Palmarès des 20èmes « Molières tchèques »

Jana Hlaváčová, photo: CTK

Tout comme dans le domaine du cinéma, il existe, en République tchèque, deux prestigieuses récompenses : les prix Alfred Radok, attribués par la critique, et les prix de l’Association des comédiens tchèques, plus médiatisés et qui portent le nom de la Muse Thalie. Samedi soir, ils ont été distribués au Théâtre national de Prague, récompensant, pour la toute première fois, les marionnettistes ou encore Jana Hlaváčová qui est, sans exagération, une des plus grandes actrices tchèques.

Jana Hlaváčová,  photo: CTK
C’est en 1959 que Jana Hlaváčová, ravissante, aux cheveux bruns bouclés et pleine de tempérament, apparaît pour la première fois sur le grand écran, dans le rôle d’une jeune vamp dans la comédie « Kam čert nemůže ». Récompensée par le Prix Thalie pour l’ensemble de sa carrière, la comédienne a campé depuis des dizaines de rôles au cinéma, à la télévision et sur les planches, notamment au Théâtre national de Prague. Jana Hlaváčová y a joué pendant plus de vingt ans, jusqu’en 1994, et ceci aux côtés de son compagnon Luděk Munzar, lui aussi un acteur marquant de sa génération. Elle a été Ranevskaïa dans « La Cerisaie » d’Anton Tchekhov ou Emilia Marty dans « L’affaire Makropulos » de Karel Čapek. Jana Hlaváčová qui fête ce mardi ses 75 ans, a récemment parlé à la télévision de ses débuts au Théâtre national, ainsi que de la magie de cette « Zlatá kaplička », la « chapelle d’or » comme on appelle la première scène du pays :

« J’étais stressée par le fait de me retrouver parmi les vedettes du Théâtre national de l’époque, parmi tous ces bardes, parmi toutes ces célébrités au sens propre du mot, elles n’avaient rien à voir avec les célébrités d’aujourd’hui. Je les observais, je les admirais et aussi j’observais Luděk, j’aimais sa façon de jouer, je voulais être comme lui. Mais un jour, il m’a dit : ‘Ecoute, sois naturelle, fidèle à toi-même ! Tu es émotive, alors sois émotive, c’est beau et original.’ (…) Ce que j’ai appris par la suite, c’est que sur cette scène, dans ce grand espace, on ne pouvait pas faire de gestes inutiles. Au lieu d’en faire dix, il vous faut en choisir un seul, mais un significatif. »

Richard Krajčo,  photo: CTK
Parmi les autres lauréats des « Molières tchèques » figure Richard Krajčo. Le comédien, chanteur et leader du très populaire groupe Kryštof a reçu le prix d’interprétation masculine pour le rôle de Danny dans le drame américain « Pluie d’enfer » de Keith Huff. Ce face-à-face entre deux flics de Chicago est joué à Ungelt, une scène intimiste au centre de Prague.

Gabriela Míčová,  photo: CTK
Gabriela Míčová, distinguée, quant à elle, par le prix d'interprétation féminine, a déjà reçu plusieurs récompenses pour son rôle de la prostituée Romi dans la pièce de l’Allemand Reiner Werner Fassbinder intitulée « Les ordures, la ville et la mort ». Mis en scène, en 2012, au théâtre pragois Komedie par Dusan Pařízek, la pièce a été aussitôt adaptée au cinéma, avec les mêmes comédiens, par le réalisateur Jan Hřebejk qui a ainsi voulu immortaliser une des meilleures troupes pragoises, dissoute en 2012 puisque non subventionnée par la municipalité.

Spejbl et Hurvínek,  photo: CTK
Un autre théâtre pragois, celui de marionnettes cette fois-ci, et qui souffre de sous-financement de la part de la mairie, a été honoré par l’Association des comédiens. Ce sont ses deux principaux protagonistes en personne, les marionnettes Spejbl et Hurvínek, devenues un véritable phénomène dans le pays depuis leur création il y a plus de 60 ans par Josef Skupa, qui ont reçu, lors de la cérémonie, le prix Thalie au nom de toute la compagnie. Eh oui, la marionnette, genre qui a rendu la République tchèque célèbre dans le monde entier, a enfin été distinguée, elle aussi, par les professionnels du théâtre, au côté du théâtre dramatique, de l’opéra, du ballet et de la comédie musicale. Ainsi, un autre prix Thalie est revenu au metteur en scène Josef Krofta qui a fait le tour du monde avec son théâtre de marionnettes DRAK de Hradec Králové. C’est ainsi qu’il a rendu hommage à son métier :

« Ce prix appartient également à tous ceux qui voient dans la marionnette un partenaire et non pas une sorte de succédané. En fait, tous mes spectacles ont été dédiés aux enfants. Et c’est un public merveilleux, incomparable avec celui d’adultes, abruti par la télévision. Les enfants, vous pouvez les faire participer au processus de création, car ils sont encore capables d’imaginer. Je déteste les mises en scènes où vous avez une table et un fourneau. Je préfère prendre une boîte et faire croire que c’est un fourneau. Les enfants vont comprendre, les adultes vont vous regarder bêtement et vont s’ennuyer. Mais il est vrai que nos meilleurs spectacles ont plu à tous le monde, aux enfants comme aux adultes. »