Benjamin Claessen de Métamorphosis : « j’ai changé le style de décoration florale à Prague »

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Métamorphosis, c’est le nom d’un fleuriste installé dans le cœur de la vieille ville de Prague, à deux pas de la Synagogue espagnole. Le patron s’appelle Benjamin Claessen.

Benjamin Claessen
« Je suis arrivé à Prague par hasard. Je venais beaucoup en vacances quand j’étais enfant. Puis je suis tombé amoureux de la ville et je me suis dit que je pourrais ouvrir un magasin de fleurs dans le vieux centre. J’ai donc déménagé à Prague à la fin des années 1990, et on a ouvert un magasin en mars 2000. »

Avez-vous une formation de fleuriste ?

« Oui, j’ai étudié l’art floral en Belgique, et j’ai beaucoup travaillé dans les magasins de fleurs pour apprendre beaucoup de choses sur les plantes, sur les fleurs coupées, comment organiser de grands évènements. »

Est-ce difficile d’ouvrir un magasin de fleurs à Prague ?

« Au début, c’était très compliqué parce qu’il n’y avait pas les fleurs auxquelles on était habitué en Belgique, en Hollande ou France. Quand j’ai commencé, je suis allé chez les grossistes et j’ai commandé beaucoup de fleurs que les grossistes ne connaissaient pas. Ils n’en avaient jamais entendu parler. Ils ne voulaient pas risquer d’acheter des fleurs qu’ils craignaient de jeter après. Je devais presque payer tout à l’avance pour cette raison. Par exemple, ils n’avaient jamais de tulipes, juste seulement quand elles fleurissent au mois de mai ou juin. Ils n’en vendaient que quelques-unes. En Belgique, les tulipes se vendent par vingtaine ou cinquantaine. Ici, ils les vendaient à la pièce.

C’était tout à fait nouveau pour moi. Et j’ai commencé à commander des tulipes par mille ou deux milles pièces. Une fois de plus les grossistes n’en croyaient pas leurs yeux. Ils croyaient que j’allais les manger ou les donner gratuitement. Mais après un an ou deux, ils ont vu qu’on peut vendre des tulipes et maintenant ils vendent des milliers de pièces par jour. »

Quelles étaient les fleurs et les plantes disponibles au début ?

« Dans l’assortiment de fleurs coupées, ils y avaient seulement des roses ou des chrysanthèmes. C’était vraiment un assortiment très classique. Rien de spécial. Mais nous travaillons beaucoup avec la verdure, beaucoup d’eucalyptus, de myrtilles. Je pense que j’ai changé le style de décoration florale à Prague. »

Il y vrai que le magasin est très beau et différent de ce que l’on voit dans la rue et dans les kiosques. Mais avez-vous vu une évolution chez les fleuristes tchèques ?

« Oui, parce qu’au début des années 2000, des grossistes hollandais sont venus. Ils ont aussi essayé de vendre un assortiment plus large. Donc tous les autres fleuristes peuvent avoir plus de choix mais à mon avis, 80% d’entre eux ne savent pas comment utiliser ces matériaux pour donner le plus bel effet, pour que ce soit joli. »

Quelles est votre clientèle ici ? Y-a-t-il beaucoup de touristes ?

« Non, ce ne sont pas des touristes, parce que quand on est en vacances, on n’achète rarement des fleurs. Ma clientèle est composée de 65% de Tchèques et de 35% d’étrangers vivant à Prague. On a beaucoup d’hôtels, de restaurants, de bureaux. On fait beaucoup d’évènements pour des sociétés de catering. On travaille beaucoup avec Zátiší catering, et avec le Palais Žofín. On fait beaucoup d’évènements au Château, au Rudolfinum, à l’opéra. »

Les fleurs sont-elles chères en République tchèque ?

« Au début, les fleurs étaient très chères parce qu’il y avait encore des impôts extra à payer. Les transports étaient très chers parce qu’il y avait les frontières et les camions devaient attendre. Les fleurs en Hollande étaient plus chères il y a 10 ans, parce que les marchés en Hollande, en France, en Belgique ont baissé. Ces deux ou trois dernières années, le prix des fleurs a beaucoup baissé, parce que les frontières sont ouvertes. On ne perd plus de temps. En douze heures elles sont ici. Si j’achète des fleurs la veille, elles arrivent le lendemain matin. »

Y a-t-il une production de fleurs en République tchèque, et en achetez-vous ?

« Je n’achète jamais des fleurs produites en République tchèque. Il y a une toute petite production, qui représente à peine 10% du marché. Mais je n’achète pas parce que la qualité n’est pas terrible et le prix est deux fois plus cher qu’en Hollande. Et je préfère payer plus cher pour une fleur de meilleure qualité. »

Y a-t-il beaucoup de concurrence sur le marché des fleuristes, et existe-t-il des chaînes de magasins de fleurs ?

« Il y a des chaînes de fleuristes, dans les stations de métro ou dans les centres commerciaux. Mais ce n’est pas de la concurrence pour moi. Nous avons une autre gamme de fleurs, j’achète une autre qualité et nous faisons des choses différentes. »

Est-ce que les Tchèques aiment les fleurs et en achètent beaucoup ?

« Les Tchèques aiment les fleurs et les plantes. Et je pense que relativement, ils achètent plus de fleurs que les Français ou les Belges, notamment parce qu’ils célèbrent leur fête. Par exemple, si Jana ou Renata, ou Petra ou Lenka ont leur fête, tout le monde achète des fleurs. Ils sont très attentifs, même si ce n’est qu’une rose. A seize ans, ils vont acheter une fleur pour leur copine. »

Ils sont romantiques ?

« Oui, ils sont romantiques. »

Et les plantes ?

« Nous ne faisons pas beaucoup de plantes, parce que nous n’avons pas de place dans le magasin. Je les laisse pour les grands magasins. Mais les Tchèques aiment bien les plantes, et ce que nous vendons beaucoup, ce sont les orchidées. Ils en sont fous ! »

Photos : Anne-Claire Veluire