A côté de la Pologne, les Tchèques manifestent leur nationalisme à leur manière
Les affaires et faits divers témoignant d’une montée de la xénophobie se multiplient en République tchèque aussi, quelques jours seulement après les recommandations en la matière pourtant faites par les Nations unies. Les réactions sont toutefois tout aussi nombreuses.
Seulement voilà, ces messages en arabe ou en persan, apparus du jour au lendemain sans aucune précision ou autre inscription sur les affiches, n’ont pas été bien compris de tous. Ce n’est que quelques jours après son lancement que l’ONG, par ailleurs très appréciée des Tchèques, a fait savoir que c’était elle qui était à l’origine de cette campagne. Mais le mal était déjà fait, certaines réactions s’offusquant de voir apparaître des inscriptions dans des langues inconnues, et notamment en arabe, dans l’espace public – leur « espace tchéco-tchèque ». Directeur de la section en charge des projets de développement à Člověk v tísni, Jan Mrkvička explique pourquoi l’organisation a choisi de mener sa campagne de communication sous cette forme certes originale mais mal perçue par une partie du public :
« Nous avons voulu donner la parole aux gens que nous aidons pour qu’eux aussi puissent en quelque sorte s’exprimer dans l’espace public en République tchèque, un pays qui se referme de plus en plus sur lui-même ces derniers temps. Nous sommes les témoins d’interprétations toujours plus simplistes de qui est qui… Notre volonté est donc de montrer que des gens en chair et en os se cachent derrière nos projets et d’expliquer que notre mission ne consiste pas à distribuer une aide matérielle aux quatre coins du monde. Nous avons ressenti le besoin de dire aux gens, à savoir donc les Tchèques, que nous menons des projets concrets qui apportent des solutions sur le long terme aux problèmes que d’autres gens dans le monde peuvent avoir. »Sans être majoritaires non plus, les réactions qu’a suscitées cette campagne témoignent de l’atmosphère qui règne actuellement en République tchèque, quelques semaines après la tenue des élections législatives qui, pour la première fois dans l’histoire du pays, ont vu un parti d’extrême-droite, le SPD, recueillir plus de 10% des suffrages en axant son programme sur le rejet des Roms et des migrants.
Pour rappel, la semaine dernière, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a recommandé aux autorités tchèques d’œuvrer à une meilleure intégration de la minorité rom dans la société majoritaire et de veiller à la montée du racisme, de la xénophobie et de l’islamophobie dans le pays (cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/faits/integration-des-roms-et-montee-du-racisme-lonu-recommande-a-la-tchequie-den-faire-plus). Invité à réagir à ces recommandations sur une chaîne de télévision privée, le président de la République, Miloš Zeman, a déclaré qu’il ne voyait aucune raison d’appliquer une politique de discrimination positive vis-à-vis des Roms, estimant que « même une discrimination positive reste une forme de discrimination ».Toujours selon le chef de l’Etat, la grande majorité des personnes asociales en République tchèque seraient des Roms, notamment parce qu’elles refusent le travail qu’il leur est proposé malgré leur bon état de santé. « Que 90% de ces asociaux soient des Roms, est certainement vrai. Il y a aussi 10% de fainéants blancs et nous devons nous comporter de la même façon envers tous de façon à ne discriminer aucun des deux groupes et à ne pas violer les droits de l’homme », a-t-il enfin ajouté sans se préoccuper de prendre de gants.
Ces propos ouvertement anti-rom ont entraîné une autre réaction, cette fois des membres du Conseil gouvernemental en charge des affaires de la minorité rom. Ceux-ci ont mis en ligne une lettre ouverte sur le site romea.cz dont Martina Horváthová, elle aussi membre du conseil, résume le fonds :
« Je considère la déclaration de monsieur Zeman comme étant tout à fait déplacée et hors de propos. J’estime que s’il ne dispose pas de données précises, monsieur le président devrait s’abstenir d’avancer des chiffres et de porter des jugements sur quelque groupe de la population que ce soit, et ce d’autant plus si ses jugements ont une connotation péjorative. »Si l’on ajoute à tout cela encore l’affaire de l’école de Teplice, où la publication par un quotidien régional d’une photo d’une classe de première (équivalent du cours préparatoire) composée d’enfants majoritairement roms, vietnamiens et maghrébins a provoqué une multitude de commentaires racistes et haineux (cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/infos/le-ministre-de-leducation-outre-par-les-attaques-racistes-visant-une-ecole-de-boheme-du-nord), on se dit alors que la République tchèque n’est finalement peut-être pas proche seulement géographiquement de la Pologne et de ses grands rassemblements nationalistes.