Visací zámek : un hommage punk au "prezident"
En ce dimanche post-électoral, au lendemain du premier tour d’un scrutin présidentiel où pour la première fois les Tchèques choisissent leur président, il est bon de se rappeler ce slogan : « élections : piège à cons. » Et quoi de mieux qu’une formation punk, en l’occurrence Visací zámek, l’un des plus vieux groupes de punk tchèque, pour se le remémorer. Aussi, nous débutons ce dimanche musicale avec une chanson de rigueur puisqu’elle se nomme « Prezident », un morceau désormais classique revisité récemment dans un clip où l’actuel chef de l’Etat Václav Klaus en prend pour son grade. Jan Haubert, le chanteur du groupe, espère que le président saura néanmoins leur accorder l’amnistie, à eux aussi.
Visací zámek, expression désignant le cadenas en tchèque, a fêté ses trente d’existence en 2012. Il est arrivé au mauvais moment au mauvais endroit si l’on en croit le documentaire Visací zámek 1982-2007 qui retrace le parcours du groupe et ses débuts sous le régime communiste. Il faut dire que celui-ci ne voit pas franchement d’un bon œil cette musique potentiellement nihiliste née quelques années plus tôt à Londres et à New York. Leur premier concert se déroule le 7 décembre 1982 au Klub 007 du quartier pragois de Strahov et leur réputation ne tarde pas à être faite. Le service militaire obligatoire vient interrompre la marche du groupe, qui connaît paradoxalement un second passage à vide avec la révolution de velours en 1989 quand apparaissent de nouvelles sous-cultures et de nouvelles façons de se divertir. Visaci zamek persévère et enchaîne sans interruption les concerts, en maintenant, de leur propre aveu, l’impression d’une « tournée sans fin ». De plus, les cinq compères du groupe sortent un album tous les deux ans lors de cette décennie 1990 achevant de les consacrer dans les esprits comme des légendes du punk tchèque.
Rares sont les groupes punk tchèques à ne pas simplement considérer le punk comme une mode apolitique. Visací zámek appartient à cette catégorie et évolue en marge du mouvement anarchiste, ne cachant pas ses sympathies pour les antifascistes et véhiculant un message pacifiste. Le groupe reprend par ailleurs certains poèmes de l’écrivain et illustrateur libertaire de la fin du XIXe siècle František Gellner. Drôle et provocateur, Visací zámek pose ses textes sur des arrangements musicaux pour le moins simplistes mais toujours efficaces, une recette qui fonctionne toujours aujourd’hui alors que leur « tournée sans fin » ne semble pas prête de s’arrêter, l’occasion pour le public tchèque d’entendre encore de nombreuses fois leur motto : “Punk’s not dead, vy volové !”