Le programme d'aide aux publications Salda est entré dans sa quinzième année
Le programme d'aide aux publications Frantisek Xaver Salda a été créé par le ministère français des Affaires étrangères il y a quinze ans. Le programme qui porte le nom du grand critique littéraire tchèque a été conçu pour aider les éditeurs à augmenter leurs catalogues grâce à des subventions, leur permettre de publier plus de titres et, évidemment, aussi pour contribuer à la diffusion de la littérature et de la pensée françaises en favorisant l'aide à la publication et à la traduction de livres français. Aujourd'hui, le projet se poursuit, et les projets d'édition des ouvrages qui bénéficieront de subventions cette année ont été choisis. Ina Pouant, chargée de mission pour le Livre et l'Ecrit à l'Ambassade de France à Prague, est la principale animatrice du programme Salda, qui est, à son avis, très bien reçu par les éditeurs tchèques :
Sur quels genres de littérature ce programme met-il l'accent?
« Dans les grandes lignes de ce programme, tel qu'il est défini, on insiste plutôt sur la littérature et la philosophie contemporaines françaises et sur les débats d'idées contemporains. Néanmoins, on doit faire avec l'attrait du public et le choix des éditeurs. Je crois qu'il y a toute une littérature des années cinquante et soixante qui a tout d'un coup retrouvé le chemin du livre, je pense notamment à Jean Genet, à Henri Michaux aussi, qui ont été largement soutenus dans le cadre de ce programme. Maintenant il faut faire un petit peu plus pour promouvoir vraiment la littérature contemporaine comme Jean-Philippe Toussaint ou Laurent Mauvignier qui ont été soutenus l'année dernière. Pour l'année à venir, nous allons soutenir pour la première fois Marie Ndiaye, mais cette littérature contemporaine française reste quand même encore assez marginale. Cette année, nous avions 65 demandes et il n'y avait que Marie Ndiaye et Michel Houellebecq, donc seulement deux auteurs vivants de la littérature contemporaine française. »
Pouvez-vous nous donner plus de détails sur les ouvrages choisis cette année?
« Nous avons essayé quand même d'insister sur la littérature, donc les noms que je citais tout à l'heure, Marie Ndiaye, mais aussi un auteur peut-être oublié aujourd'hui en France comme Marcel Jouhandeau. Quand à Houellebecq, il est déjà connu dans une certaine mesure et nous ne lui apportons qu'une petite aide. Nous avons beaucoup soutenu la philosophie et l'histoire. Il y a encore de grands noms qui ne sont pas traduits, Michel Foucault notamment, même si ses livres plus anciens l'ont été, comme « Histoire de la folie ». Il manquait cependant le texte fondateur pour la pensée philosophique d'aujourd'hui « Naissance de la biopolitique ». Grâce à ce programme nous aiderons à la publication de ce livre en tchèque. »
Et encore une question plus générale : comment le livre français est-il reçu dans le milieu tchèque ?
« La littérature française continue à être vendue à l'étranger. Néanmoins, après « Le Nouveau roman », c'est ce qu'on dit souvent, la littérature française a été perçue comme trop formaliste, on estimait que certains auteurs se préoccupaient peut-être trop des questions d'écriture et peut-être moins des réalités sociales et des problèmes concrets comme la littérature anglo-saxonne. On dit souvent ici que la littérature française pose trop de questions et n'apporte pas de réponses. Je pense néanmoins que la production française est très riche et très variée, il y a du très bon et aussi du très mauvais, et on doit travailler à une meilleure diffusion et une meilleure prospection pour faire d'avantage connaître les auteurs qui peuvent être lus à l'étranger. »
Quelle est donc la position du livre français sur le marché tchèque ?
« D'après les chiffres qui datent de la fin de 2005, il y avait environ 15 000 livres édités et publiés en République tchèque dont 4000 traductions qui se partagent entre 45 langues différentes. Tout ce qui est traduit de l'anglais représente 2000 ouvrages, ce qui est traduit de l'allemand atteint à peine 1000 titres et le français arrive en troisième position avec 270 livres. Le but n'est donc pas évidemment de gagner la deuxième place, il faut être honnête et raisonnable, mais ne pas fléchir et maintenir cette situation, ce qui n'est pas forcément évident. »