Vaclav Havel, le premier invité du projet « Une année avec la culture juive »

La synagogue Espagnole

« Ma rencontre avec le judaïsme » - sur ce thème, l'ancien président Vaclav Havel, s'est confié, mercredi soir, devant un public passionné ayant rempli jusqu'à la dernière place la synagogue Espagnole de Prague.

La confession de Vaclav Havel s'inscrit dans le cadre d'un cycle de soirées organisées par le centre culturel du Musée juif de Prague. Vaclav Havel est l'un des patrons du projet intitulé « Une année avec la culture juive » lancé par le Musée juif de Prague à l'occasion du 100e anniversaire de sa fondation. Comment s'est présentée la rencontre de Vaclav Havel avec le judaïsme ? Ecoutons ses souvenirs d'enfance :

« Une légende qui est vrai à 99,9% vivait dans notre famille : elle était liée à la villa que mon oncle, le magnat du cinéma, Milos Havel, s'était faite construire à Barrandov. Après la guerre, la villa a été confisquée, mon oncle arrêté, lors d'une tentative de fuite à Vienne, et emprisonné. La villa est devenue une résidence de l'ambassadeur d'Israël. Le régime a omis d'éliminer de la grande salle le portrait de mon oncle qui couvrait tout un mur. Et c'est ainsi que, lors d'une fête à laquelle toute la représentation communiste d'alors était invitée, le président Gottwald portait des toasts à la santé de l'amitié tchécoslovaco-israélienne, en s'adressant à ce portrait dont il supposait que c'était Ben Gourion, ignorant que c'était mon oncle, alors prisonnier dans les mines d'uranium de Jachymov, en Bôheme. »

Vaclav Havel,  photo: CTK
Vaclav Havel a aussi évoqué le rapport du milieu dans lequel il grandissait, sous la Première république, avec la communauté juive :

« Le rapport avec les Juifs, que j'ai observé dans le milieu dont je suis issu, était un peu particulier : je ne l'appellerais pas « antisémitisme », on parlait toutefois des Juifs d'une autre manière, comme d'une nation qui possède ses caractéristiques, autres. La façon dont l'élément juif était perçu, avant la Deuxième Guerre, je dirais que c'était une certaine distance sociale - les commerçants juifs étaient des gens riches, donc pas du tout de diférence raciale, ce n'était pas un sentiment de supériorité, mais celui d'une certaine différence. »

Plus importants que ses souvenirs d'enfance sont ceux qui sont liés à sa présidence de l'Etat tchèque, souligne Vaclav Havel :

« Au moment du rétablissement des rapports diplomatiques avec Israël, j'ai eu une idée assez originale, puisqu'en même temps, les rapports étaient rétablis avec le Vatican : celle d'ouvrir les deux représentations, au même moment, dans la même rue, Vorsilska, où se trouve le siège du nonce apostolique et où siégeait, autrefois, l'ambassade d'Israël. En réalité, l'établissement de nos rapports a été moins théâtral, mais rapide et opérationnel... »

D'autres souvenirs de Vaclav Havel s'attachent à ses visites en Israël et ses rencontres avec des dirigeants de ce pays :

« Lors de ma première visite, au cours de laquelle les relations diplomatiques rompues en 1967 ont été rétablies, j'ai présenté, à l'université de Jérusalem, une conférence sur le thème « Franz Kafka et ma présidence » : Kafka est l'écrivain qui m'a le plus influencé dans ma création, ma pensée et mon rapport envers le monde. J'ai beaucoup admiré Jérusalem qui me paraissait comme une ville fascinante - je ne vous dirais pas quel message j'ai glissé entre les pierres du Mur des lamentations. Lors de mes voyages, j'ai rencontré tous les principaux dirigeants israéliens. Quant à l'actuel Premier ministre gravement malade Ariel Sharon, même si ne l'ai pas connu, personnellement, je pense très souvent à lui, ces jours-ci... »