Célébrations de la fin de la guerre en Chine : le président tchèque sela joue solo
Alors que les pays de l’Union européenne ont tenté d’adopter une position commune en refusant que leurs chefs d’Etat et de gouvernement participent aux célébrations du 70e anniversaire de la fin de la guerre à Pékin, en septembre, la République tchèque a apposé son veto. Une position qui fait tache au sein des Vingt-huit et que la diplomatie tchèque justifie par la décision prise par le président Miloš Zeman de se rendre dans la capitale chinoise.
« Je ne pense pas que cela soit un problème. Je ne crois pas que cela ait suscité un débat houleux pas plus ici qu’au sein de l’UE. »
Du côté du Parti social-démocrate (ČSSD), principale formation de la coalition gouvernementale, et dont le président lui-même a été le leader il y a de cela quelques années, on préfère défendre la nécessité d’indépendance d’opinion du pays plutôt que de s’interroger sur les couacs que peut susciter une position d’électron libre, comme le souligne Jaroslav Foldyna, membre de la commission en charge des affaires étrangères au Parlement :
« Je n’ai pas l’impression que nous soyons particulièrement des originaux. Nous sommes membres de l’UE, avec des droits et des devoirs. Nous utilisons notre droit à la différence et je pense qu’il est bien que nous montrions que nous ne sommes pas un simple satellite. Les gens peuvent ainsi voir que le gouvernement tchèque et la diplomatie tchèque ont leur propre position. Nous avons droit de l’exprimer et nous l’avons fait. Il n’y a donc pas de problème. »Selon le quotidien économique Hospodářské noviny, l’UE veut éviter les célébrations de Pékin notamment en raison des tensions actuelles entre la Chine et le Japon. En outre, la présence du président russe Vladimir Poutine, dont le pays est toujours sous le coup de sanctions européennes en lien avec la crise ukrainienne, ajoutée à la participation de l’armée russe au défilé prévu sur la place Tienanmen, constituent d’autres raisons pour lesquelles les gouvernements européens, République tchèque exceptée donc, rechignent à envoyer leurs représentants. Toutefois, à en croire le chrétien-démocrate Ondřej Benešík, membre du plus petit des partis de la coalition gouvernementale, il est regrettable que la République tchèque ne parle pas d’une seule et même voix avec le reste de l’UE :
« Je pense que c’est une erreur d’avoir une autre position que celle des autres pays membres de l’UE. Evidemment, rendre hommage aux victimes de la guerre est tout-à-fait honorable. Le problème, c’est plutôt le contexte. Cela dit, je ne pense pas que l’on puisse comparer ce voyage avec celui à Moscou récemment. Il aurait fallu en débattre, en effet, mais la République tchèque a utilisé son droit de veto. Le président tchèque n’a pas donné un camouflet à l’UE, c’est une procédure standard. Le seul souci, c’est que cela fait de nous un peu des outsiders au sein de l’UE car le président a pris cette décision. Le gouvernement l’a approuvée. Personnellement, j’ai des réserves, mais c’est la seule chose que je puisse faire. »En mai dernier déjà, Miloš Zeman avait été un des rares représentants de l’UE à répondre présent à l’invitation de Vladimir Poutine, à l’occasion des célébrations de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Sa présence à Moscou n’avait pas manqué de susciter de vives critiques sur la scène politique tchèque, quand bien même le chef de l’Etat avait finalement décidé de ne pas assister au défilé militaire. A Pékin, cette fois, il n’a pas encore été précisé s’il y serait présent.
Aujourd’hui, d’aucuns relèvent que ce voyage en Chine est le deuxième en un an à peine. A l’automne 2014, le président tchèque s’était déjà attiré de vives critiques : il lui avait alors été reproché d’avoir fait la promotion des intérêts économiques bilatéraux au détriment de la défense des droits de l’Homme, une position différente de celle qui était traditionnellement celle de la diplomatie tchèque depuis l’ancien président Václav Havel.