Saint Venceslas - patron des pays tchèques

Saint Venceslas

Bien que la capitale tchèque, Prague, vive, ces jours-ci, sous le signe des assises des banquiers et des manifestations de protestation contre la mondialisation, le reste du pays s'est réveillé, ce jeudi, dans une journée fériée. Après des décennies, le 28 septembre, jour de la mort tragique de saint Venceslas, patron des pays Tchèques, a été codifié comme fête nationale. Une occasion pour Radio Prague de vous proposer un programme spécial consacré à ce grand personnage de l'histoire de Bohême. Le choral que vous venez d'entendre n'est pas un choral comme les autres. Il est sacré pour les Tchèques qui l'ont fait retentir chaque fois que leur pays était en péril. Ils s'y adressent à leur patron surtout dans les moments les plus difficiles, mais aussi lorsqu'ils viennent de sortir d'une période ténébreuse. Les Pragois ont encore en vive mémoire qu'ils l'ont chanté lors des moments agités où l'on commençait à compter les dernières heures du régime communiste. Le patron dont il est question est le prince Venceslas, de la dynastie des Premyslides, l'un des souverains qui posèrent les bases de l'Etat tchèque. C'est peu après sa mort que les Tchèques ont commencé à prendre Venceslas pour un martyr et pour leur patron. En dépit du fait que sa vie et son règne ont été très courts. Il existe, en République tchèque, plus de 300 églises consacrées à saint Venceslas. On en trouve aussi en Europe et en Amérique. Il est, d'ailleurs, le seul saint tchèque connu à l'étranger. La preuve en est le très populaire cantique de Noël - Good King Venceslas, cantique d'origine tchèque, très répandu en version anglaise dans le monde anglophone. Il est, aujourd'hui, difficile, voire impossible, de reconstituer avec exactitude la vie de saint Venceslas. Les mentions historiques sont sporadiques et la réalité s'y confond souvent avec la légende. Astrid Hofmanova esquisse pourtant un tableau du prince que les historiens trouvent relativement réaliste.

Venceslas était le fils du prince Vratislav de Bohême et de son épouse Drahomira. Selon une vieille tradition, il est né autour de l'année 907 à Stochov près de Libusin et avait quatre soeurs et deux frères, dont le frère cadet, Boleslav, atteindra à sa vie. Vaclav a été baptisé par un prêtre slave, tout probablement l'un des disciples de l'apôtre Méthode, et toute son éducation a eu lieu dans l'esprit du christianisme, grâce surtout à sa grand-mère Ludmila. Plus tard, son père l'envoie à Budec, l'un des plus anciens centres du christianisme de Bohême, où, auprès de l'église Saint-Pierre, un lycée a été fondé où l'on enseignait le latin. Là, le jeune Vaclav a reçu une formation dont ni les souverains de grandes nations, ni les voisins allemands ne pouvaient se vanter à l'époque. Grâce au lycée, Vaclav a compris les principes et le rôle des Evangiles pour appliquer leurs idées généreuses à la vie. Mais il ne se doutait pas que sa foi ne serait pas comprise par ses proches, ni par le peuple, et qu'elle lui ferait autant d'ennemis. A l'époque, elle a été considérée en effet comme une faiblesse, une incapacité de régner comme il faut, d'où un grand conflit est né entre Venceslas et son environnement. En 921, Vratislav meurt prématurément et c'est sa femme Drahomira qui assume le pouvoir. Mécontente de l'inclination de son fils pour les études, la religion et les choses spirituelles, Drahomira travaille pour que le gouvernement du pays devienne plus pragmatique ou matérialiste, si vous voulez. Elle va si loin dans ses efforts que même ses partisans les plus fidèles ont peur du prochain cours des affaires. Pour protéger Venceslas, ils l'envoient chez sa grand-mère Ludmila, cette décision ne faisant qu'attiser la haine de Drahomira à l'égard de sa belle-mère. Le conflit entre les deux femmes prend fin dans la nuit du 15 septembre 921, où Ludmila est étranglée sur l'ordre de Drahomira.

Le duc Arnulf de Bavière profite du chaos au Royaume de Bohême pour l'envahir au printemps 922. Lorsque Venceslas accède au trône, autour de 924, le pays est non seulement divisé en plusieurs camps ennemis, mais il est menacé aussi de l'extérieur. A part Arnulf de Bavière, c'est notamment Henri 1er l'Oiseleur qui renforce son pouvoir en Allemagne voisine et menace d'envahir la Bohême. C'est le moment où Venceslas se présente comme un souverain éclairé préférant la paix à la guerre ; dans un pacte de non-agression, chose inhabituelle à l'époque, il s'engage à payer 500 talents d'argent et 129 boeufs par an. Au Moyen Age, où les conflits se solutionnaient par la guerre et la violence, cette position est restée incomprise. Sans compter les ennemis, beaucoup de compagnons de Venceslas, y compris son frère Boleslav, avide du pouvoir, s'y sont opposés. Plus tard, grâce à des contacts personnels, Henri 1er l'Oiseleur a l'occasion de connaître la générosité et la sagesse de Venceslas et fait de lui l'un de ses conseillers. En signe de reconnaissance, il lui offre en cadeau la relique du bras de saint Guy pour l'église que Venceslas fait construire à Prague à l'époque.

Venceslas était un prince éclairé, il a non seulement transformé la société tchèque, plus ou moins païenne, en une société nouvelle, imprégnée d'idées chrétiennes, réformé la jurisprudence moyenâgeuse en réduisant le nombre de peines capitales ou la torture, mais il était avant tout un homme pieux qui aidait les nécessiteux et défendait les faibles. Au Château de Prague, il a fait achever la construction de l'église Saint-Georges et construire la cathédrale Saint-Guy. Il voulait que Prague devienne le siège de l'épiscopat.

Malheureusement, le jeune prince ne devait diriger le destin de son pays que pour une courte période. Certains seigneurs ont profité des ambitions de pouvoir de son frère Boleslav pour tramer une conspiration. Ils ont décidé d'éliminer Venceslas et ont choisi comme lieu de crime la ville de Stara Boleslav non loin de Prague. Le 27 septembre, ils l'ont invité à la fête des patrons de l'église locale. Sans se soucier des avertissements de ses compagnons, Venceslas, sans arme, s'est rendu à la messe solennelle. Sur la route, il s'est fait agresser par son frère Boleslav mais Venceslas a réussi à le désarmer. C'était donc les compagnons de Boleslav qui devaient achever l'oeuvre de la ruine, en assassinant Venceslas devant la porte d'entrée de l'église. C'était le 28 septembre 929 ou 935, on ne le sait pas exactement.

Trois ans après l'assassinat de Venceslas, Boleslav, repentant, fait transporter la dépouille de son frère de Stara Boleslav à Prague où il gît dans la rotonde Saint-Venceslas de la cathédrale Saint-Guy.

Le prince Venceslas est mort non seulement comme victime des ambitions de pouvoir de son frère mais surtout comme promoteur du christianisme en Bohême, dont les bases avaient été fondées par les apôtres Cyrille et Méthode. Sans le vouloir, les assassins ont donné au peuple tchèque un saint martyr. Au lendemain de la mort de Venceslas, son règne spirituel s'éternise dans les pays tchèques, qui dure depuis un millénaire déjà.

Auteurs: Astrid Hofmanová , Jan Uhlir
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