Un voyage dans l'histoire du livre

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En 1998, le bibliothécaire et antiquaire Petr Voit commence à réunir les documents pour un ouvrage sur l'histoire du livre. L'ouvrage qui, au départ, ne devait avoir que des dimensions modestes provoquera ce qu'on appelle « l'effet boule de neige ». Il ne cessera de gonfler, de s'agrandir, de prendre de nouvelles dimensions et finira par étonner l'auteur lui-même. En 2006, Petr Voit publiera aux éditions Libri « L'Encyclopédie du Livre », oeuvre monumentale qui éclipsera par l'ampleur de sa conception d'autres ouvrages tchèques du même genre. L'Union des interprètes et traducteurs attribuera à l'encyclopédie le prix « Dictionnaire de l'année 2007 ».

Il fallait énormément de persévérance et d'enthousiasme pour mener à bout ce projet ambitieux. Il aurait fallu confier la réalisation de cet ouvrage à toute une équipe de chercheurs. « L'Encyclopédie du Livre » est pourtant l'oeuvre d'un seul homme. Petr Voit précise :

« Je dois dire d'abord que dans le monde il y a des livres semblables et dans chaque nation on en trouve plus qu'un seul ouvrage comme chez nous. Le problème est ailleurs. Partout ailleurs, les livres de ce genre sont des oeuvres de collectifs d'auteurs travaillant dans des universités ou dans d'autres établissements d'enseignement supérieur. Ces projets bénéficient de subventions. Chez nous, cette encyclopédie n'a été créée que par un seul auteur. Je fais partie d'une équipe qui n'a qu'un seul membre. »


Déjà l'aspect extérieur du livre éveille le respect. Le volume pèse 5,5 kilogrammes et réunit, sur 1350 pages 2420 articles dont la majorité accompagnée d'un répertoire de sources tchèques et étrangères. L'auteur cite quelque 6000 ouvrages spécialisés. Le lecteur y trouve également 500 illustrations en noir et blanc et une centaine de reproductions en couleurs. L'encyclopédie couvre l'histoire du livre pendant trois siècles et demi. Au début les intentions de Peter Voit ont été beaucoup plus modestes :

« D'abord, je ne voulais écrire que des polycopiées d'histoire du livre et mes premières intentions ont donc été beaucoup plus modestes. Mais le sujet du livre prenait de plus en plus d'ampleur, et il est devenu pratiquement impossible d'en faire de simples polycopiées. Alors, j'ai divisé le texte en articles selon les notions, et puis je me suis rendu compte que beaucoup de notions y manquaient. Alors, je me suis mis a ajouter des thèmes et des articles, jusqu'à parvenir, si je ne m'abuse, à un texte couvrant 5500 pages dactylographiées. »


Pour un lecteur averti, il sera sans doute difficile de trouver un thème ou un problème concernant l'histoire du livre entre la moitié du XVe et le début du XIXe siècle qui ne seraient pas traités et expliqués dans cet ouvrage.

« Le livre commence dans la moitié du XVe siècle, mais couvre des périodes précédentes par exemple la technique d'impression en planche. Et puisqu'il est question aussi du papier, il revient jusqu'au VIe siècle afin de rétablir le contexte historique de façon homogène. Depuis le début de ma vie professionnelle, donc après mes études universitaires, j'ai eu la grande chance de ne faire rien d'autre que de travailler avec des livres anciens. A partir de 1980, j'ai donc quand même ramassé certaines expériences. »

L'ampleur des connaissances réunies dans « L'Encyclopédie du Livre » est impressionnante. Imprimeurs, éditeurs, libraires, illustrateurs, cartographes et relieurs défilent en foule devant le lecteur. Il apprend également la terminologie de nombreux domaines et de nombreuses disciplines liés au livre: fabrication du papier, métier de fondeur en caractère d'imprimerie, impression de livres, techniques graphiques, art d'illustration et de reliure, commerce de livres, noms d'institutions, de ville et de pays ayant joué un rôle dans l'évolution du livre. Jan Voit est loin de se limiter à l'histoire du livre tchèque. Il conçoit son encyclopédie dans le contexte européen et même mondial et n'oublie pas d'y ajouter des articles concernant l'Asie, l'Afrique et l'Amérique Latine.


Parmi d'innombrables informations que le lecteur trouve dans l'encyclopédie, il y a également celle sur le premier livre tchèque. Le premier livre imprimé en Bohême a vu le jour dans la ville de Plzen, après 1476. En cette année, on y a imprimé la Chronique troyenne, version tchèque d'un roman chevaleresque écrit au XIIIe siècle par Guido de Columna. Il ne s'agit donc pas, comme on pourrait s'y attendre, d'une bible, d'un livre de prières, d'un psautier. L'histoire du livre tchèque s'ouvre par l'impression d'un ouvrage profane, d'une prose qui raconte les exploits de chevaliers. Pour certains chercheurs, l'année 1476 n'est pas cependant la date définitive. Ils repoussent la date de l'impression de ce livre jusqu'à 1468, ce qui situerait les pays de la Couronne tchèque à la troisième ou quatrième position en Europe, derrière l'Allemagne, patrie de l'imprimerie (1447), l'Italie (1465), éventuellement la Suisse (1468). Pour connaître la réponse à la question, quand a vu le jour le premier livre tchèque, il faudra donc attendre quelque temps, parce que les recherches sur cette question ne sont pas encore achevées. Les derniers travaux des chercheurs démontrent qu'avant la fin du XVe siècle, on a créée dans les pays de la couronne de Bohême 65 incunables, c'est à dire des ouvrages imprimés antérieurs à 1500. Les premières imprimeries ont été fondées à Plzen, mais aussi à Prague, Vimperk, Kutna Hora, Brno et Olomouc.

C'est donc à cette époque que commence l'histoire du livre imprimé, épopée qui accélérera d'une façon prodigieuse la diffusion des idées dans le monde et finira par transformer la civilisation humaine. C'est grâce à ces premières tentatives des imprimeurs du XVe siècle que le bibliothécaire et chercheur Petr Voit pourra publier, au début du troisième millénaire, sa monumentale « Encyclopédie du Livre. »