Potštejn, un château aux origines françaises

Le château baroque de Potštejn, érigé en 1749 en Bohême orientale par Jean-Louis de Harbuval-Chamaré, un comte aux origines françaises, est la destination de ce nouveau guide touristique sur Radio Prague. La copropriétaire actuelle du château de Potštejn, Kateřina Skalická est au micro de Radio Prague pour une petite visite guidée.

Potštejn est un village de 900 habitants, à 130 km à l’est de Prague, près de la ville de Hradec Králové. A ses visiteurs, il offre trois monuments intéressants : l’église Saint-Laurent, une pittoresque résidence baroque, et les ruines d’un château-fort fondé au XIIIe siècle et racheté en 1746 par Jean-Louis de Harbuval-Chamaré. Issu de la famille d’Artois, ce comte au service de l’Autriche s’installe en Bohême orientale après une guerre perdue contre la Prusse. La même année 1746, le nouveau propriétaire du domaine de Potštejn conçoit la construction d’un château baroque de deux niveaux disposé autour d’une cour carrée et recouvert d’un toit mansardé. Kateřina Skalická revient sur l’histoire du site :

« Le château a été construit en 1746 par le comte Chamaré. Les travaux ont pris fin en 1755, sans vraiment s’arrêter entièrement depuis : le château est en construction et reconstruction permanente pratiquement jusqu’à présent. Une curiosité s’attache à son premier propriétaire : Jean-Louis Chamaré a fondé à Potštejn une manufacture du textile qui exportait ses produits vers le monde entier, jusqu’en Amérique. Il a aussi pratiqué l’élevage du bombyx du mûrier. La famille Chamaré reste présente pendant plus de cent ans à Potštejn, avant de s’éteindre par la ligne masculine. Ensuite, c’est la famille Dobrzensky de Dobrzenic qui lui succède, par le mariage d’Elisabeth Chamaré, héritière du domaine. La famille Dobrzensky réside à Poštejn jusqu’en 1945, lorsque les biens familiaux sont confisqués conformément aux décrets du président Beneš. »

En achetant en 2004, le château de Potštejn, les parents de notre guide, Kateřina Skalická, ignoraient ce qui les attendait : plus de 40 ans, entre 1948 et 1989, le château a servi de centre de formation du mouvement syndical révolutionnaire, le fameux ROH. Des interventions peu respectueuses ont changé les plans d’origine, les salles ont été divisées en petites pièces, le mobilier a été endommagé et volé. La seule chose qui se soit conservée de l’aménagement intérieur : trois lustres en cristal dans la grande salle en marbre.

Il n’empêche qu’en 2006, le château ouvre ses portes au public. Trois ailes se visitent aujourd’hui. Depuis 2010, on peut aussi se promener dans le parc du château rénové grâce aux dotations de l’Union européenne. En très peu de temps, les nouveaux propriétaires ont réussi l’impossible : le château restauré propose des événements culturels et toute sorte d’attractions comme des visites nocturnes en costumes baroques et des circuits de visites pour les enfants aux motifs de contes de fées. Il propose aussi un hébergement au château. Un café accueillant est ouvert depuis 2011 au rez-de-chaussée. Pendant notre visite, nous admirons le mobilier qui faisait défaut, auparavant. Certains meubles proviennent des dépôts, mais la plupart d’entre eux sont des répliques de meubles d’époque:

« Dans les archives de Zámrsk, nous avons trouvé des dessins et des photos qui nous ont permis de reconstituer l’aménagement des salles dans leur style d’origine. Ainsi, par exemple, les chaises ont été faites en Chine où la production revient moins cher. Certains autres objets, comme des armoiries et des montres, ont été découverts dans des greniers, chez des habitants du village. C’est logique, car les derniers propriétaires du château, les Dobrzensky, n’ont rien pris lors de leur départ, ils ont tout laissé ici. »

Durant notre visite, nous pouvons admirer aussi le salon de musique et les pièces aménagées comme des chambres d’enfant racontant l’histoire des jouets. En 2011, 3 500 enfants les ont visitées, sur un nombre total de 21 000 visiteurs du château. Dans le cabinet de travail, nous nous arrêtons devant le portrait de François Henri Dobrzensky surnommé Toši, le dernier qui ait vécu au château de Potštejn. Aventurier bohème, marié quatre fois, amateur de bons vins, de cigares et de voitures rapides, il s’est tué à l’âge de 38 ans, lors d’une course automobile :

