Natalie Dessay, une diva en pleine évolution
Pour le concert inaugural du 25 septembre, le festival « les Cordes d'automne » a invité la célèbre soprano française Natalie Dessay. Elle donnera un récital au Théâtre des Etats à Prague avec la Philharmonie de chambre de Prague sous la direction de Michel Swierzewski. Quelques jours avant son concert la diva, simple, charmante et décontractée, a bien voulu répondre aux questions de Vaclav Richter.
Quel répertoire avez-vous préparé pour le récital de Prague?
"Le répertoire français et italien, avec des airs d'opéras français comme Manon, Ophélie, ou "La Fête du village voisin" de Boieldieu, l'air qui n'est pas connu, et en deuxième partie, "I Capuletti e Montecchi" de Bellini et la scène de la folie de "Lucia di Lammermoor" de Donizetti."
C'est le répertoire courant que vous chantez ou c'est assez exceptionnel?
"Non, je fais très peu de concerts mais c'est un programme que j'ai donné deux ou trois fois déjà."
Vous avez commencé comme une soprano colorature mais depuis votre voix a évolué. Dans quel sens?
"Maintenant disons que je suis plus soprano lyrique léger. Donc je vais vers un répertoire un peu plus lyrique comme par exemple "Manon" (Massenet) ou "Roméo et Juliette" (Gounod)."
Cette évolution continuera. Jusqu'où peut-elle encore continuer?
"Je ne crois pas que je vais devenir mezzo-soprano, non. J'aimerais bien avant d'arrêter de chanter pouvoir jouer une fois La Traviata."
Vous travaillez avec de grands chefs d'orchestre et aussi avec de bons metteurs en scène. L'opéra a beaucoup changé. Ce sont surtout les metteurs en scène qui ont révolutionné l'opéra. Aimez-vous les mises en scène modernes? Arrivez-vous à vous identifier avec les conceptions modernes de certains metteurs en scène?
"Oui. Que ce soit moderne ou pas moderne, le problème n'est pas là. Ce qui est important pour moi c'est que cela ait le sens et qu'on raconte tous la même histoire. Que ce soit très très moderne comme Arianne à Naxos qu'on avait fait à Salzbourg et qui est pour moi une des plus belles production qui s'est jamais faite, ou que ce soient des mises en scènes plus conventionnelles et plus traditionnelles sur le plan esthétique comme par exemple Hamlet qu'on a fait à Barcelone et à Covent Garden, ce qui compte, c'est la direction d'acteurs et le sens que tout cela revêt. Je me demande toujours et je trouve qu'un metteur en scène doit se poser toujours la question: "Pourquoi faisons-nous cet opéra aujourd'hui? Qu'est ce que nous dit aujourd'hui cet opéra-là? Comment est-ce que on peut le relier à ce que nous vivons aujourd'hui ?" Si l'on ne se pose pas cette question alors cela devient un problème."
Aimeriez-vous chanter aussi de la musique moderne?
"Ce n'est pas que je n'aime pas la musique moderne, c'est que je la trouve extrêmement difficile. Difficile à travailler, difficile à apprendre. Moi je ne suis pas une très extraordinaire lectrice, par exemple, alors je ne peux pas me permettre de passer un an à apprendre une partition pour la jouer trois fois. Je ne peux juste pas. J'ai essayé par exemple d'apprendre "Lulu" d'Alban Berg qui est un opéra absolument magnifique et un rôle extraordinaire, mais je n'ai pas réussi, c'est difficile pour moi."
Comment appréciez-vous la salle où vous allez chanter? C'est le théâtre où Mozart a donné la première de Don Giovanni.
"D'abord je suis très émue que ce soit ce théâtre-là, mais je ne le connaît pas. Je n'y suis jamais allée, mais je suis très très curieuse de le voir. Michel (Swierzewski), m'a dit que c'était une acoustique merveilleuse. Maintenant ce qui guide le choix de mes concerts ce sont aussi les acoustiques, parce qu'une acoustique peut absolument tout changer en terme de plaisir."