Transports : rififi à propos de l’autoroute inachevée D8

'Dál nic', photo: Pink Productions

Des scientifiques de l’Académie des Sciences de République tchèque s’offusquent de la façon dont le ministre des Transports Dan Ťok interprète leur rapport sur l’éboulement qui a conduit en 2013 à l’interruption des travaux de l’autoroute D8, qui doit relier Prague à Ústí nad Labem. Ils estiment que le ministre fait une lecture biaisée de ce document, en faisant porter toute la responsabilité du glissement de terrain sur une carrière située non loin du lieu de l’incident.

'Dál nic',  photo: Pink Productions
L’information, qui s’inscrit dans la longue liste des polémiques qui entourent la construction de l’autoroute D8, est rapportée par le quotidien économique Hospodářské noviny. La construction de cette autoroute, qui doit à terme relier la capitale tchèque à la ville de Dresde en Allemagne en passant par Teplice, a débuté il y a plus de 25 ans puisque le premier tronçon a ouvert en novembre 1990.

A l’instar de ce qui passe pour le reste du réseau autoroutier tchèque, les travaux ont pris beaucoup de retard, notamment en raison des démarches de militants écologistes pour que le tracé retenu ne passe par la zone naturelle protégée répondant au nom de České středohoří. Cette lutte a fait l’objet d’un documentaire réalisé par Ivo Bystřičan et répondant au nom de « Dál nic » (« Plus loin rien », jeu de mot avec le terme « dálnice » qui signifie « autoroute »).

Le cinéaste débute son tournage dans années 2000, quand il restait seulement ce tronçon à construire pour achever l’autoroute. Sur Radio Prague, il expliquait lors de la sortie de son film : « Je pensais que construire 15 km d’autoroute pouvait durer longtemps, mais qu’ils n’en construisent que la moitié en sept ans, personne ne pensait cela possible, ni moi, ni les constructeurs, ni les écologistes, ni les habitants locaux. »

Outre le combat, en particulier juridique, des écologistes, c’est l’éboulement d’une colline qui a raison en 2013 de l’avancée des travaux. Le débat se porte donc aujourd’hui sur la cause de cet incident. « En tant que les auteurs du rapport sur cet éboulement, nous ne pouvons pas être d’accord avec les sorties unilatérales actuelles du ministre des Transports, qui désigne comme seul coupable de l’éboulement de l’autoroute D8 la carrière de Dobkovičky », indique Josef Stemberk. Le chercheur indique que si M. Ťok ne revient pas sur son interprétation, il devra publiquement la désavouer. Anciennement responsable de la construction de fameux tronçon, Miloslava Pošvářová considère que si la carrière a peut-être une part de responsabilité, elle n’est certainement pas la seule coupable du glissement de terrain.

Début juin, la Direction des routes et autoroutes ainsi que l’Administration des voies de chemin de fer ont pourtant déposé une plainte contre Kámen Zbraslav, société qui est propriétaire de la carrière. La plainte se base justement sur l’interprétation du rapport des chercheurs, qui mettrait en cause l’entreprise, laquelle réfute les allégations du ministère. Ministère qui estime les dommages causés par l’éboulement à environ un milliard de couronnes, quelque 37 millions d’euros.

Par ailleurs, M. Ťok affirme à qui veut l’entendre que l’autoroute D8 sera mise en service dans son intégralité avant la fin de cette année 2016.