Aja Vrzanova
Alena Vrzanova, double championne du monde en patinage artistique et la première femme qui a sauté le double Lutz, a été obligée de quitté sa patrie en 1950. Quarante ans se sont écoulés avant qu'elle ne puisse revoir son pays natal. Il était interdit de prononcer son nom et de parler d'elle!
Alena Vrzanova, née en 1931, se faisait depuis toute petite appeler Aja. Diminutif qu'elle a gardé tout au long de sa carrière jusqu'à présent. Aja vient d'une famille aisée. Son grand-père était professeur de mathématiques et son père conseiller en chef au ministère des Finances. Toute la famille aimait beaucoup le sport, mais ce fut surtout la maman qui initia la petite Aja à faire du ski déjà depuis l'âge de quatre ans. En 1938 les troupes allemandes envahissent les régions limitrophes tchécoslovaques. Il n'est plus possible de skier dans les Monts des Géants. La maman d'Aja achète à sa fille une paire de patin à glace. Aja est alors âgée de six ans. Elle n'apprécie le patinage que médiocrement et le trouve ennuyeux. Aja Vrzanova suit tout de même l'entraînement sous la conduite de Karel Glogar avec ardeur. La petite fille prend goût au patinage jusqu'à l'adorer. Elle gagne sa première compétition à l'âge de sept ans. En 1948 A. Vrzanova a conquis au championnat d'Europe la médaille de bronze. Un an plus tard, la jeune patineuse gagne le championnat du monde à Paris. Pour son exploit elle est félicitée par le général de Gaulle en personne. La carrière d'Aja Vrzanova monte avec une intensité surprenante. La légendaire Sonja Henie, dix fois championne du monde, se rend en 1947 à Prague et désire rencontrer la meilleure patineuse artistique de la Tchécoslovaquie. Ainsi Aja à l'occasion de rencontrer son idole qu'elle veut imiter. En 1950, elle devient pour la quatrième fois championne de la République tchèque et championne d'Europe à Oslo. A. Vrzanova s'entraîne sous la conduite du célèbre Arnold Gerschwiller pour le championnat du monde qui va avoir lieu à Londres. A. Vrzanova veut défendre son titre de championne. Avant son départ pour Londres, la patineuse doit signer un contrat dans lequel elle s'engage à terminer sa carrière de patineuse artistique après le retour de Londres et à partir pour Moscou pour entraîner les jeunes patineurs soviétiques. Situation peut motivante! Ses parents décident pour elle; Aja partira pour Londres et ne reviendra plus en Tchécoslovaquie. Les parents supposent la rejoindre plus tard. Aja se rend bien compte de ce que son père ne partira pas aussi facilement car il a de vieux parents malades qu'il soigne. A. Vrzanova réussit à défendre son titre de championne du monde et reste à Londres.
A Prague la famille d'Aja subit un vrai enfer. La Police d'Etat (STB) déclenche une série d'interrogatoires interminables. L'appartement est fouillé à plusieurs reprises, sans mandat de perquisition bien évidemment. Quatre-vingt trophées d'Aja disparaissent. Parmi d'autres, la coupe du championnat du monde de Paris que l'on n'a jamais réussie à retrouver. Son père est licencié du ministère. Il termine sa carrière de fonctionnaire ministériel dans une mine. Il ne revoit sa fille qu'après treize ans en Californie. C'est un homme brisé par toutes les souffrances infligées par le régime communiste inhumain qui descend de l'avion.
Après sa fuite, Aja habite dans la villa d'A.Gerschwiller qui, avec l'aide des gardes de corps de l'Ambassade des Etats Unis, veille à sa sécurité. Les agents de la STB vont jusqu'à tenter de kidnapper la jeune patineuse de talent dans la rue. On menace également Aja de fusiller sa mère si elle ne revient pas en Tchécoslovaquie. Aja résiste à la pression développée par les autorités tchécoslovaques et part pour les Etats Unis. Sa mère la rejoint aussitôt et l'aide énormément à réussir dans sa carrière. Grâce à A. Gerschwiller, A. Vrzanova signe son premier contrat professionnel avec la revue sur glace Ice Follies. Après trois ans, Aja signe un contrat avec Ice Capades, la plus grande revue américaine sur glace. Pendant treize ans elle reste l'étoile de la revue, connue sous le nom d'Aja Zanova, la prononciation du nom Vrzanova étant trop compliquée pour les Américains. Elle patinait dans dix spectacles par semaine, huit mois par an. Plus de trois millions de spectateurs venaient pendant la saison admirer son art. Elle surprenait par exemple par son fameux saut écarté.
A. Vrzanova quitte la revue au point culminant de sa gloire et épouse Pavel Steindler, restaurateur d'origine tchèque. P. Steindler a offert à sa femme comme cadeau de mariage, le Duck Joint, un des trois restaurants dont il est le propriétaire. P. Steindler a créé avec Aja encore trois autres restaurants, tous très populaires à New York. Le Czech Pavillon (Le Pavillon tchèque) était l'endorit de rencontre des célébrités comme Paul Newman, Robert Redford, Milos Forman, Liz Taylor, Grace Kelly, Michail Barychnikov...Le bonheur conjugal d'Aja ne dure que quatorze ans. Son mari tombe gravement malade et meurt en 1983, un an après la mère d'Aja. Aja est abattue; elle a perdu les deux êtres les plus chers au monde. La célèbre patineuse réussit à surpasser la douleur grâce au patinage.
Actuellement, A.Vrzanova s'adonne à un grand nombre d'activités. Elle gère la patinoire du Central Park, en plein centre du Manhattan, arbitre les championnats du monde pour professionnels, coopère avec le Comité olympique américain, recherche les nouveaux talents pour les revues sur glace... Le patinage reste toujours son loisir favori, mais elle ne s'aventure plus aux doubles et triples sauts. A. Vrzanova n'a jamais oublié que jadis, il lui a fallu le coup de pouce d'A. Gerschwiller, sans lequel elle n'aurait peut être pas réussi si rapidement. Elle a aidé un grand nombre de sportifs et d'artistes à s'intégrer dans la vie professionnelle aux Etats Unis. A titre d'illustartion, il s'agissait de Hana Mandlikova, Martina Navratilova, Milos Forman, Ondrej Nepela...A. Vrzanova est revenue à Prague pour la première fois après quarante années d'exil en 1990. La reine du patinage artistique a toujours beaucoup d'admirateurs et d'amis en République tchèque. L'image de la patineuse artistique la plus renommée dans l'histoire du patinage artistique tchécoslovaque est toujours restée au fond du coeur des Tchèques.