« L’épouse de Toši, Genilde Kinska accouche ici, au château de Potštejn, de leur premier fils, Václav. Mme Kinska qui a aujourd’hui 90 ans et qui vit à Bonn, nous a beaucoup aidés, par ses conseils, à redonner aux salles du château leur aspect d’origine, à les aménager de façon authentique. Václav est mort, en 2003. En son honneur, une messe de requiem a été célébrée au château, en 2007, à laquelle nous avons invité l’archevêque Dominik Duka, le prince Karel Schwarzenberg, ainsi que des représentants de familles aristocratiques de Bohême orientale comme la comtesse Kinska, Eleonora Dujková de Doudleby, et d’autres encore. »

Le boudoir de la comtesse Mary Dobrzenska, mère de Toši, fait partie des salles les plus intéressantes du château. Il y a des robes authentiques de la comtesse, ses chemises de nuit richement brodées, ainsi que les vêtements de cavalière qu’elle portait, y compris le pantalon et le chapeau. Mécène et aussi femme de lettres, Mary Dobrzenska s’est liée d’amitié, en 1915, avec Sidonie Nádherná et cette dernière a fait venir au château de Potštejn l’écrivain Karl Kraus et le poète Rainer Maria Rilke.

Et nous voilà devant le portrait de la famille Chamaré. Kateřina Skalická raconte :

« On y voit le célèbre chercheur de trésors, Jean-Antoine Chamaré, celui même que le romancier Alois Jirásek a immortalisé dans son roman ‘Le Trésor’. Jean-Antoine, fils du fondateur du château baroque de Potštejn, a consacré plus de 25 ans de sa vie à la recherche du trésor des Templiers qui auraient dû se cacher dans les murs du vieux château-fort, comme il l’espérait d’après une inscription en latin mal interprétée par lui. Selon certaines sources, il a fini par le trouver car peu après, il a fait ériger un château à Nové Hrady, non loin d’ici. Une chose est certaine : aucun trésor n’a été retrouvé à Potštejn. Après les recherches, le vieux château-fort est tombé en ruines. Ses pierres ont été transportées dans le parc de la nouvelle résidence baroque où tout un mur a été édifié avec elles. »

Notre guide nous montre un sofa dont elle est très fière, car c’est un objet authentique retrouvé dans les dépôts et ayant appartenu au chercheur de trésors, le légendaire comte Chamaré. Notre visite continue dans la chapelle de la Sainte-Trinité qui a elle aussi une particularité : la fenêtre en face de l’autel donne sur l’église Saint-Laurent voisine.

La pièce la plus précieuse du château de Potštejn est la grande salle en marbre dont le plafond est orné de stucs rococo. « Cette salle est la raison pour laquelle notre famille a décidé d’acheter le château, » sourit Kateřina Skalická, en précisant que les travaux de restauration ont pris un an et les trois lustres en cristal dans cette salle sont les seuls objets authentiques qui se soient conservés :

« On y donne des concerts, on y organise diverses manifestations, on y célèbre des cérémonies de mariage : 33 couples s’y sont mariées, en 2011. Tous les mois, pendant la saison estivale, la salle accueille un événement culturel, comme le Festival de marionnettes qui rend hommage au grand marionnettiste tchèque du XIXe siècle, Matěj Kopecký, comme par exemple aussi les Festivités d’été ou encore Le Salon du vendredi qui a lieu le dernier vendredi du mois et qui est consacré à des débats sur différents thèmes, en présence de personnalités connues. »

Et les projets d’avenir ? En plus de nouvelles attractions comme le lâcher de ballons à air chaud dans le parc à la mémoire du comte Chamaré qui fabriquait ce genre de ballons dans ce château devançant de quelques années un spectacle similaire organisé en 1791 à l’occasion du couronnement du roi Léopold, Kateřina Skalická rêve d’ouvrir une station thermale à Potštejn :

« Une station thermale se trouvait autrefois à Potštejn. J’ai l’impression que les gens, aujourd’hui, l’apprécieraient. Le rythme de la vie est de plus en plus rapide et il faut savoir se reposer. Je voudrais proposer des cures agréables, mettre à profit des expériences acquises en Inde où j’ai vécu pendant plusieurs années. Ainsi, je voudrais proposer du yoga, de la relaxation, des plantes médicinales, voilà mon idée. »

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