peut-être un peu égoïste, mais ce sentiment d’autonomie est extrêmement important pour moi. »

Interrogée sur ses projets et rêves, Dita est tout aussi sincère. Elle voudrait continuer à animer les cours de travail à l’ordinateur et serait tentée par des études de psychologie. Ses rêves ? « Etre en bonne santé, mais c’est irréel », s’amuse-t-elle. Souffrant d’une tumeur bénigne située dans la colonne vertébrale, elle se réjouit du fait que son état se santé ne se détériore pas depuis plusieurs années. Ensuite, elle évoque quand même un souhait…

Photo: modranskenoviny.cz

« Je voudrais trouver un compagnon, connaître l’amour réciproque. C’est un autre avantage de ce travail : j’ai rencontré ici, dans les cours, des gens qui ont ou dont les amis ont trouvé des partenaires et fondé des familles malgré leur handicap. Heureusement, je ne suis pas dépressive, au contraire, on me dit souvent que je donne de l’énergie aux autres. Je ne pleure pas dans mon petit coin parce que je n’ai pas de copain. Seulement ici, grâce à ce travail, j’ai trouvé une motivation. Je vois qu’il pourrait un jour se passer quelque chose. »

Bien que condamnée au fauteuil roulant et ne pouvant bouger que sa tête, Dita a le don de faire étonnement vite oublier son lourd handicap. Cette jeune femme au rire pétillant, au maquillage et à la coiffure soignés, est par ailleurs une passionnée de Formule 1…

« Mon frère et ses copains, quand ils avaient autour de douze ans, ils venaient chez nous regarder les courses de Formule 1. Je regardais avec eux et j’adorais ça. Quand ils ont grandi, ils ont laissé tomber la F1, à part moi et mon frère. Il m’emmène souvent voir les courses à l’étranger. Là, par exemple, nous allons aller en Hongrie. Ces onze dernières années, je n’ai manqué aucune course à la télé. Mais tous les sports m’intéressent : le foot, maintenant, j’ai suivi le tournoi de Wimbledon, les championnats de hockey sur glace ne m’échappent pas non plus… Quant à la F1, je supporte l’équipe McLaren, alors j’ai leurs affiches partout dans ma chambre… On ne dirait vraiment pas que c’est une chambre de fille ! (rires) »

A savoir que Dita Horochovská a son propre blog que vous trouverez à l’adresse http://horochovska.blog.idnes.cz. Elle est également une fan du groupe slovaque No Name, dont voici un des titres….