A Prague, Laurent Bigot donne le rythme à des objets délaissés du quotidien

'D’un air instable'

Ce jeudi à 20h, l’électro-acousticien français Laurent Bigot présente son spectacle « D’un air instable », dans le cadre d’un festival au théâtre Alfred ve Dvoře. Cet artiste crée du son à partir d’objets souvent étonnants : son dernier spectacle met en scène des bouteilles remplies puis vidées d’air, dans un numéro entre théâtre et concert. Pour Radio Prague Int., il revient sur sa carrière musicale. 

« Je suis musicien et j’ai pratiqué la musique de différentes façons. J’ai joué pendant des années du saxophone, avec lequel j’ai pu faire du jazz et de la musique improvisée. J’ai également joué dans une fanfare. Parallèlement, je pratique parfois l’acousmatique et je compose en studio. Depuis une vingtaine d’années, je m’intéresse beaucoup aux objets et aux sons qu’ils peuvent produire. Je développe des spectacles autour des objets en essayant de leur donner une vie, en les mettant en mouvement de manière à ce qu’ils puissent faire des sons. »

Vous faites de la musique mais j’ai aussi vu des vidéos du spectacle avec les bouteilles, cela peut nous faire penser à du théâtre. Est-ce que vous cherchez à mélanger les genres dans vos spectacles ou vous classez-vous dans un genre artistique particulier ?

'D’un air instable' | Photo: Site officiel du théâtre Alfred ve Dvoře

« Ce spectacle est seulement une partie de ce que je fais. Il y a des choses que je pratique en musique, qui sont vraiment uniquement pour les oreilles. Pour ce spectacle ‘D’un air instable’, j’ai été influencé par le théâtre musical. J’ai envie de montrer que quelque chose peut exister pour les yeux et pour les oreilles en même temps. Nous pouvons avoir deux lectures différentes de mes créations. »

Pourquoi avez-vous choisi de faire de l’art avec des objets qu’on pourrait percevoir comme des déchets tels que les bouteilles en verre ? Par exemple, est-ce pour éviter le gaspillage et faire du recyclage ?

« Je sais que c’est dans l’air du temps de se poser des questions sur ce thème et, comme beaucoup de gens, je m’en pose. Mais cela n’a pas du tout été une raison pour créer ce spectacle. Vous parlez des bouteilles en verre mais j’utilise aussi des bouteilles en plastique. Ce qui m’intéresse dans ces dernières, c’est que nous pouvons les faire vivre en les gonflant et en les dégonflant donc c’est à la fois visuel et auditif. J’ai des retours de spectateurs qui me disent avoir vu une représentation d'êtres humains, d’autres qui vont y voir une ville. J’aime bien ce côté qui reste assez libre, il n’y a pas de militantisme anti-déchet. »

D'UN AIR INSTABLE

Vous parliez des interprétations que se fait le public, quels retours avez-vous généralement des spectateurs ? J’imagine qu’ils sont surpris parce que ce que vous faites n’est pas reproduit par d’autres artistes…

« J’ai des retours parce que c‘est une petite forme, il n’y a pas beaucoup de spectateurs à la fois. Cela ne dure pas longtemps donc, en général, nous discutons après avec les gens qui s’intéressent. Les avis  peuvent être très divers : des gens vont être sensibles à l’humour tandis que d’autres ne vont pas du tout percevoir ce côté humoristique et vont trouver le spectacle grave. C’est tout de même un spectacle que je pense avant tout musical, où des sons racontent une histoire abstraite même si elle est faite à partir d’objets qui bougent. J’ai donc des retours sur cet aspect sonore. Les gens sont aussi souvent intéressés pour savoir comment tout cela fonctionne. Je leur explique donc comme je peux. »

Quelle est la différence entre votre ancien spectacle ‘Le petit cirque’ et votre nouveau ‘D’un air instable’ ?

'Le petit cirque' | Photo: YouTube

« ‘Le petit cirque’ était mon premier essai de spectacle avec des objets qui bougent tout seuls, qui font du son, qui donnent à voir et à entendre à la fois. Ce spectacle tournait autour de l’univers du cirque avec des objets qui font des numéros visuels et sonores. Je pense que de ce spectacle émanait une poésie à laquelle les gens étaient très sensibles. J’avais des retours qui ne portaient pas toujours sur la musique mais plutôt sur l'univers poétique global du spectacle. Avec ‘D’un air instable’, j’ai eu envie d’affirmer davantage le côté musical, tout en gardant le fait que des objets se meuvent. Nous sommes plus sur des mouvements qui reviennent continuellement. C’est moins surprenant au niveau visuel, une fois que le spectateur est entré dans cette sorte de ‘climat’. Ce nouveau spectacle s’adresse vraiment aux oreilles, davantage que mon premier spectacle. »

'D’un air instable' | Photo: Site officiel du théâtre Alfred ve Dvoře

Vous vous produisez beaucoup à l’étranger, en Europe notamment. Pourquoi est-ce important de montrer votre travail hors de France ?

« Cela s’est fait assez naturellement. Il y a eu une époque où j’ai beaucoup joué en France. C’est par un réseau international de marionnettes que j’ai pu exporter le spectacle dans d’autres pays. Ce n’est pas un choix de ma part mais j’en suis ravi, surtout pour aller jouer dans des belles villes comme Prague. »