La Callas et ses bijoux de scène s'exposent aux Pragois

Photo: www.upm.cz

« Maria Callas et Swarovski - Mes bijoux de scène », tel est le titre en français de l'exposition itinérante consacrée à la grande soprano Maria Callas et aux accessoires qui venaient compléter et parfaire les personnages qu'interpréta la diva. L'exposition s'est arrêtée pour un temps à Prague, au Musée des Arts et Métiers.

« J'ai trouvé la Giocunda, elle est très bonne et surtout... elle ne coûte rien ! », voilà ce qu'écrit en 1947 depuis New York le ténor Giovanni Zenatello dans son télégramme à Vérone, où suite à une série d'incidents, il faut trouver au pied levé une remplaçante à la chanteuse d'opéra en titre pour le Faust de Gounod, Renata Tebaldi. Hasard de l'existence, voilà qu'un simple remplacement scelle le début de la carrière fulgurante d'une inconnue, Maria Callas, fille d'émigrés grecs aux Etats-Unis. Dès le début, certaines voix critiques se font sévères : celle que l'on nommera plus tard « la Callas » n'aurait pas un timbre de voix d'une pureté sans faille. Aujourd'hui, on s'accorde pour dire qu'elle ne fut sans doute pas la cantatrice dont la voix était la plus parfaite, mais on lui reconnaît sans hésiter un mérite : celui d'avoir élargi la vision traditionnelle de l'opéra, en démontrant que si la voix comptait, le corps, le jeu de scène, l'incarnation des personnages valaient tout autant qu'au théâtre ou au cinéma. D'ailleurs, sa vie elle-même sera digne de celles de stars de cinéma hollywoodiennes, suivie et décortiquée par les journaux, de même qu'elle poussera son raisonnement à l'extrême en suivant une diète si drastique qu'elle finira par en affaiblir sa voix.

Ainsi, dans un souci de perfection dans l'interprétation de ses rôles, elle veillera aux moindres détails de sa parure, bijoux compris. Lors de ce premier grand rôle qui la lance à Vérone, sous le coup d'un caractère superstitieux, elle est persuadée que les bijoux qu'elle portait l'ont protégée et en fait rechercher les auteurs. Il s'agissait de l'atelier milanais Marangoni, spécialisé depuis l'après-guerre dans la confection de bijoux de scène, et dont le fournisseur principal était la société Swarovski. Swarovski, c'est une success-story version XIXe siècle : en 1892, Daniel Swarovski, Tchèque, fils d'artisan travaillant dans le verre, sentant le vent tourner, dépose un brevet pour une machine à tailler le cristal et le verre fonctionnant à l'électricité. Il fonde sa société trois ans plus tard dans les Alpes tyrolliennes, fondation qui signe le début d'une renommée qui sera mondiale.

Et bien que certaines parures soient en réalité composées de pierres taillées artificielles, Maria Callas voua une fidélité sans faille à l'atelier milanais et aux pierres Swarovski. Bousculant l'acception classique de la cantatrice dont seule la voix compte, la diva grecque compense les défauts de la sienne par une omniprésence visuelle, sur scène et dans les journaux aussi. Elle considère les bijoux comme faisant partie intégrante de son personnage : ainsi, lors de ses rares interprétations wagnériennes, lorsqu'elle joue dans Parsifal, elle porte sa couronne à l'envers, pointe vers le bas, pour indiquer son statut d'esclave.

Ornements qui complètent et enrichissent le caractère des personnages, les bijoux, qu'il s'agisse de colliers, broches, boucles d'oreilles, diadèmes ou autres ceintures, devaient néanmoins être pratiques, pour pouvoir aisément être enlevés entre deux scènes. Mais ils devaient aussi en imposer sur sa silhouette pour les spectateurs, sans pour autant lui ôter grâce et mobilité. Lorsqu'elle revient en Amérique, en 1956, après des années de carrière européenne, pour chanter l'un de ses rôles les plus aboutis, Tosca, elle est obligée d'ôter l'essentiel de ses bijoux qui brillent tellement qu'ils « aveuglent » les caméras de télévision...

L'exposition consacrée aux bijoux de scène de Maria Callas, c'est jusqu'au 26 mars, au Musée des Arts et Métiers de Prague.