70e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz : la Pologne reproche aux Tchèques leur concurrence
La Pologne ne verrait pas d’un bon œil le forum international et les cérémonies qui se tiendront les 26 et 27 janvier en République tchèque, au Château de Prague et à l’ancien ghetto de Terezín, à l’occasion du 70e anniversaire de la libération du camp de concentration d’Auschwitz. Parallèlement ou presque, le 27 également, au musée d’Auschwitz, est en effet prévue une grande cérémonie internationale de commémoration sur laquelle les autorités locales ne souhaitent pas qu'ombre soit faite. A en croire la presse varsovienne, la chef du gouvernement Ewa Kopacz aurait même fait part de son indignation au Premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka. Mais à Prague, on dément tout malentendu.
« Du point de vue de Varsovie, il existe deux problèmes. Le premier est que le président tchèque Zeman organise à Prague une manifestation qui concurrencera les cérémonies d’Auschwitz. Et le second est qu’il a invité officiellement le président russe Vladimir Poutine. »
En réponse à la première de ces accusations, le ministère des Affaires étrangères a indiqué que la République tchèque avait été sollicitée par le Congrès juif européen et le Parlement européen pour l’organisation du forum et qu’il lui avait semblé de son devoir de répondre par l’affirmative.
En revanche, le président de la République, Miloš Zeman, a bien invité, malgré les critiques, Vladimir Poutine en tant que représentant de l’un des quatre pays vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale, et ce donc au même titre que Barack Obama, David Cameron et François Hollande. Même si le président russe ne viendra probablement pas, et qu’il ne se rendra pas non plus à Auschwitz, comme il l’a fait savoir ce mardi, cette invitation a été mal perçue en Pologne. « Les Tchèques, qui ne sont pas partisans de sanctions dures contre la Russie, font un cadeau à Poutine en organisant des célébrations concurrençant celles que prépare la Pologne au musée d’Auschwitz. C’est étrange », pouvait-on ainsi lire la semaine dernière dans la Gazeta Wyborcza, qui citait un membre du bureau de la présidente du Conseil des ministres polonais. Cependant, le Premier ministre Bohuslav Sobotka affirme que, contrairement à ce que prétend le quotidien polonais, la ligne téléphonique entre Prague et Varsovie n’est nullement brouillée :« Tout cela me rappelle un peu les informations de Radio Erevan (station de radio fictive inventée sous l’ancien régime communiste en Union soviétique et dans ses pays satellites qui permettait de diffuser des informations humoristiques, ndlr), car la Première ministre polonaise ne m’a jamais appelé pour parler de cette affaire. Au contraire, c’est moi qui ai abordé le dossier et qui ai informé Ewa Kopacz lors de sa visite à Prague que les cérémonies organisées en République tchèque ne concurrençaient en aucun cas quoi que ce soit. »Finalement, ce sont les présidents de parlement de vingt-cinq pays ainsi que celui du Parlement européen, Martin Schulz, qui ont répondu à l’invitation tchèque et devraient être présents à Prague. Et là aussi, à en croire Hynek Kmoníček, directeur du département en charge des affaires étrangères au Château de Prague, cela ne poserait souci à personne :
« Je ne tiens ces informations que des médias. Les présidents Zeman et Komorowski se sont rencontrés au moins huit fois l’année dernière en raison des cérémonies organisées pour le 25e anniversaire de la chute des régimes communistes dans la région. Si donc la Pologne avait des reproches à nous faire, elle en a eu l’occasion à maintes reprises. Or, nous n’avons eu écho d’aucun reproche, et ce pour une simple raison, à savoir que les manifestations qui se tiendront dans chacun de nos pays ne se font pas de concurrence et se complètent. Leur contenu, leurs invités et leur public sont même très différents. Pour ce qui est des dates, elles ne sont pas en collision non plus. Ceux qui voudront participer aux deux manifestations, en Pologne comme chez nous, le pourront sans problème. »Reste quand même qu’il faudrait sans doute être le président tchèque pour pouvoir être à Prague, à Terezín et à Auschwitz dans la même demi-journée.